Annales des Mines (1846, série 4, volume 9) [Image 124]

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HISTOIRE DES ACIÉRIES 254 sentiellement étrangères à la propension aciéreuse

des fers indigènes : il est dû, en premier lieu, aux tarifs élevés établis par la restauration; en second lieu, à l'emploi que l'on commence à faire des bonnes sortes de fers à acier du Nord. Dans cette

période, comme dans les précédentes, on n'a jamais fait d'aciers fins en France qu'en cémentant les fers du Nord : ce sont les aciers fabriqués d'après

ce principe qui seuls peuvent prétendre à lutter un jour contre les aciers étrangers, clans les conditions d'une libre concurrence. Tant que l'infério-

rité actuelle des fers indigènes subsistera, on pourra sans doute , à l'aide des tarifs, augmenter à volonté la production des aciers entièrement indigènes ; mais, quelle que soit l'habileté acquise par nos fabricants , l'édifice industriel ainsi créé n'aura jamais d'autre base que le tarif, et s'écroulera infailliblement dès que celui-ci sera supprimé ou notablement réduit. En traçant cette histoire de nos aciéries, je me suis seulement attaché au point essentiel pour la question en litige, à la fabrication des aciers bruts de cémentation. L'histoire de nos fabriques d'acier naturel et d'acier fondu prouverait également l'insuffisance des ressources que celles-ci ont tiré jusqu'à ce .jour des matériaux indigènes. Il me paraît superflu toutefois (l'entrer à ce sujet clans des détails circonstanciés; je me bornerai à exposer ici un petit nombre de faits qui me paraissent compléter suffisamment cette appréciation sommaire du passé des aciéries françaises. Indications bis-

Les fabriques d'acier naturel datent, en France,

eeique"ur les d'une époque fort antérieure à celle des aciéries de fabriques d'acier cémentation ; les produits de celles de ces fabriques naturel.

DE CÉMENTATION.

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qui tirent leurs matières premières du sol français ont toujours été de qualité inférieure, par com-

paraison avec les produits similaires fournis par les fabriques allemandes. Les anciens gouvernements ont cependant accueilli avec faveur toutes les personnes qui prétendaient avoir trouvé les moyens d'améliorer la fabrication , et parfois même ils ont pris l'initiative des améliorations. C'est même sur cette classe de fabriques que se portèrent d'abord les efforts les plus directs de l'agence des armes portatives, au commencement des guerres de la révolution. Ces fabriques étaient toutes créées; l'instruction rédigée par l'ordre du comité de salut public donnait l'espoir de perfectionner leurs produits par de meilleures méthodes de travail : c'est donc à ces usines que l'on demanda la matière première des douze cent mille baïonnettes , dont la fabrication préoccupa surtout l'agence des armes. Des écoles pratiques furent immédiatement créées dans les diverses provinces où se fabriquait l'acier naturel : les meilleurs ouvriers, mis en réquisition, y expérimentèrent les

méthodes recommandées par le comité de salut public, pour propager ensuite , dans les forges de la république, celles de ces méthodes dont la supériorité aurait été ainsi constatée. Des agens d'un ordre plus élevé furent chargés, en qualité d'inspecteurs d'aciéries, de diriger ces tentatives; trois de ces inspecteurs, chacun aux appointements de G.000 fr., .furent créés pour la seule province du Nivernais. Mais tous ces efforts restèrent sans résultat. Une volumineuse correspondance, conservée dansles archives de l'administration des mines, montre comment l'agence des armes dut renoncer peu à peu à toutes les illusions qu'on