Annales des Mines (1888, série 8, volume 7, partie administrative) [Image 171]

Cette page est protégée. Merci de vous identifier avant de transcrire ou de vous créer préalablement un identifiant.

338

CIRCULAIRES. CIRCULAIRES. Paris, le -19 novembre 1888.

Monsieur le préfet, par sa circulaire du 23 mars 1887, l'un de mes prédécesseurs, en vous invitant à procéder, avec le concours des ingénieurs des mines, à une enquête sur l'emploi des explosifs dans les mines à grisou, vous faisait connaître qu'une commission spéciale avait été instituée sous la présidence de M. l'inspecteur général des mines Haton de la Goupillière, à l'effet d'étudier toutes les questions se rapportant à cet important sujet, et notamment le rôle des divers explosifs en présence d'atmosphères plus ou moins grisouteuses. A la suite d'un accord entre mon administration et celle de la guerre, la commission spéciale s'est entendue avec celle des substances explosives, que préside M. Berthelot ; et, par les soins de celle-ci, à laquelle avaient été adjoints trois des membres de la commission instituée par mon département, de nombreuses et importantes expériences ont été entreprises et poursuivies dans des conditions absolument nouvelles par une sous-commission spécialement constituée en vue de ce travail. Le président de cette sous-commission, M. l'inspecteur général des mines Mallard, vient de présenter le résultat de ses recherches dans deux rapports qui ont été adoptés par la commission des substances explosives et insérés dans la 5e livraison des Annales des mines pour 1888 (*). Je vous adresse un certain nombre d'exemplaire du tirage à part de ces documents. Voici, en résumé, les enseignements qui découlent des expériences qui viennent d'être faites et des travaux dans lesquels elles sont relatées. On a tout d'abord établi encore une fois le danger résultant de l'emploi de la poudre noire dans les milieux grisouteux, danger qui subsistera quels que soient les procédés de tirage auxquels on pourrait recourir, notamment les cartouches à eau réputées les plus perfectionnées. Les explosifs détonants sont les seuls avec l'emploi desquels on pourrait espérer trouver des conditions satisfaisantes de sécurité, sinon absolue, tout au moins relative. Les seuls de ces explosifs que l'industrie française puisse aujourd'hui se procurer sont les diverses dynamites; à l'air libre, toutes sont susceptibles d'enflammer le grisou. Mais le danger

(*) Voir 1' volume (Mémoires) de 1888, p. 19" et 319.

339

est atténué et peut même théoriquement disparaître, si les dynamites détonent dans certaines conditions. Pour se rapprocher le plus possible de ces dernières, il convient que la dynamite soit tassée au fond du trou de mine aussi fortement que le permettent les précautions élémentaires qu'il est essentiel d'observer dans son maniement, et qu'elle soit bourrée aussi soigneusement et sur une aussi grande hauteur que possible. D'une part, en effet, on doit éviter que, par suite de vides laissés au fond de la chambre de chargement, les gaz de l'explosion puissent se dilater librement avant d'agir sur la roche, et, d'autre part, on doit chercher à faire produire à ces gaz, avant qu'ils ne puissent être en contact avec le milieu grisouteux, le maximum de travail dynamique. Dans le cas de roches fissurées ou crevassées, il ne serait pas inutile d'aveugler au préalable les fissures et crevasses par un premier bourrage à l'argile, dans lequel le trou de mine serait ensuite reformé. s Parmi les diverses sortes de dynamites actuellement livrées à l'industrie, et de la bonne qualité desquelles on devra toujours soigneusement se préoccuper, celle qui, au point de vue dont on traite ici, paraît le moins dangereuse, est la dynamite ordinaire, c'est-à-dire à la nitro-glycérine avec absorbant siliceux. La dynamite-gomme, mélange de nitro-glycérine et de fulmi-coton, doit être considérée comme la plus dangereuse. Au demeurant, comme l'on ne peut jamais être assuré d'avoir réalisé les conditions qui fassent disparaître les dangers inhérents à l'emploi des dynamites clans des milieux qui peuvent être grisouteux, il y avait un intérêt capital à chercher un explosif détonant qui présentât des garanties de sécurité sinon absolues (on ne doit jamais l'espérer avec les explosifs), du moins beaucoup plus satisfaisantes que celles des dynamites. La commission des substances explosives a établi expérimentalement, d'accord avec les vues théoriques de MM- Mallard et Le Châtelier, qu'on pouvait obtenir de pareils explosifs par des mélanges appropriés d'azotate d'ammoniaque soit avec de la dynamite, soit avec certaines autres substances. Ce sera à de pareils explosifs, aussitôt qu'ils pourront être livrés à l'industrie, que l'on devra donner la préférence dans les mines grisouteuses, dès que la pratique aura fait connaître les conditions dans lesquelles il convient de les employer. Il va de soi, en raison des incertitudes qui régneront toujours sur ce sujet, que l'on ne devra jamais compter sur une sécurité absolue, et que le tirage, même avec ces nouveaux explosifs, ne