Annales des Mines (1862, série 6, volume 1, partie administrative) [Image 7]

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LOIS, DÉCRETS ET ARRÊTÉS

Malgré la crise alimentaire que nous traversons, et dont heureusement l'intensité a été considérablement atténuée par l'importation des céréales étrangères, la situation industrielle et commerciale du pays n'aurait eu rien à envier aux années qui ont précédé 1861, si un événement inattendu, la guerre civile entre les États du Nord et les États du Sud de l'union américaine, n'était venu jeter le trouble dans les relations commerciales que nous entretenons avec la République américaine, relations des plus importantes, puisque, indépendamment des importations que nous faisons par la voie de l'Angleterre, et dont la quotité ne peut être précisée, elles se chiffrent par un mouvement de marchandises qui, en 1860, a atteint Z178 millions de francs, dont 229 millions à l'importation et M&9 millions à l'exportation. Nos exportations se composent presque exclusivement de produits fabriqués, dans lesquels nos soieries seules ont figuré pour go millions de francs. Il est facile de comprendre l'influence que doit exercer sur l'industrie d'un pays la fermeture presque instantanée d'un marché aussi important; mais ce n'est pas là le seul dommage que la France ait éprouvé des événements politiques dont les États-Unis sont le théâtre. Ce pays est le principal centre de la production du coton, et c'est chez lui que tous les peuples qui mettent en œuvre cette plante textile puisent leurs principaux approvisionnements. La France, qui, après l'Angleterre, est, en Europe, le plus grand consommateur de coton, souffre de la privation d'une matière première qui a pris une si grande place dans son industrie. Cette situation, le Gouvernement ne peut que la regretter profondément, non-seulement à cause du contre-coup qu'en ressent le pays, mais encore en raison des liens sympathiques qui ont toujours uni la France à la République américaine. Il lui est d'ailleurs impossible de prévoir le moment où nos rapports commerciaux avec les États-Unis pourront s'améliorer. Bien que, pendant le cours de l'année 1861, la guerre d'Amérique ait fait fléchir nos exportations dans une certaine proportion, le mal n'a pas été aussi grand qu'on pouvait le craindre tout d'abord, et les débouchés que nous nous sommes créés ont compensé, pour certains produits, notamment pour certains produits agricoles, le déficit qui se remarque ailleurs. Ainsi, on constate un progrès notable dans l'exportation de nos laines, lins, chanvres, fruits frais et garance, et si l'on a à regretter une diminution plus ou moins sensible sur certains de nos produits manufacturés, nos

SUR LES MINES.

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exportations de tissus de coton écrus ou blancs présentent un accroissement de 2.000 quintaux. Au surplus, pour apprécier sainement le résultat de l'année 1861, il convient d'attendre que la commission des valeurs ait attribué aux importations comme aux exportations le prix moyen des cours constatés pendant le même exercice. Jusqu'à l'exécution de ce travail, il est impossible de faire une comparaison utile entre notre commerce international pour l'exercice 1861 et celui des années précédentes. Si la France souffre d'événements indépendants de sa volonté, le mal qu'elle ressent ne lui est pas particulier ; d'autres peuples en éprouvent également le contre-coup, et chez eux le travail est bien plus fortement atteint. Si nos ouvriers sont obligés de subir quelques diminutions dans les heures de travail, ils n'en sont pas encore réduits à des chômages. Le Gouvernement veille d'ailleurs à ce que les classes ouvrières puissent trouver dans les chantiers de travaux publics des occupations, et un salaire dont elles pourraient être momentanément privées par la continuation de la crise américaine. 11 nous reste, pour compléter cette exposition sommaire des faits qui intéressent le commerce et l'industrie, à dire l'exécution qu'a reçue la loi du 1" août 1860, autorisant un prêt de Uo millions à l'industrie, et à rappeler les deux lois votées par le Corps législatif dans sa dernière session. La première, du 12 juin 1861, a modifié la législation sur la caisse des retraites pour la vieillesse et a édicté certaines dispositions nouvelles favorables aux déposants; la seconde, du 1" juillet, a rendu plus libéral le régime des ventes publiques dont le commerce tire de si précieux avantages. Quant à la loi de 1860, un rapport, émané du président delà commission chargée d'opérer la répartition de la somme de Uo millions et inséré au Moniteur, a fait connaître que le nombre des demandes d'emprunts s'était élevé à cinq cents et représentait un chiffre de 70 millions. Dès le mois d'avril 1861, la répartition de la somme à prêter avait été faite entre les emprunteurs dont les demandes avaient été reconnues légitimes. Depuis cette époque, et par suite de quelques difficultés qui n'ont pas permis de réaliser la totalité des prêts consentis, quelques fonds sont redevenus disponibles. La commission a dû en faire une nouvelle répartition; elle a même jugé utile, pour parer à toutes les éventualités, de distribuer provisoirement une somme supérieure à celle effectivement libre. Aujourd'hui ses travaux peuvent donc être considérés comme définitivement terminés.