Annales des Mines (1909, série 10, volume 16) [Image 163]

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LES QUESTIONS OUVRIERES

que je n'avais pas répondu exactement aux questions du programme. J'avais cru et je persiste à croire, en présence des termes du programme que les rapporteurs n'avaient pas, comme pour les concours académiques, à fournir des travaux entre lesquels le rapporteur général aurait à distribuer les prix; mais que chaque question constituait un cadre où chacun pouvait se mouvoir à sa guise et traiter les points les plus conformes à ses tendances naturelles. D'ailleurs, j'avais donné à mon rapport un titre qui devait, à mes yeux, exclure le moindre malentendu . Après cette réponse générale à la critique de M. Klang, je dois donner quelques réponses aux observations de détail qu'il a bien voulu formuler avec tant d'amabilité. En premier lieu, il m'a demandé si, en mentionnant les caisses locales dans mon rapport, c'est de l'assurance libre ou de l'assurance obligatoire que j'entendais parler : je lui réponds que, pour la France, c'est l'assurance libre que j'ai en vue. En second lieu, quant à l'assurance-accidents, il a fait observer que je ne pouvais pas comparer la situation actuelle de la France à cellp de l'Allemagne avant la loi d'assurance ouvrière de 1884. Je me permettrai de ne pas être de son avis. L'Allemagne avant la loi de 1884 n'avait qu'une loi, celle de responsabilité civile de 1871, qui ne comportait nullement l'assurance dans la forme sinon obligatoire, du moins obligée, qui est le régime actuel de la France. Enfin il a dit que le programme que je m'étais tracé était un programme dont les réponses étaient indiquées d'avance. Je me permettrai de dire que les difficultés que nous trouvons en France à faire accepter par les grandes sociétés des interventions comme celles du domaine populaire montre que j'échappe — et j'en suis peiné — au reproche d'avoir enfoncé une porte ouverte.

ET LA SCIENCE ACTUARIELLE

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C'est à la question ainsi posée que j'ai cherché à répondre dans le rapport que j'ai présenté au Congrès et dont je n'aurai garde de reproduire à cette tribune les développements écrits ; mais je crois devoir les compléter en définissant la tâche de l'actuaire sur ce nouveau terrain. Cette tâche ne laisse pas que d'être délicate au double point de vue technique et économique. D'autre part, les formes variées de la prévoyance sociale comportent des modalités qui exigent une rare faculté d'adaptation aux contingences isolées, et les bases statistiques sont loin d'offrir les mêmes garanties que celles des branches d'assurance dont les actuaires ont la pratique accoutumée. D'autre part, le domaine à mettre en valeur peut réserver des mécomptes, soit que l'actuaire ait apprécié trop légèrement les aléas de l'entreprise, soit qu'au contraire l'application d'un coefficient de sécurité trop pesant ait éloigné la clientèle par l'exagération des tarifs. Il serait donc naturel que les esprits les moins accessibles au découragement hésitent à se charger d'une mission qui semble condamnée d'avance à un échec certain. Il est, par suite, nécessaire de montrer que l'œuvre n'est pas irréalisable et que son succès intéresse au plus haut degré l'avenir de la profession d'actuaire et celui de l'industrie de l'assurance. Tout d'abord l'actuaire n'échappe pas plus que tout autre spécialiste à la nécessité d'élargir son horizon. Bien plus, les hautes fonctions qui l'attendent comme couronnement de sa carrière clans la direction des sociétés d'assurance lui en font un devoir. Ce n'est pas, du reste, en Autriche qu'il est besoin de rappeler l'ardente apostrophe que M. le professeur Victor Loos adressait aux ingénieurs pour leur recommander l'acquisition de connaissances d'ordre économique. L'esprit n'est pas seul à y gagner ; l'influence morale du technicien grandit dans