Annales des Mines (1909, série 10, volume 16) [Image 39]

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LES CATASTROPHES MINIERES AMERICAINES

circulables sur 9 kilomètres. Outre les voies principales et secondaires, 13 kilomètres de doubles voies de quartiers avaient été ventilés, et visités, ainsi que 550 chambres; 337 corps avaient été ramenés à la surface. Une seconde exploration méthodique des deux mines fut immédiatement recommencée et amena la découverte de dix-sept nouveaux corps ; en même temps, les cadavres des chevaux furent évacués. Ce travail prit encore une semaine. Puis on entreprit de relever les éboulements et de remettre la mine en état d'être exploitée à nouveau. On trouva encore huit cadavres, ce qui porta le nombre des victimes à 166 pour la mine 6 et 196 pour la mine 8. au total 362. Les travaux de remise en état furent terminés en février et l'exploitation reprit aussitôt. Causes de l'explosion. — La curieuse coïncidence de la dérive de cars du numéro 6 et de l'explosion suggère la possibilité d'une relation de cause à effet entre ces deux faits anormaux. La dérive, dans les circonstances où elle s'est produite, n'est évidemment pas une conséquence de l'explosion. Il faut examiner si elle n'en pourrait pas être la cause. Il est, en premier lieu, hors de doute qu'une dérive de ce genre devait produire à la base du plan incliné un soulèvement considérable de poussières. Il faut noter, d'une part, que le plan incliné et les galeries qui se trouvaient à sa base étaient éminemment poussiéreux. Le courant d'entrée d'air descend le plan avec une vitesse de 5 à 6 mètres par seconde ; au passage des cars pleins qui réduisent la section libre, la vitesse est encore accrue et atteint 7 à 8 mètres par seconde. La vitesse relative par rapport aux cars qui remontent le courant est encore plus grande ; il en résulte que derrière chaque train de cars qui remonte, le courant d'air souffle une grande

DE MONONGAH, DARR ET NAOMI

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quantité dépoussières folles. Vers la base du plan incliné, la section offerte au passage de l'air est quadruplée par suite des ramifications de galeries. Le courant d'air ralenti laisse déposer les poussières. Le caractère particulièrement poussiéreux de cette région était bien connu des divers témoins que nous avons pu interroger. D'autre part, les cars en dérive, arrivant à la base du plan avec une vitesse considérable, ont dû produire une chasse d'air assez violente pour mettre ces poussières en suspension, et les tonnes de charbon projeté n'ont pas peu contribué à accroître la densité du nuage forme. Ainsi s'est trouvé accidentellement réalisé, au moment même de l'explosion, dans le volume assez considérable offert par les galeries qui se ramifient à la base du plan, un nuage dense formé de poussières fines, pures et facilement inflammables. C« nuage a-t-il pu s'enflammer? Plusieurs causes d'inflammation se trouvaient présentes : trois hommes portant des lampes à feu nu étaient rassemblés dans une cabine située à la base du plan, mais la porte en était poussée; les hommes ne furent pas brûlés et il est douteux que ces lampes aient pu allumer le nuage. Une autre cause se présente comme plus probable. Le fil du trolley de la traction électrique du fond suivait nu le faite des galeries ; les cars qui se sont enchevêtrés sur toute la hauteur de la galerie portaient une armature de fer. Un court-circuit a pu ainsi s'établir par leur intermédiaire entre le fil du trolley et les rails. Or, précisément à ce moment, l'interrupteur magnétique de l'usine électrique, qui se déclenche pour 1.200 ampères, fonctionna, dénotant un court-circuit franc. L'arc électrique produit par un court-circuit de ce genre est plus que suffisant pour provoquer une inflammation de poussières. On a vérifié à la Station d'essais de Liévin qu'un arc ordinaire d'éclairage fonctionnant avec 20 ampères