Annales des Mines (1867, série 6, volume 12) [Image 165]

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DE L'ACIER ET DE SA FABRICATION.

La cémentation par le carbone solide résulte aussi de l'ancienne expérience de Réaumur déjà citée (page 272). Lorsqu'on plonge une barre de fer dans un bain de fonte en

fusion, le fer est progressivement cémenté à partir de la surface. Et l'on sait aussi, par la pratique de M. Verdie de Firminy (Loire), que l'acier fondu, coulé sur du fer chauffé au rouge, s'y attache par soudage en lui cédant un peu de carbone.

M. Margueritte a constaté d'ailleurs que le carbone cheprouvé mine réellement de molécule à molécule, comme déjà Gay-Lussac. en 1846, contrairement à l'hypothèse de M. Leplay (*). Lorsqu'une barre de fer un peu épaisse est faiblement cémentée, par n'importe quel procédé (par un gaz ou du charbon solide), la partie externe est seule carbutée, tandis que le centre demeure intact. Mais si ensuite on chauffe longtemps la barre, au sein d'une atmosphère d'hydrogène, on verra le carbone s'avancer graduellement de la surface vers le centre, en sorte que le fer sera, après refroidissement, faiblement carburé dans toutes ses parties. Ce mouvement des molécules solides, longtemps nié, paraît se rattacher à l'ordre de faits découverts par M. Tresca, dans ses intéressantes expériences sur la fluidité des corps mous.

Rappelons maintenant que lorsqu'on carbure ainsi le fer, par l'un quelconque des modes cités, on peut toujours, à .volonté, obtenir de l'acier ou de la fonte. C'est une question de température et de temps ; seulement la durée de l'opé-

ration et la chaleur nécessaire varient avec la nature du composé carburant. Le charbon très-divisé, l'hydrogène bicarboné, le cyanogène et les cyanures carbuyent plus rapidement que l'oxyde de carbone et le charbon en morceaux.. En partant des faits que je viens de résumer, la théorie

de la cémentation dans les caisses me paraît facile à étar (*) Annales de physique et de chimie, 30 série, t.XVII , p. 225.

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blir. Dans ces appareils, le fer est en présence du charbon, de l'oxyde de carbone et de l'hydrogène faiblement carburé. Chacune de ces substances contribue pour sa part, à la carburation.'L'oxyde de carbone fait la navette. Il est décomposé par le fer, puis de nouveau ramené par le charbon à l'état d'oxyde. Toutefois cette action est lente, et la carbu-

ration doit surtout être le fait du charbon solide. Mais à côté de cela ne se produit-il dans les caisses de cémentation aucune autre réaction ? On sait qu'il se forme des cyanures

alcalins dans les hauts fourneaux, et même en général dans tout appareil où le charbon agit, au rouge intense, sur le carbonate de potasse et l'azote. Or le charbon de bois renferme toujours du carbonate de potasse, et l'azote, aussi ne manque pas dans les caisses à cémenter. Il s'y formera donc du cyanure de potassium qui, lui aussi, doit fairela navette. Le fer décompose le cyanogène,

et le potassium, mis en liberté, reforme du cyanure. Une partie cependant se perd par volatilisation ; aussi, à la longue, le charbon des caisses doit se trouver privé de tout alcali et perd alors, comme agent carburant, une partie de son efficacité première. On sait, en effet , que le vieux cément n'est jamais aussi actif que le cément frais, et s'il a- perdu un peu d'hydrogène carboné dans une première opération, cette circonstance seule ne rue semble pas suffire pour expliquer la différence d'action des deux céments.

Cependant M. Margueritte n'admet pas la formation des cyanures dans les caisses de cémentation (*) Il s'appuie sur (*) M. Margueritte admet que, dans les caisses de cémentation, les

cendres alcalines, ainsi que le baryte et la chaux, ne forment pas de cyanures et n'agissent sur le fer qu'en lui enlevant le soufre qu'il peut contenir (p. 85 de son mémoire). S'il en était ainsi, ces matières alcalines resteraient sans action dans la cémentation des fers purs, et dans ce cas le vieux cément ne devrait rien perdre de son efficacité.