Annales des Mines (1867, série 6, volume 12) [Image 118]

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DE L'ACIER ET DE SA FABRICATION.

charbon. Il semble donc plus naturel de supposer, et cela me paraît découler des faits que je vais rappeler, que les modifications si variées que subit le fer doux sont dues à l'intervention du carbone et de diverses autres substances étrangères. Il faut en excepter, bien entendu, les simples changements de densité, de texture et de ténacité que tous les métaux éprouvent, lorsqu'on favorise ou détruit leur état cristallin par la chaleur et les actions mécaniques. Les modifications que la plupart des métaux subissent, sous l'influence de minimes proportions de substances étrangères, sont depuis longtemps connues, et l'on ne voit pas pourquoi il en serait autrement pour le fer. C'est une propriété générale des métaux que nous ne pouvons expliquer, mais qu'il faut bien admettre comme un fait. On sait que le cuivre est profondément modifié par des traces d'oxygène, de soufre ou de plomb ; que quelques millièmes de

fer altèrent la malléabilité du zinc et de l'étain. Et M. Fre-

my rappelle, à ce sujet, que o",000i de bismuth ou de plomb rend l'or cassant comme l'antimoine (1. On sait aussi que le chrome, le nickel, le tungstène, le titane, etc., durcissent le fer aussi bien que le carbone. Bref, l'influence considérable de ces minimes proportions de substances étrangères ne saurait être niée. Or les substances que l'on trouve unies au fer, dans les fontes, sont beaucoup plus nombreuses qu'on ne le croit généralement. M. Fremy mentionne le carbone, le silicium, le phosphore, l'arsenic, le soufre, le potassium, le sodium, le calcium, le magnésium, l'aluminium, le manganèse, le nickel, le chrome, le titane, le vanadium, le cuivre, l'azote, etc. (**) , et les analyses que je vais citer donnent encore quelques autres éléments, tels que le cobalt, le molybdène, etc. On peut dire, d'une manière générale, que les fontes, comme tous les métaux (*) Comptes rendus, t. LII, p. looit. (**) Comptes rendus, t. LII, p. zoo z.

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bruts, renferment une fraction de presque tous les éléments dont se compose le lit de fusion qui les a produits. M. Fremy a cru devoir attribuer, dans ces derniers temps, une très-grande importance à la présence de l'azote. Pour ce savant, l'acier et les fontes les plus pures sont des composés, non de carbone et de fer seulement, mais des azotocarbures, et ce serait ce radical complexe qui communiquerait à l'acier ses propriétés spéciales. Plus tard M. Fremy dut néanmoins reconnaître que les fers doux aussi renferment de l'azote. Par suite, le radical azoto-carburé, s'il existe, ne saurait être un caractère distinctif des aciers. La série continue, fonteacier fer doux, n'en subsisterait pas moins. Mais l'azote ne semble pas jouer, dans ces composés, le rôle que leur attribue M. Frémy. La proportion d'azote est beaucoup plus faible que celle que l'on avait cru y trouver d'abord. M. Boussingault, auquel on doit, à ce point de vue, les analres les plus exactes, a trouvé, dans une première série d'essais, 0,00057 d'azote dans l'acier fondu, et o,o012/1 dans le fer doux ("), plus tard 0,00007 seulement dans l'acier fondu, et la même proportion dans les fers doux, enfin 0,00022 dans l'acier Krupp (**).

Il suit de là qu'il n'existe aucune relation fixe entre les proportions d'azote et de carbone; par suite, ils ne sauraient être unis sous forme d'un radical spécial. On voit même que, dans les aciers proprement dits, la teneur en azote n'atteint pas le dixième de celle du carbone, tandis que ce rapport est toujours plus fort dans les fers doux. La présence de l'azote semble donc plutôt, en quelque sorte, accidentelle. Elle parait tenir à la propriété si géné(*) Comptes rendus, t. L11, p. i 9.51. (**) Comptes rendus, t. L111, p. 9.