Annales des Mines (1847, série 4, volume 11) [Image 340]

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NOTICE NÉCROLOGIQUE

dont suivant toute apparence il ne devait jamais revenir. Il arrive à Paris, ose assister, sous un nom allemand, à une assemblée scientifique où il est reconnu pour Français et n'échappe aux suites de cette imprudence que par miracle; de là il traverse toute la France, en partie à pied, touche à Toulouse, embrasse enfin son père et sa famille, puis le coeur content il regagne la frontière et va retrouver à Freiberg ses études, consolation de l'exil.

De semblables traits n'étaient sans doute point rares alors, où le courage français se montrait sous tant de formes; mais quelle que soit la mesure qu'on veuille lui donner, il est certain que par son motif

et son exécution il ne pouvait appartenir qu'à un coeur ferme et à un excellent coeur. Revenu définitivement en France à la suite de l'amnistie consulaire, nous trouvons M. d'Aubuisson s'occupant de publications géologiques et l'esprit plus libre alors, se mêlant activement au grand débat de cette époque, celui des neptuniens

et des vulcanistes. La bannière de M. d'Aubuis-

son ne pouvait être douteuse, c'était celle de Werner; on va voir cependant qu'animé d'un esprit vraiment philosophique il ne suivait point en aveugle la trace d'un système tout arrêté et qu'il

savait chercher et reconnaître la vérité, même lorsqu'elle lui coûtait l'aveu public d'une erreur. Parcourant la Saxe en observateur, il avait cru

trouver dans la position et la nature des ba-

saltes de cette contrée des faits propres à éten-

SUR M. D'AUBUISSON.

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avec un soin et une méthode remarquables, et qui produisit beaucoup d'effet à l'Institut, où il fut lu au commencement de 18°3 : les neptuniens y étaient alors, je crois, en majorité.

C'était en effet un gant jeté dans l'arène M. d'Aubuisson croyait pouvoir établir que les nappes basaltiques, qui couronnent quelques sommités de l'Erzgebirge (1), n'étaient autres que des

fragments d'une grande assise continue, dépôt moderne des eaux, qui aurait recouvert toute la contrée; conclusion qu'il semblait même donner comme universelle pour ce genre de roche. Telle était du reste l'opinion générale de Werner suries basaltes ; cette idée, toute paradoxale qu'elle nous paraisse aujourd'hui, avait alors pour appuis d'autres autorités non moins élevées dans la science ainsi, le travail dont nous parlons n'était pour ainsi dire que le développement de cette phrase de Dolomieu : «Les basaltes de la Saxe (trapps noirs prisma-

tiques) peuvent être des produits de la voie hu» mide. » M. d'Aubuisson l'avait prise pour épigraphe de son mémoire et une allusion touchante, jetée dans le courant de cet écrit, à la perte alors récente et si malheureuse de l'illustre géologue français, ne laissa pas d.e contribuer à l'épandre de l'intérêt sur son travail et acheva d'assurer à l'auteur la bienveillance de l'Institut. Une honorable preuve lui en fut donnée immédiatement. Il avouait dans son mémoire qu'il n'avait pu obser-

dre les principes de cette école de Freiberg,

à laquelle il avait voué toute l'ardeur de ses premières convictions. Il fit de cette étude l'objet d'un mémoire intéressant, écrit avec élégance,

(1) Petite chaîne qui sépare la Saxe de la Bohême et dont le nom signifie montagnes niétallifères. M. de Bonnard en a fait connaître en 1816 la constitution géologique

où les observations étaient présentées et discutées

l'Erzgebirge.

dans son important mémoire, Essai géo gnostique sur