Annales des Mines (1847, série 4, volume 11) [Image 279]

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EXPLOSION D'UNE CHAUDIÈRE A VAPEUR,

sont en mauvaise tôle, découpées par un grand nombre de trous, et la feuille de tôle elle-même qui formait le dessous de la chaudière était aussi très-affaiblie en cet endroit, par le trop grand rapprochement des tubulures entre elles, du bord et d'une encoignure. Les déchirures, une fois commencées dans cette feuille par l'arrachement violent des tubulures de jonction, ont gagné, d'un côté la clouure circulaire transversale, de l'autre la clouure rectiligne longitudinale, qu'elles ont suivies; et l'effort s'exerçant ensuite de manière à développer la virole, ces déchirures ont suivi sans peine la ligne des trous. L'explosion commençant ainsi vers le fond de la chaudière par l'arrachement de l'une des tubulures, l'on s'explique que celle-ci soit restée en place, que les bouilleurs aient été peu ou point dérangés puisqu'ils ont dû seulement être appuyés sur le fourneau par la réaction de la vapeur. On s'explique, par le même effet de réaction, la projection, accompagnée de soulèvement, soit du corps de la chaudière, soit de la culasse antérieure, enfin la projection presque verticale de la feuille de tôle déroulée. Cette direction verticale est indiquée en effet , et par la faible distance àlaquelle cette pièce a été retrouvée et par le renversement égal et complet de haut en bas des deux oreilles par lesquelles cette partie de la chaudière reposait sur le fourneau. Les quatre autres oreilles, au dontraire , n'ont pas été sensiblement déformées.

Quelles ont été les causes premières de la séparation par arrachement de la chaudière et des tubulures antérieures? Les fers de cornières qui réunissaient celles-ci aux bouilleurs et à la chaudière même n'ont pas l'épaisseur qu'exigerait une bonne

557 construction ; la tôle est en outre de très-mauvaise RUE SAINT-DENIS, A LA VILLETTE.

qualité. Sa cassure présente un grain cristallisé très-grossier, elle est fragile presque comme de la

fonte, le soudage est d'ailleurs incomplet et l'on distingue toutes les mises. Ce défaut, évident partout, se manifeste surtout dans certains débris de la culasse postérieure, déchirés et roulés par les chocs et qui se sont partagés dans leur épaisseur comme une carte que l'on dédouble. Tous ces défauts ont pu préparer la rupture et l'ont facilitée, et pour arriver à une explosion, il a suffi d'une cause déterminante qui, avec une chau-

dière en bon état, n'aurait certainement pas produit de pareils effets. Je n'ai pas trouvé de motifs suffisants de croire à un défaut d'alimentation. D'abord la chaudière n'était pas vide, puisqu'on a remarqué de tous côtés des éclaboussures de cendres délayées ; et, de plus, le niveau de l'eau ne paraît pas avoir pu s'abaisser beaucoup ou du moins les parois se seraient fai-

blement suréchauflées, car l'enduit très-léger de tartre a partout une blancheur uniforme, tandis qu'il devient légèrement jaune quand on l'échauffe.

D'un autre côté rien ne prouve que ces parois n'ont pas été suréchauffées au-dessus du niveau habituel de l'eau. Le fourneau détruit a été établi par le même fumiste que le fourneau neuf situé dans l'atelier que monte en ce moment le sieur Gibert ; or, on peut vérifier que les carneaux s'élèvent au-dessus du plan d'eau, et probablement les deux constructions étaient semblables; je joins à ce rapport une coupe du fourneau neuf (PI. Ar, fig. 15) qui montre cette disposition vicieuse. La vapeur a pu prendre aussi dans la chaudière un excès de tension ; l'explosion a eu lieu après une