Annales des Mines (1841, série 3, volume 19) [Image 138]

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THÉORIES DE LA CÉMENTATION

portantes et variées, qui peuvent être considérées comme le trait dominant des arts métallurgiques. L'anomalie que je signale, et que je me propose d'expliquer dans la première partie de ce mémoire, consiste essentiellement dans les faits suivants. La condition fondamentale de toute réaction chimique, est qu'il y ait contact intime entre les deux agents mis en présence ; mais en y réfléchissant attentivement, on reconnaît bientôt que ce contact intime ne peut exister, et que, par conséquent, la réaction ne peut avoir lieu que lorsqu'un des deux agents au moins est préalablement

amené à l'état liquide ou gazeux. Entre deux solides, quelque ténus et mélangés qu'on les suppose , le nombre des points de contact est

toujours un infiniment petit du deuxième ordre, par rapport au nombre total des molécules mises en présence : une réaction complète entre de pareils éléments semble donc chose impossible. Il en est tout autrement quand l'un des deux agents est fluide : d'un côté, le rapport entre le nombre des molécules en contact et le nombre total des molécules n'est plus qu'un infiniment petit du premier ordre ; de l'autre, lorsque la réaction s'est produite, en vertu de ce contact, à la surface de chaque fragment solide, elle se propage rapidement dans l'intérieur du fragment par suite de la faculté d'infiltration propre .aux agents fluides. Cette conclusion, qu'on peut tirer à priori de la constitution moléculaire des corps, se trouve plus solidement établie encore par l'observation de tous

les faits chimiques; et, s'il existe quelques cas rares dans lesquels des solides paraissent réagir complétement les uns sur les autres, on trouve bientôt, en analysant attentivement les phéuomè-

269 nes , que cette prétendue réaction des solides n'est ET DES FOURNEAUX A TUYÈRES.

qu'apparente et que, par une cause particulière, l'un des réactifs au moins Se trouve préalablement amené à l'état fluide. Cette importante question de philosophie chimique est appréciée depuis longtemps : elle a été soigneusement discutée par les chimistes des derniers siècles qui admettaient déjà la nécessité d'une dissolution préalable des réactifs au nombre des principes fondamentaux de la science (i). Le carbone seul, mis en présence de beaucoup de corps oxydés, semblait faire exception à la loi que je viens de rappeler. C'est ainsi , par exemple, qu'un fragment d'oxyde de fer, chauffé à une température rouge, au milieu d'une masse de carbone qui l'entoure de toutes parts , perd peu à peu son oxygène et se transforme en fer métallique, sans que le carbone, l'oxyde primitif , les oxydes intermédiaires quise forment temporairement, et enfin le fer métallique produit définitif de l'opération cessent un instant d'être à l'état solide. Le carbone exerce la même' action réductive sur un grand nombre d'autres corps oxydés, oxydes métalliques, phosphates, arséniates , sulfates, etc. Ce qu'il importe de remarquer, c'est que sous cette influence, les corps oxydés, quelles qu'en soient les dimen-

sions, sont réduits d'une manière complète; en

(1) On trouve dans les éléments de chimie de Hermann. à la suite d'une longue discussion sur le mode d'action des Bnerhave' réactifs, la conclusion suivante qui résume le principe que je viens de rappeler : Cuncta docent igitur, » ornma ferè menstrua, souda fuerin4 vel fluida, eo tamen tempore quo agunt , reducta prius esse in naturam dorum. Elementa chemi , tome 1", page 372. Paris, 1733.