Annales des Mines (1896, série 9, volume 5, partie administrative) [Image 335]

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en vente et adjugée au Sous-Comptoir des Entrepreneurs, auquel elle avait été hypothéquée et qui l'exploite aujourd'hui; que les secours et pensions dus par la caisse de prévoyance ont cessé d'être servis à partir de ce moment, le bénéfice de la nouvelle caisse de secours créée par le Sous-Comptoir en exécution, de la loi du 29 juin 1894, ayant été réservé aux seuls ouvriers encore occupés dans la mine; que l'actif, peu important d'ailleurs, de l'ancienne caisse, a été distribué aux titulaires de pensions de retraite et aux malades ; Attendu que les demandeurs, lesquels sont, les uns des ouvriers pensionnés ou en droit de prétendre à une pension, les autres des veuves retraitées d'ouvriers, soutiennent que, malgré sa dissolution et la cessation de son exploitation, l'ancienne société et chacun de ses actionnaires demeurent tenus de pourvoir au fonctionnement de la caisse; qu'ils ont, en conséquence, introduit tant contre B... ès nom, que contre D..., l'un des actionnaires, une instance tendant à ce que le liquidateur soit tenu d'opérer et D... de subir, au prorata du nombre de ses actions, es appels de fonds nécessaires à ce fonctionnement et à ce qu'ils soient condamnés à verser une provision de 20.000 francs à un liquidateur spécial qui serait nommé par le tribunal, à l'effet d'assurer, au mieux des intérêts des ayants droit, la liquidation de la caisse ; Attendu que le liquidateur soutient que les demandeurs tenant leurs droits de l'association de prévoyance constituée entre les ouvriers, et non de l'ancienne Société des mines de Bert, seraient sans qualité pour agir à l'encontre de cette dernière ; Mais attendu que, s'il est vrai que l'action directe individuelle leur fasse défaut, lesdits demandeurs sont recevables à exercer, çn vertu de l'article 1160 du code civil, les actions pouvant appartenir à la caisse, dont ils justifient-être créanciers; que vainement le liquidateur prétend que leurs créances ne constitueraient que des titres précaires, l'article 14 des statuts disposant, ainsi qu'on l'a vu plus haut, que les rétributions de secours ne s'effectueraient qu'autant que les fonds de la caisse suffiraient; que la subordination de l'exercice du droit à pension à l'état delà caisse ne fait pas disparaître ce droit ; que l'argument est donc sans portée, en ce qui touche tout au moins la recevabilité de l'action; que la fin de non-recevoir proposée par B... ès nom doit, en conséquence, être écartée. Au fond: attendu que la Société des mines de Bert n'a pris d'autre engagement que celui de verser à la caisse de secours

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line subvention égale au chiffre de la retenue pratiquée sur les salaires des ouvriers; qu'elle a satisfait à cet engagement en acquittant la quote-part promise aussi longtemps qu'elle a continué l'exploitation; qu'elle ne saurait être tenue de payer indéfiniment une subvention dont la contre-partie a cessé d'être fournie par les ouvriers de la mine, lesquels ont constitué, sous les auspices et avec le concours de l'exploitant actuel, une nouvelle société de secours ; que les demandeurs le reconnaissent euxmêmes; qu'ils se bornent à demander que la compagnie et ses actionnaires pourvoient au service des pensions acquises et dont le nouvel exploitant n'a pas assumé la charge ; Mais attendu que la compagnie n'a jamais garanti ce service; que la caisse de secours constituée à l'état d'association distincte, avec des ressources propres à une administration autonome, devait seule l'assurer dans la limite de ses facultés, conformément à l'article 14 des statuts ; que vainement les demandeurs excipent de l'article lo des mêmes statuts, par lequel la société avait stipulé que, par suite de la part prise par elle à l'augmentation du capital de la caisse de secours, elle ne pourrait être-recherchée pour les accidents et pensions à faire, d'où ils concluent que l'engagement pris par elle correspondait à une obligation légale dont elle se serait ainsi déchargée, par une sorte de forfait ; qu'à supposer que la compagnie n'ait pas entendu seulement remplir un devoir- de charité et de conscience envers des ouvriers âgés, malades ou blessés, mais s'exonérer par un forfait plus ou moins licite des conséquences de ses fautes, celte circonstance n'a pu modifier la nature de son engagement, qui a consisté uniquement à fournir les subventions corrélatives aux versements opérés par les ouvriers, ce qu'elle a fait jusqu'au moment où son exploitation a pris fin; Que les demandeurs ne sont pas mieux fondés à prétendre qu'en négligeant d'imposer à l'adjudicataire de la mine le service des pensions acquises le liquidateur aurait commis une faute qui suffirait, en tous cas, pour engager même au-delà de son obligation primitive la responsabilité de la société ; que la mine était hypothéquée pour une somme bien supérieure à sa valeur et que les créanciers inscrits n'eussent pas manqué de s'opposer à une aggravation des charges qui aurait, en fait, rendu l'adjudication impossible, puisque le capital des pensions en cours est Jbien supérieur au prix qu'elle a produit; qu'encore moins les demandeurs peuvent exciper contre la Société des mines de Bert et contre ses anciens actionnaires des dispositions de la loi du 29 juin 1894