Annales des Mines (1888, série 8, volume 7, partie administrative) [Image 91]

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JURISPRUDENCE.

pour les perfectionnements quelconques qui pourraient se produire dans l'avenir ; c'est même, comme il vient d'être dit, en vue de ces perfectionnements d'espèce que les parties prenaient pour base le prix des ventes de la Compagnie, et non celui des marchés locaux. Vainement, on soutient que de la sorte la redevance sera calculée non seulement sur le prix de vente, mais encore sur le prix de transport; l'objection manque en fait puisque la marchandise, bien qu'amenée sur un point où son chargement et son expédition sont plus faciles, n'en est pas moins vendue et livrée sur le territoire de son extraction. Dans le système contraire, le redevancier serait en quelque sorte associé pour les frais à toutes les opérations dépendant de la main-d'œuvre, de l'outillage et même de la direction des travaux ou des marchés; il serait même, jusqu'à un certain point, copropriétaire des agencements et des immeubles par destination dont il aurait contribué à amortir le prix d'achat, ce qui serait certainement contraire à l'esprit du traité. § »•

En ce qui concerne les paiements : Les experts, établissant leurs comptes sur le journal et le livre de caisse, ont reconnu que, du 31 juillet 1858 au jour de l'adjudication, la Compagnie a payé aux [redevanciers la somme de 206.425f,19, mais que, en dehors des livres précités, les quittances fournies par la famille de Lafressange ne justifient que d'un règlement de 195.868f,04, soit une différence 10.557f,io; Argaud demande le rejet de cette dernière somme par le motif que la Compagnie n'a pas pu se créer à elle-même un titre de libération. Mais si, dans un long espace de temps, quelques quittances ont été égarées, il est certain que presque toutes ont été représentées aux experts, et que ces quittances, en grand nombre émanées de Lafressange et reconnues conformes aux livres delà Compagnie, forment un commencement de preuve qui rend vraisemblable la régularité du paiement des redevances; ce commencement de preuve est complété par les présomptions tirées de la régularité des écritures qui sont tenues par une compagnie placée sous le contrôle de l'administration; dans ces conditions les experts ont, à bon droit, basé leurs calculs sur la comptabilité par eux vérifiée.

JURISPRUDENCE.

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§ 8.

En ce qui concerne les intêrêls : Tout en prononçant qu'il ne serait fait état des intérêts que depuis la demande en justice, l'arrêt du 6 juillet 1878 a réservé à Argaud le droit de réclamer un dédommagement sous forme d'intérêts compensatoires, s'il établissait à la charge de la Compagnie des retenues illégales, des fautes et des actes contraires à la bonne foi. Dans ses conclusions, Argaud attribue le caractère de quasidélit : 1° à l'erreur de classement des charbons livrés aux ouvriers; 2° à la déduction de houillage; 3" à la retenue du tiers pour remblais; 4" à la déduction des frais de manipulation et autres et à l'inexactitude des prix portés sur les feuilles de redevances. En premier lieu, il est impossible d'attacher une sérieuse importance à l'erreur, d'ailleurs rectifiée par les experts, qui a fait classer comme charbon menu première, le charbon menu deuxième délivré aux ouvriers à titre de chauffage et qui, calcul fait, ne produit qu'une différence de 740 francs répartie en vingt années. En second lieu, on ne peut voir une pratique de mauvaise foi dans la déduction du houillage ; à la vérité, si la Compagnie est autorisée à faire subir ce retranchement à ses ouvriers pour les punir de monter au jour des bennes insuffisamment remplies, elle était sans droit à l'imposer au redcvancier ; mais, dans l'espèce, cette pratique a eu des résultats insignifiants, puisque le chiffre de bennes extraites n'a été qu'un élément accessoire pour les experts qui ont basé leurs calculs sur les quantités vendues ou consommées. En troisième lieu, la retenue du tiers même pour les couches non encore remblayées, loin d'être répréhensible est considérée par le présent jugement comme légitime, sous la réserve d'une restitution éventuelle; les contestations sur la méthode des remblais soulèvent des questions graves qui ont été évidemment soutenues de bonne foi. En quatrième lieu, si la Compagnie a prétendu à tort faire supporter au redevancier une part des frais de criblage et de transport, à la gare de la Malafolie, cette prétention, basée sur une interprétation inexacte mais plausible du traité de 1835, no peut en aucune façon constituer la faute dommageable qui, d'après l'article 1382 du Code civil, ouvre une action en indemnité.