Annales des Mines (1882, série 8, volume 1, partie administrative) [Image 80]

Cette page est protégée. Merci de vous identifier avant de transcrire ou de vous créer préalablement un identifiant.

COMMISSION DU GRISOU. i58 Cette solibilité est très faible, et il n'y a pas lieu de s'arrêter à certains faits qui ont été signalés et pour l'explication desquels on a attribué au grisou une solubilité plus grande. Ces faits peuvent tous recevoir plusieurs interprétations autres que cette hypothèse gratuite et ne sauraient être mis en balance avec des expériences précises. 11 ne nous paraît donc pas nécessaire d'ajouter de nouvelles déterminations à celles qui sont déjà connues.

Température d'inflammation. — On ne connaissait, avant les expériences dues à la commission, ni la température d'inflammation, ni la température de combustion des mélanges explosifs formés par ce gaz. Les travaux expérimentaux entrepris par les délégués de la commission pour déterminer la température d'inflammation ont amené la découverte de certains faits qui nous paraissent avoir une réelle importance pratique. Les mélanges explosifs formés par la plupart des gaz combustibles ont une température d'inflammation assez précise. Pour des températures notablement inférieures à celle-là, il se fait bien déjà, il est vrai, une combinaison d'oxygène et de gaz combustible; mais le volume des gaz formés dans l'unité de temps, c'est-à-dire la vitesse de la combinaison, est très faible. Cette vitesse va graduellement en croissant avec la température, mais reste toujours assez petite jusqu'à une certaine température pour laquelle elle prend, dans un temps très court, une valeur considérable. C'est ce qu'on peut appeler la température d'inflammation. Les expériences de la sous-commission l'ont fixée à 552° pour l'oxygène, à 65o° pour l'oxyde de carbone, et il a été constaté qu'elle variait assez peu pour un même gaz, lorsqu'on faisait varier beaucoup les proportions relatives du gaz comburant et du gaz combustible dans le mélange explosif. Par une exception singulière et très remarquable, les choses ne se passent pas du tout de la même façon pour le grisou. Les mélanges de grisou et d'air s'enflamment vers 7Z100. Mais l'inflammation ne se produit pas, comme pour les autres gaz, dès que la masse gazeuse ou seulement un point de cette masse est porté à cette température. Il est nécessaire, pour que le mélange détone, que le gaz en subisse l'action pendant plusieurs secondes. Le retard de l'explosion devient de plus en plus faible à mesure que la température s'accroît, jusqu'à devenir nulle à une température que les

COMMISSION DU GRISOU.

l5g

appareils employés pour ces expériences n'ont pas permis d'atteindre, mais qui, d'après les expériences bien connues et faciles à répéter, de Davy, est supérieure à celle du rouge blanc. On peut mettre en évidence cette curieuse propriété du grisou par une expérience très frappante et très instructive. On projette sur un creuset de fer chauffé au rouge et renversé, un jet de grisou animé d'une faible vitesse. Lorsque le jet est dirigé sur la partie externe du creuset, le mélange explosif ne reste qu'un temps très court en contact avec la paroi, et ce temps est insuffisant pour permettre au gaz de prendre feu ; l'inflammation ne se produit pas, quelque prolongée que soit l'expérience. Lorsque au contraire ce jet est dirigé dans l'intérieur du creuset renversé, le mélange gazeux est forcé de rester plus longtemps en contact avec la paroi, et l'inflammation se produit, au bout d'un temps plus ou moins long, suivant que le creuset est plus ou moins chaud. Le temps nécessaire pour l'inflammation peut dépasser dix secondes. En définitive, dans la pratique, les choses se passent le plus souvent comme si la température d'inflammation du grisou était supérieure à celle du rouge blanc. Lorsque le treillis d'une lampe de sûreté rougit sous l'influence de la combustion du grisou dans l'intérieur de la lampe, le grisou ne s'enflamme pas au contact de la toile métallique parce que le mélange explosif se renouvelant sans cesse autour des fils métalliques, ne subit pas assez longtemps, pour prendre feu, l'influence de la température, Mais on conçoit en même temps qu'il puisse y avoir des cas où le contact du gaz avec un corps porté au rouge étant plus prolongé, l'inflammation vienne à se produire. C'est donc là un fait nouveau et qui peut jouer un rôle important dans l'explication de certains accidents et par conséquent aussi dans les mesures préventives à prendre pour les éviter. Limites d'inflammabilité du mélange d'air et de grisou. — Les limites d'inflammabilité du mélange d'air et de grisou ont été déterminées par la sous-commission chargée de ces expériences. La limite minima correspond à un mélange tenant environ 5,8 p. ioo de grisou; la limite maxima, à un mélange tenant 16 à 17 p. 100 de gaz. Ces nombres ne sont pas susceptibles d'une grande précision, car l'inflammabilité peut varier dans certaines limites avec la température et même avec l'étendue superficielle du corps qui détermine l'inflammation.