Annales des Mines (1882, série 8, volume 1, partie administrative) [Image 18]

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En statuant ainsi, l'arrêt attaqué a faussement interprété le texte et l'esprit de la loi précitée; en effet, à la différence de la loi du 22 mars 18/11, qui ne comprenait pas les mines dans l'énumération des établissements auxquels elle était applicable, la loi du 19 mai 187/1 dispose, dans son article 1", que les enfants ne pourront être employés à un travail industriel, non seulement dans les manufactures, fabriques, usines et ateliers, mais encore dans les mines, que sous les conditions déterminées dans ladite loi. Dès lors les principes posés dans cette loi doivent être appliqués d'une manière générale au travail industriel des enfants, que ce travail ait lieu dans les galeries souterraines des mines, ou dans les manufactures et autres établissements énumérés dans l'article 1". L'article k porte que les enfants ne pourront être employés à aucun travail de nuit, jusqu'à l'âge de seize ans révolus ; c'est là une règle générale qui s'étend à tous les genres de travaux prévus par la loi, à moins d'une disposition contraire; Si l'article 6 contient une dérogation à cette règle et permet, dans les usines à feu continu, d'employer des enfants pendant la nuit, ce n'est là qu'une exception imposée par les conditions spéciales dans lesquelles fonctionnent ces usines, et limitée d'ailleurs aux travaux indispensables. En dehors de ce seul cas, expressément prévu par la loi, le principe général posé dans l'article Zi doit recevoir son application. Il est vrai qu'une exception de même nature avait été insérée dans l'article 7 du projet primitif soumis à l'Assemblée nationale, lequel réglementait l'emploi des enfants dans les travaux souterrains des mines, minières et carrières, mais le paragraphe de cet article, qui assimilait ces établissements aux usines à feu continu, n'a pas été reproduit dans le texte définitif de la loi. Quels qu'aient été les motifs qui ont amené la suppression de cette disposition, il n'est plus possible, en présence de la rédaction actuelle de l'article 7, de prétendre que l'exception primitivement proposée doit recevoir encore son application. Il faut reconnaître, au contraire, que la règle générale formulée dans l'article k doit reprendre son empire, et qu'elle s'étend à tous les enfants employés dans les divers établissements énumérés dans l'article 1". C'est par ce motif que le décret du 12 mai 1875 (*) qui a fixé la durée et la nature du travail des enfants dans les |mines, ne s'est (*) Volume de 1875, p. 120.

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pas occupé du travail de nuit; ce genre de travail étant prohibé d'une façon absolue parla loi elle-même, le règlement d'administration publique intervenu en vertu de cette loi ne pouvait contenir sur ce point aucune disposition. D'où il suit qu'en prononçant le relaxe du prévenu, par le motif qu'il n'aurait commis aucune infraction aux prescriptions de la loi du 19 mai 187/1, l'arrêt attaqué a faussement interprété ladite loi et en a violé les dispositions. Par ces motifs, Casse et annule l'arrêt rendu par la cour d'appel de Douai, le ih juin 1881 (*); Et pour être statué sur l'appel formé par Bureau du jugement contre lui rendu par le tribunal correctionnel de Saint-Omer (**) ; Renvoie la cause et le prévenu devant la cour d'appel d'Amiens, cliambre des appels correctionnels.

(*) Volume de 1881, p. 295. {**) Ibidem, p, 294.