Annales des Mines (1881, série 7, volume 10, partie administrative) [Image 208]

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JURISPRUDENCE.

JURISPRUDENCE.

Arrêt rendu, le 5 janvier i855, par la cour de cassation (chambre civile), au sujet de la compétence des tribunaux ordinaires pour le règlement de (indemnité due à un redevancier tré foncier privé de ses redevances par suite de l'inveslison créé pour la sécurité de la voie ferrée (affaire de COMPAGNIE DU CHEMIN DE FER DE LYON A SAINT-ÉTIENNE contre CONSORTS FLEURDELIX). (EXTRAIT. )

L'arrêté légalement pris par le préfet du Rhône, le i5 novembre 1829, avait interdit toute exploitation de houille à une distance déterminée de l'axe du chemin de fer de Lyon à Saint-Étienne. Il a été jugé en fait, par l'arrêt attaqué, que la terre dite des Pièces, appartenant aux consorts Fleurdelix, se trouvait dans la circonscription du sol frappée d'interdiction, et perdait ainsi tous les avantages que pouvait procurer l'exploitation de la mine de houille, soit aux concessionnaires de cette mine, soit aux redevanciers propriétaires de la superficie. Il a été en même temps reconnu en fait et il n'est pas contesté que ledit arrêté, qui privait les concessionnaires de la mine et, par suite, les redevanciers d'une partie des produits de la mine, a été pris dans l'intérêt du chemin de fer. Il suit de là que, dans les principes du droit commun, la compagnie du chemin de fer devait une indemnité pour le dédommagement du préjudice dont elle était la cause. Il importe peu que, dans la terre dites des Pièces, le chemin de fer eût son parcours non souterrainement, mais à ciel ouvert. En effet, s'il est vrai que les concessionnaires d'une mine soient tenus d'en consolider le plafond et de ne rien faire qui puisse détruire la jouissance du propriétaire de la surface, il ne faut pas confondre avec cette obligation l'interdiction absolue d'exploiter lamine sous un chemin ou un édifice, ou à une distance déterminée de l'un ou de l'autre. La contestation s'élevant, dans l'un et l'autre cas, entre les propriétaires de la surface, redevanciers de la mine, et l'individu ou l'entreprise dans l'intérêt desquels l'interdiction d'exploiter a

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été prononcée, est une contestation purement civile, de la compétence des tribunaux ordinaires; elle ne provoque que l'application des principes du droit commun. Elle n'est point en opposition avec les actes administratifs qui sont intervenus, et, au contraire, ces actes étant respectés et maintenus, elle a seulement pour objet d'en régler les conséquences et l'application aux intérêts privés. D'où il suit qu'en statuant comme il l'a fait sur la contestation élevée entre les sieurs Fleurdelix, propriétaires de la terre dite des Pièces, et la compagnie du chemin de fer de Lyon à Saint-Étienne, à l'occasion de l'indemnité réclamée par les premiers pour privation de jouissance résultant à leur préjudice de l'arrêté du préfet du Rhône qui interdisait l'exploitation des houilles sous leur propriété, l'arrêt attaqué n'a violé ni les règles de la compétence ni aucune loi. Les droits qui résultent pour le propriétaire du tréfonds de stipulations librement faites avec le concessionnaire constituent en sa faveur des avantages également acquis. Si, par le fait et pour le profit d'un tiers, il vient à perdre ces avantages, l'indemnité à laquelle il a droit comprend justement dans ses éléments l'évaluation des profits dont il se trouve privé. Par une telle appréciation le principe que les conventions ne peuvent nuire ni préjudicier aux tiers ne se trouve pas violé. En effet, la convention n'est pas par le fait même et par sa force légale rendue applicable aux tiers ; elle devient seulement un élément de dommages-intérêts que le juge estime avec sa liberté d'appréciation. Ainsi, en décidant, dans les faits de la cause, que les experts appelés à donner leur avis sur l'indemnité due aux consorts Fleurdelix par la compagnie du chemin de fer de Saint-Étienne auraient à considérer que les époux Fleurdelix avaient droit à la moitié seulement de la redevance pour la terre du Bachat, et que le taux de la redevance était d'un dixième pour la terre de Julien, l'arrêt attaqué n'a violé aucune loi.

Jugement rendu, le 18 juillet 185g, par le tribunal civil de SaintÉtienne (purement et simplement confirmé, le 28 juillet 1860, par la cour d'appel de Lyon), au sujet de la compétence exclusive des tribunaux ordinaires pour le règlement de l'indemnité que peut motiver une interdiction administrative d'exploiter