Annales des Mines (1877, série 7, volume 6, partie administrative) [Image 199]

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ces six années, de 55.000 tonnes, et, dans les quatre années 1872 1870, 187Z1 et 1875, l'exportation est tombée à ia.000 tonnes. Pour les tôles, la moyenne des exportations était de 11.000 tonnes ; elle est tombée à a. 700 tonnes. Il me semble qu'il est impossible de vous mettre sous les yeux quelque chose de plus frappant. Ce relevé vous montre que, sous le régime de l'équivalent, qui a été maintenu jusqu'à ce jour, l'exportation des fontes a plutôt augmenté, et que, pour les fers et les tôles placés sous le régime de l'identique, il y a eu, au contraire, une diminution de près des quatre cinquièmes. Cela est d'autant plus fâcheux que les objets qui étaient fabriqués avec le fer et avec la tôle laissaient dans le pays une maind'œuvre des plus considérables. M. de Forcade la Roquette, dans une circulaire qu'il a publiée en 1867, faisait remarquer que, dans les années 1867 et 1868, le régime des admissions temporaires avait laissé en France une somme annuelle de plus de 100 millions, tant en bénéfices qu'en salaires, qui ne tenait pas du tout à la matière première. J'ai fait, de mon côté, un travail analogue que j'ai relevé dans le tableau des douanes pour l'année 1875. Si l'on suppose que le prix de la transformation de la fonte en rails et pièces ouvrées est de o',ao, on reconnaît que l'exportation des fontes pour cette année, — déduction faite de la matière première, que l'on peut estimer de 7 à 8 francs les 100 kilogrammes, — on reconnaît, dis-je, que l'exportation, pour ces fontes seulement, a donné iG millions en salaires et bénéfices. Quant aux objets faits avec la tôle et le fer, la fabrication en est beaucoup tombée : elle n'est plus que de 1Z1 millions pour les fers et de 5 millions pour les tôles, soit 19 millions en tout. Le résultat de la transformation des fers en machines peut être évalué comme donnant un surplus de 1 franc par kilogramme en sus de la matière première, ou de 100 francs par ioo kilogrammes. On arrive, de ce fait, à quelque chose comme 20 millions de travail et de bénéfices. Ainsi, le fer et la fonte réunis donneraient, pour 1875, un bénéfice de 55 à Uo millions, tandis que, dans les années i86â et i8G5, le bénéfice était évalué a 100 millions. Il est incontestable que, les ouvrages en tôle et en fer étant ceux qui comportent le plus de main-d'œuvre, de frais généraux et de bénéfices, dès qu'ils font défaut, la somme totale est singulièrement abaissée.

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On a dit que le bénéfice que les constructeurs retiraient des importations temporaires était très-peu considérable. C'est une erreur grave : les matières premières ne coûtent à l'étranger que 20 francs, au lieu de 26 à 26 francs chez nous. C'est donc une différence de 5 a 6 francs. Pour les ouvrages en métaux, ils coûtent en moyenne de 55 à 40 francs. Sur ces ouvrages, qui sont ceux dont on exporte le plus, il y a ainsi, entre les Anglais ou les Belges et nous, une différence de 5 à 6 centimes par kilogramme provenant du prix de la matière, c'est-à-dire de i3 à i5 p. 100. Par le temps de grande concurrence qui existe aujourd'hui, une différence de cette importance ne peut pas être négligée, et c'est grâce à elle que nous pouvons lutter avec nos rivaux. On ne peut donc pas dire qu'elle n'est pas indispensable à l'exercice de notre industrie et que c'est de l'argent que nous mettons dans notre poche. Je reviens sur un point que j'ai laissé de côté. Je veux dire quelques mots des fers que nous cédons à des constructeurs ou à des marchands de fer qui résident dans les départements limitrophes delà frontière de l'Est et du Nord. Il est évident que ces fers jettent une certaine perturbation dans la clientèle des forges de ces pays-là. Ces fers viennent évidemment approvisionner ceux qui s'adressaient à ces forges. Seulement il faut observer que, lorsque nous donnons aux forges du centre des commandes de fer nécessaires pour exécuter les ordres que nous recevons de l'étranger, les forges du centre ainsi approvisionnées ne réagissent pas sur les forges du Nord et ne viennent pas chercher à leur disputer leur clientèle. Par conséquent, si nous les encombrons d'un côté, de l'autre côté nous les débarrassons de la concurrence que leur font les forges du centre. Ceci est incontestable. Il est une autre considération qui est très-grave. Il y a douze ou quinze ans, quand les constructeurs étaient seuls en France à soutenir la nécessité des importations temporaires, ils avaient affaire a toutes les forges réunies contre eux. Mais des forges, qui sont dirigées par des hommes très-intelligents, n'ont pas tardé à reconnaître qu'elles pouvaient tout aussi bien que nous faire leur profit des marchés étrangers, et aujourd'hui les maîtres de ces forges, qui étaient autrefois nos adversaires les plus énergiques, sont devenus nos alliés. Les plus grandes forges de France, celles qui sont le mieux montées, et qui ont le plus à leur portée le minerai et le charbon,