Annales des Mines (1852, série 5, volume 1, partie administrative) [Image 104]

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LOIS, DÉCRETS ET ARRÊTÉS

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moral de la France, vers la fin du siècle, des renseignements très-curieux et trop peu consultés. Dans le cours du dernier siècle, aucune tentative ne paraît avoir été faite pour renouveler l'œuvre de Louis XIV ; et cependant , dans la seconde moitié de ce siècle, l'autorité. p}us forte, plus unitaire, plus centralisée, était ou pouvait 'être mieux obéie. L'empereur Napoléon, frappé des grands avantages qu'une administration intelligente peut tirer d'une bonne statistique, créa au ministère de l'intérieur une division toute entière chargée de diriger la formation par les préfets et la publication par leurs soins. d'une statistique complète pour chaque département. Les graves préoccupations d'une guerre soutenue contre toute l'Europe ne permirent pas de donner à cette création tout son développement. Le régime de publicité et de discussion, qui est la conséquence du gouvernement parlementaire, devait donner, sous la restauration, une vive impulsion aux recherpLves statistiques. Il devenait nécessaire, en effet, pour lis gouvernement, obligé de soumettre ses projets de loi à la sanction de deux assemblées législatives, de les motiver fortement par une étude consciencieuse des faits. L'exécution des lois de finances , de la loi sur le recrutement, de nos lois répressives, donna lieu, à .cette époque, à des publications statistiques annuelles qui se continuent aujourd'hui et sont une source de renseignements utiles pour le gouvernement, dont ils éclairent la marche; pour le savant, djont ils vérifient ou infirment les théories. L'élan imprimé aux études économiques, dont le succè^ repose sur l'emploi de la méthode d'observation et d'analyse, la sollicitude croissante accordée aux intérêts matériels du pays, favorisèrent au plus haut degré, sous le. gouvernement de juillet, les investigations statistiques. Cédant à yn mouvement prononcé de l'opinion , ce gouvernement créa un service administratif spécial, chargé, comme l'ancienne division de statistique sous l'empire, d'ouvrir une enquête permanente sur les diverses branches de la richesse publique en France. Çette enquête s'est poursuivie sans relâche depuis i854, etjes résultats en ont été consignés dans une série de publications qui comprennent la population, le territoire, l'administration, la production agrjpoje e,t la production industrielle.

SUR LES MINES.

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Avec quelque soin que les éléments de ces publications aient été recueillis ; quelque pénétrés qu'aient été les fonctionnaires chargés de les réunir, de la nécessité de les soumettre à une critique sévère; enfin, quelque consciencieux qu'ait été le contrôle dont ils ont été l'objet de la part du service chargé de les centraliser, ils n'ont pu échapper à des attaques vives et souvent passionnées. On a élevé des doutes sur leur exactitude ; quelques légères omissions dans les nomenclatures, quelques erreurs matérielles, inévitables dans des travaux de si longue haleine, ont été relevées avec une sorte d'amertume. Mais c'est surtout en cherchant à démontrer que, dans l'état actuel de l'organisation administrative de la statistique, il est très-difficile d'obtenir des documents dignes de foi, qu'on s'est efforcé de discréditer les chiffres officiels. On a soutenu, notamment, que le plus grand nombre des maires de nos 37,ooo communes, intermédiaires obligés et uniques de l'autorité supérieure, n'ont ni les loisirs, ni les connaissances spéciales, ni le degré d'instruction générale nécessaires pour recueillir avec un soin suffisant les renseignements qui leur sont demandés. On a fait valoir en outre, et ici peut- être avec quelque raison, les obstacles qu'apportent à la formation d'une bonne statistique, en France, les défiances instinctives des populations toujours prêtes à soupçonner une arrière -pensée fiscale dans toutes les enquêtes du gouvernement. Toutefois, ceux-là mêmes qui ont critiqué avec le plus de vivacité le résultat de ces enquêtes, sont tombés d'accord sur ces deux points : r» qu'une statistique exacte des faits relatifs à la situation économique et morale de la France est indispensable ; 2° qu'elle ne peut être faite avec succès que par les soins du gouvernement, qui seul dispose des ressources et des moyens d'informations nécessaires. J'ajouterai que, depuis le décret de décentralisation, qui a enlevé à l'autorité supérieure toute action directe dans la gestion des intérêts locaux, il lui importe plus que jamais d'avoir la connaissance exacte de tous les faits se rattachant à cette gestion. Mais, tout en admettant la haute intervention du gouvernement dans la formation de la statistique delà France, les auteurs des attaques dirigées contre les publications officielles ont pensé que le mode actuel de cette intervention devait être profondément modifié. Des projets assez nombreux se sont produits à ce sujet. Tous, à des exceptions de détails près, se résument dans la pensée d'asso-