Annales des Mines (1907, série 10, volume 12) [Image 176]

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mêmes ; puis les ouvriers des quartiers plus éloignés du n° 2 et ceux du n° 10, que le chef porion, puis l'ingénieur de la fosse, M. Pegheaire, envoyèrent chercher à leur travail. 11 devint rapidement évident que l'explosion s'était fait sentir dans les trois communications avec le n° 3, Joséphine 340, Sainte-Barbe par le bure Bourlard et Julie 306, et dans ces trois quartiers seulement. Quatre ouvriers qui se trouvaient près de l'accrochage 340 du n°3, au pied du bure d'accrochage 306-340, purent s'enfuir. Ils avaient été renversés par un nuage de poussières aveuglantes et bridantes, mais ils réussirent à se relever et à gagner la bowette Sud. Quelques instants après, ils tentèrent de revenir chercher deux de leurs camarades restés en arrière, mais ils ne purent arriver jusqu'au beurtia, et l'accrochage fut barré. L'accès de Joséphine 340 était donc impossible ; aucun ouvrier de ce quartier n'avait pu s'en échapper. Vers huit heures remontèrent 11 ouvriers venant de Sainte-Barbe par le beurtia Bourlard au Nord du n° 2 ; c'étaient les seuls survivants de ce quartier, d'où ils avaient pu fuir avant son envahissement par les gaz délétères. Il fut impossible de redescendre par le beurtia Bourlard, que les mauvais gaz emplirent à nouveau après le passage de ces 11 survivants. Puis sortirent les ouvriers de la veine Julie à 306 dans la communication avec le n°3; l'éveil leur avait été donné par des ouvriers du n° 3 venant du quartier de SainteBarbe Nord-Est, qui passèrent en courant, se sauvant vers le n° 2. La plupart des ouvriers de Julie n'en restèrent pas moins à travailler. Le porion de ce quartier alla' alors, vers sept heures, se renseigner au n° 2, puis revint pour faire évacuer tous les chantiers. Il était huit heures et demie, les fumées envahissaient déjà les tailles les plus voisines du n° 3. Le porion tomba, ainsi que plusieurs ou-

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vriers ; ils furent ramenés au n° 10 dans des berlines par leurs compagnons restés indemnes. Donc, à partir de ce moment, à huit heures et demie, les trois communications du n° 2 avec le n° 3 étaient impraticables. A neuf heures, M. Tarrade, ingénieur divisionnaire, M. Pegheairè, ingénieur du n° 10, accompagnés du porion contrôleur Delplanque et des porions Ferré et Sergeant, firent une tentative par Julie 306; mais M. Pegheaire tomba intoxiqué dans la voie de fond de Julie, ainsi que Delplanque et Sergeant. M. Tarrade, indisposé lui-même, alla chercher du secours. Il rencontra M. Storet, chef géomètre, qui venait lui aussi avec une équipe faire une tentative de ce côté et qui réussit à pénétrer dans les gaz méphitiques et à ramener MM. Pegheaire, Delplanque et Sergeant. Il fut assez heureux pour les ranimer au bout d'un quart d'heure d'efforts. Nous arrivâmes sur le carreau du n° 10 vers onze heures et demie et descendîmes avec M. René LeprinceRinguet, ingénieur à la Compagnie de Courrières, pour faire une nouvelle tentative par Julie. L'air s'y était beaucoup amélioré. En montant dans le treuil à chaise, nous y rencontrâmes cinq ouvriers qui n'étaient pas remontés depuis le matin, guettant l'amélioration de l'aérage dans Julie pour s'y engager de nouveau. Ils avaient déjà trouvé deux vivants dans une des voies du treuil. Nous continuâmes tous l'exploration des voies et des tailles, où furent trouvés une vingtaine d'ouvriers à demi asphyxiés : ouvriers ^de Julie restés trop tard à leur travail ou bien ouvriers du n° 3 (Sainte-Barbe Nord-Est) tombés en «'enfuyant vers le n° 2. Tous furent roulés jusqu'au n° 10 et remontés; mais cinq d'entre eux moururent au jour. Entre temps M. Storet, qui avait été battre les travaux du Sud du n° 2, avait ramené quatre ouvriers, dont deux avaient été trouvés dans Eugénie 340 et deux autres dans la bowette de 340. Ces deux derniers, Duchemin et Tome XII, 1907.

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