Annales des Mines (1907, série 10, volume 12) [Image 36]

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ÉTDDE SUR L'INDUSTRIE DU FER

mécanique, et on ne trouvait pas, dans la région des Ardennes ou toute autre, de fabricant de boulons livrant des pièces tournées, finies et calibrées, en un mot des pièces détachées de machines, prêtes à être montées sans aucune retouche, les constructeurs mécaniciens usinant eux-mêmes leur boulonnerie et ce, naturellement, à des prix de revient fort élevés. C'est à cette spécialisation que s'est attachée la maison Marcadet. Pour cela, elle a dû non seulement éduquer un personnel d'élite, mais encore, créer un outillage nombreux et approprié au genre de travail qu'il devait produire. La majeure partie des machines-outils a été construite dans les ateliers de construction de la maison Marcadet ; la description ci-après de l'outillage démontre suffisamment les sacrifices qui ont été faits et qui ne sont pas restés vains, puisque aujourd'hui M. Marcadet a la satisfaction de compter parmi sa clientèle les plus importantes maisons de construction de machines à vapeur, machines-outils, machines à imprimer, moteurs à gaz et à pétrole, locomotives, dynamos, automobiles, etc., ainsi que la marine militaire française, l'artillerie de terre et de mer, toutes les grandes Compagnies de chemins de fer. La maison fabrique journellement la boulonnerie de la série internationale, ainsi que la boulonnerie au pas Whitworth et aux mesures anglaises. Une autre spécialité de la maison est la clavette à tête en acier spécial. Ces pièces, fraisées partout, sont de très grande précision et sont employées sans aucune retouche. Enfin, outre des pièces de forge et de tour, la maison fait du décolletage de précision pour automobiles ; et les tours à décolleter donnentdes pièces d'un beau fini, ne présentant aucune bavure. Cela tient uniquement, pensonsnous, à la précision qu'on apporte en tout et à l'habileté des outilleurs, qui n'ont de répit que lorsqu'une machine est exactement au point.

DANS LES ARDENNES FRANÇAISES

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La maison tire ses approvisionnements des forges des Ardennes, principalement de Sedan et de Laval-Dieu, ainsi que des aciéries de Longwy. Ses charbons viennent du Nord par chemin de fer, et ses briquettes de Belgique par bateau. La maison ne fait pas d'exportation, sauf un peu en Belgique ; elle trouve le débouché de ses produits en France, spécialement dans les ateliers de construction. L'usine occupe de 150 à 160 ouvriers, et le chiffre d'affaires dépasse 600. C00 francs. Passons maintenant en revue le matériel de fabrication. La force motrice est produite par une machine à vapeur Corliss, à condensation, de la puissance de 1 12 chevaux. Sans parler de quelques boulon niers à la main, non plus que des ouvriers chargés de la fabrication des clavettes, l'usine possède 6 presses à friction ; les ouvriers y travaillent soit à la tâche, soit à la journée : à la journée quand on veut des boulons très soignés ; le salaire est alors de 6 francs par jour. A la tâche, l'ouvrier peut gagner 7 à 8 francs. Pour les écrous, il y a deux machines, l'une pour les gros, l'autre pour les petits. Elles sont du type courant, décrit dans la boulonnerie ordinaire. Signalons, sans intérêt particulier, 1 martinet à vapeur, 4 presses et 9 forges montées. Le travail de finissage du boulon commence avec les machines à tarauder. Celles-ci sont au nombre de 70. Le boulon, au lieu d'être fileté en une seule fois, l'est en deux, la première n'étant en somme qu'une ébauche dont on se contente dans la boulonnerie ordinaire ; ici le boulon passe dans une seconde lunette de précision. Pour un filetage plus précis encore, l'ébauche, au lieu de se faire a la lunette, se fait au tour par un ouvrier muni d'un peigne à fileter; le boulon est ensuite achevé à la lunette de