Annales des Mines (1902, série 10, volume 1) [Image 179]

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DISCOURS

PRONONCÉS

AUX FUNÉRAILLES

DE

M.

CORNU

toutes les observations faites par les différents observateurs sont ramenées à un compteur unique. Frappé du développement prodigieux que l'électricité a pris dans ces derniers temps et dont l'extension paraît encore aujourd'hui presque indéfinie, Cornu a pensé qu'il serait utile de nous initier aux conquêtes déjà acquises et de nous familiariser avec les nouvelles unités électriques récemment créées. C'est un immense service qu'il a rendu ; car ceux qui ont quelque peu vieilli, aussi bien que ceux qui sont restés étrangers pendant quelques années au progrès de l'électricité pratique, se trouvent aujourd'hui déroutés complètement, lorsqu'ils cherchent à comprendre la description des applications actuelles et à les rattacher à leurs connaissances antérieures. Pour se remettre à flot, il suffit de lire les quatre notices qu'il a successivement fait paraître sur les phénomènes électriques, et qui constituent une magistrale enquête de l'électricité moderne : c'est un chef-d'œuvre, me disait encore hier son ami, M. Sarrau. Cornu professait un culte presque filial pour les grands maîtres français de la physique : c'est encore dans deux notices de l'Annuaire qu'il a tenu à rendre l'hommage qu'ils méritaient à deux de ses illustres devanciers, Fresnel et Fizeau, dont les admirables découvertes ont renouvelé la théorie de l'optique et dont l'influence s'est étendue bien loin dans le domaine de la philosophie naturelle. Il n'était que juste de mettre en relief la fécondité de notre collègue dans les publications du Bureau des Longitudes, et le grand labeur qu'il leur a consacré; nous avons été les témoins de ses efforts constants pour maintenir à notre Compagnie le prestige auquel elle doit prétendre d'une activité sans limites; il avait toujours sur chantier une nouvelle étude à laquelle il se consacrait avec ardeur : il y pensait toujours; ses notes ne le quittaient jamais; c'était un travailleur incomparable. Et quelle lini-

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pidité dans son exposition, quel merveilleux talent pour mettre à la portée de tous la solution des problèmes les plus ardus ! La mort nous l'enlève dans le plein épanouissement de ses hautes facultés ; elle nous prive d'un collègue aimable et bienveillant, d'un collaborateur émérite,d'un conseiller éclairé. Le Bureau des Longitudes déplore sa perte prématurée et gardera sa mémoire avec un pieux respect pour les services éminents qu'il lui a rendus.

DISCOURS DE M. LE GÉNÉRAL DEBATISSE Commandant de l'École Polytechnique,

AU

NOM

DE

Messieurs,

L'ÉCOLE

POLYTECHNIQUE.

J'ai la douloureuse mission de venir, au nom de l'École Polytechnique, saluer d'un dernier adieu la dépouille mortelle du savant distingué, de l'éminent professeur que nous pleurons aujourd'hui et dont la mort prématurée met en deuil le monde savant tout entier. Alfred Cornu est entré à l'École Polytechnique en 1860, à l'âge de dix-neuf ans. Il en est sorti un des premiers, en 1862, et a choisi le Corps des Mines. Deux ans plus tard, en 1864, étant encore élève-ingénieur, ses premiers travaux le signalèrent à l'attention des Conseils de l'École et il fut nommé à l'emploi de répétiteur du cours de physique. En 1867, c'est-à-dire à l'âge de vingt-six ans, il y recueillait la succession de Verdet dans la chaire de physique, qu'il occupa depuis cette époque sans interruption. Pendant l'année terrible, dans Paris investi et affamé de nouvelles, alors qu'un intérêt si grand s'attachait à