Annales des Mines (1895, série 9, volume 7) [Image 148]

Cette page est protégée. Merci de vous identifier avant de transcrire ou de vous créer préalablement un identifiant.

288 NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR. ERNEST MALLARD,

de dire que, des longues discussions auxquelles son système a donné lieu, Mollard est sorti triomphant. Ce n'est pas que tous ses adversaires aient capitulé. L'hypothèse de la tension cristalline garde encore quelques partisans, surtout en Allemagne, et il est des esprits sur qui la belle simplicité des doctrines cristallographiques fran-

çaises n'exerce pas la même séduction que dans notre pays, toujours si sensible aux choses logiquement enchaînées. D'ailleurs, au degré de minutie où les observations modernes sont parvenues, il devient fort difficile de prononcer un jugement sans appel à l'égard d'une structure cristalline, alors que les objections peuvent toujours se réfugier dans l'infiniment petit. Mallard le reconnaissait lui-même, et ne se flattait pas de pouvoir réduire, par de nouveaux arguments de fait, des oppositions aussi persévérantes. C'était une des marques distinctives de cet esprit supérieur, d'allier une grande fermeté scientifique à une tolérance extrêrt: e en-

vers la contradiction. Même il eût volontiers ralenti le zèle de quelques-uns de ses admirateurs, pour les

NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR ERNEST MALLARD. 289

lard. Sa doctrine a été d'une extrème fécondité elle a vivifié à nouveau tout l'enseignement de la minéralogie, en y amenant bon nombre de disciples que la

sécheresse et le caractère abstrait des anciennes conceptions en auraient tenus écartés. Son influence a encore été bienfaisante à un autre point de vue : nous voulons parler de l'action personnelle exercée par lui dans les sociétés savantes qu'il fréquentait assidûment, et où sa courtoisie, sa droiture, son affabilité, ont laissé de profonds souvenirs. Milliard était l'âme de la Société française de Minéralogie, dont il a été deux fois le président. A maintes reprises, l'intérêt des séances, comme la valeur du Bulletin, ont exclusivement dépendu des travaux qu'il y apportait. C'est avec une attention soutenue qu'il suivait toutes les commu-

nications, et ses remarques, toujours topiques, étaient marquées au coin de l'expérience et du bon sens. Les mêmes qualités étaient appréciées à la Société géologique

d'articles de foi à ce qu'il regardait seulement comme des explications très plausibles. Aussi éloigné de l'infatuation

de France, qui a tenu à l'avoir pour président en 1885, et où son attitude réservée ne l'empêchait pas de jouir de la grande autorité due à sa science, comme à sa situation de membre de la commission de la Carte géologique détaillée. Les sociétés de chimie et de physique l'ont aussi

que du scepticisme, il savait qu'en matière de sciences d'observation le dernier mot n'est jamais dit, et la réserve de ce génie essentiellement clairvoyant faisait un absolu contraste avec le dogmatisme autoritaire, dont l'histoire des savants, même les plus éminents, offre

compté parmi leurs membres les plus éminents. Mais, comme l'a bien dit M. Haton de la Goupillière (*), c'est surtout l'École nationale supérieure des Mines qui a été la vraie patrie de Mallard. Pendant vingt-deux ans il a fait partie du personnel enseignant, et c'est lui qui,

empêcher d'outrer sa pensée, en attribuant la valeur

quelques exemples.

Quoi qu'il en soit, si le vrai rôle de la science est de faire resplendir l'ordre dans les phénomènes, et d'en grouper le plus grand nombre possible autour d'idées directrices, qui établissent entre eux un lien logique, en même temps qu'elles illuminent la marche des chercheurs, on peut dire que nul n'a réalisé cet idéal mieux que Mal-

lors du changement des programmes, opéré il y a une dizaine d'années, a été le principal initiateur des grands développements qu'a reçus alors le système d'instruction. Aimé de tous ses collègues, équitable et bon pour les élèves, il recevait avec une bonne grâce simple et () Discours aux funérailles.