Annales des Mines (1895, série 9, volume 7) [Image 146]

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284 NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR ERNEST MALLARD.

NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR ERNEST MALLARD. 285

toutes deux représentent un état allotropique de la silice,

formé exclusivement à de hautes températures, mais stable dans toutes les conditions thermiques. On n'en finirait pas, du reste, si l'on voulait n'oublier aucune des questions de détail où Mallard a laissé l'empreinte de sa sagacité, et nous avons hâte d'arriver à ce mémoire capital de 1884, par lequel il à magnifiquement couronné son oeuvre théorique, en présentant des vues d'une profonde originalité sur l'arrangement moléculaire des substances cristallisées.

En entreprenant ces nouvelles recherches, il s'était simplement proposé d'appuyer par des observations pré-

cises les idées qu'il avait déjà émises au sujet de la polarisation rotatoire, et que M. Wyrouboff venait de confirmer par un certain nombre d'exemples, empruntés aux cristaux hexagonaux et quadratiques. Par l'enchaînement des résultats expérimentaux et des déductions

qu'il semblait légitime d'en tirer, Mallard a été amené (c'est lui-même qui l'écrit), à des conclusions dépassant de beaucoup le but qu'il avait d'abord entrevu. Mais au lieu de céder à la tentation d'annoncer avec fracas sa conquête, il prélude à son exposé dans des termes qu'il convient de reproduire, parce qu'ils suffiraient à peindre cette exceptionnelle nature de savant : « J'ai été, dit-il, conduit de proche en proche à proposer une hypothèse, au premier abord peu vraisemblable, quoiqu'elle paraisse cependant appuyée sur des arguments très sérieux ».

Mallard commence par établir le dimorphisme du chlorate et du bromate de soude qui, d'une forme rhomboédrique avec symétrie concordante, passent naturellement à un arrangement cubique plus stable. Il remarque que ce passage, par une propriété commune à toutes les transformations allotropiques, respecte la forme des

cristaux, d'où il conclut que les paramètres du réalisé doivent être, à peu de chose près, des Thomhoèdre

multiples ou des sous - multiples simples de ceux du réseau cubique. Ensuite il constate l'isomorphisme que présentent, malgré l'apparente incompatibilité de leurs formes, les deux chlorates de potasse et de soude. Il s'assure alors que lé chlorate et l'azotate de potasse sont pleinement isomorphes, enfin que cette série embrasse également les azotates de soude, d'ammoniaque et d'argent. Il faut donc que , dans tous ces corps, les paramètres cristallins aient des rapports simples avec ceux du cube. Mais comment accorder cette conclusion ave c les valeurs habituellement acceptées par les cristallographes ? Ici l'ingénieux géomètre fait voir qu'il y a diverses manières

d'envisager un réseau cubique, que chacune comporte une combinaison spéciale de paramètres, et que ces combinaisons distinctes représentent ce qu'il est légitime d'appeler les limites cubiques respectives d'un réseau quadratique, rhomboédrique ou rhombique. C'est donc à ces systèmes-limites qu'il faut comparer les paramètres des corps dont l'isomorphisme avec dés substances cubiques a été constaté. Or une discussion des données numériques relatives aux

azotates, chlorates, bromates, iodates, carbonates, titanates, oxydes, sulfures, corps simples, silicates, amène Mollard à cette importante conclusion : que pour un très grand nombre de substances, choisies dans les séries les plus diverses, les paramètres cristallins peuvent être

ramenés à peu près à ceux du réseau cubique, si l'on

multiplie ces derniers par des coefficients compris parmi les rapports des quatre nombres : 1, 2, 3, 4. Le réseau moléculaire de tous les corps est donc, avec une certaine approximation, le réseau cubique lui-même ; comme si, selon la remarque de M. H. Le Chatelier, les molécules tendaient naturellement à s'empiler de manière à occuper le minimum d'espace, à la façon des piles de boulets,