Annales des Mines (1893, série 9, volume 4) [Image 255]

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504 NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR ADOLPHE HENRY.

Au cours de ce même voyage, l'attention d'Henry s'était portée sur les nouveaux explosifs, dynamite et autres substances analogues, qu'il avait pu voir à l'essai, particulièrement dans les mines métalliques de Belgique, et qui étaient encore à peu près ignorés en France;

frappé des services qu'ils paraissaient devoir rendre à l'art des mines, des applications qu'ils pouvaient recevoir au point de vue militaire, il avait, concurremment avec ses mémoires de mission, rédigé à leur sujet une note qui avait été immédiatement accueillie par la Commission des Annales des mines, et qui devait paraître clans le second semestre de 1870; les événements n'en permirent la publication qu'en 1871 (*), mais ce n'en fut pas moins le premier travail consacré dans notre pays à l'emploi dans les mines de ces précieuses substances explo-

sives, dont, en raison de la compétence qu'il avait montrée dans leur appréciation, notre camarade devait être appelé, peu d'années après, à s'occuper de nouveau. Cependant les cours de l'École des Mines avaient pris fin, et les trois élèves-ingénieurs de la promotion sortante

allaient partir pour leur dernier voyage d'instruction, qu'ils avaient décidé de faire ensemble et dont ils avaient longuement caressé le projet : ils se proposaient d'étudier d'abord les mines et les usines de Styrie et de Carin-

thie, de gagner de là l'Italie pour visiter la Toscane et Pilé d'Elbe, et de descendre ensuite jusqu'en Sicile, où lés gîtes de soufre d'une part, et l'Etna de l'autre, leur promettaient une riche moisson d'observations intéressantes. Pour ne pas aborder trop tôt une région aussi Méridionale, le départ avait été fixé à la fin de juillet, et la guerre venait d'être déclarée lorsqu'ils se mirent en route. Ils emportaient à travers le Tyrol l'espoir d'une Cainpagne rapide et de victoires prochaines ; à peine (*) Ann. des mines, 60 Série, XIX (1871), p24-60, pl. ',fig. 1-6.

NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR ADOLPHE HENRY. 505:

arrivés à Leoben, ils apprenaient coup sur coup les

désastres de Wissembourg et de Reichshoffen et avaient la poignante douleur d'entendre acclamer autour d'eux les succès des armes allemandes. Ils reprenaient aussitôt la route de Paris ; mais, comme ils. venaient d'atteindre la frontière française, Henry, souffrant depuis quelques jours , fut obligé, par une indisposition assez sérieuse, de s'arrêter à Chambéry. Quand il put, au commencement du mois de septembre, rejoindre ses deux compagnons, l'organisation du corps des Mineurs auxiliaires du Génie, dans lequel ceux-ci avaient trouvé place, était terminée, et les -cadres en étaient au complet. Il ne fit, du reste, pas grands efforts pour s'y faire admettre : croyant trouver ailleurs un rôle plus actif, il s'engagea dans l'infanterie, et y resta comme caporal pendant près de trois mois, au cours desquels il eut souvent à faire de nuit le rude service de grand'garde ; ce n'était pas là toutefois un aliment suffisant à son désir de se rendre utile, et lorsqu'au com-

mencement du mois de décembre on lui demanda de prendre part à son tour aux travaux de défense de Paris, en remplacement de son camarade Heurteau , atteint d'une fièvre typhoïde, il 's'empressa de répondre à l'appel

qui lui était adressé. Il eut alors à s'occuper, jusqu'à la fin du siège, sous les ordres de l'excellent et regretté Descos, de la reconnaissance et de l'établissement d'une voie souterraine de communication entre le fort de Vanves et Paris, ainsi que de l'aménagement de la galerie qui reliait le fort de Montrouge à la place. Tour à tour exposé à la surface au feu des batteries ennemies qui bombardaient nos lignes avancées, et enfoui sous terre pour explorer de vieux cavages noyés, dans lesquels l'eau, s'élevant parfois jusqu'à l'ouverture des bottes d'égoutier qu'il fallait chausser pour les parcourir, inondait les vêtements, qui se gelaient ensuite sur le corps pendant le retour en plein air, c'était à qui, de lui ou