Annales des Mines (1893, série 9, volume 4) [Image 222]

Cette page est protégée. Merci de vous identifier avant de transcrire ou de vous créer préalablement un identifiant.

438

RELATIONS ENTRE LA PRESSION, LE VOLUME

un peu d'iode par vaporisation à la partie supérieure du

tube piézométrique ; celui-ci reçoit ensuite de l'acide carbonique, et, pour éviter que, dans la suite de l'expérience, l'iode attaque le mercure, le piston mercuriel est recouvert d'une légère couche d'acide sulfurique. On presse, et, dès que la couche liquéfiée d'acide carbonique atteint

l'iode, elle se colore. Or, si l'on chauffe alors le tube au-dessus de 310, le ménisque disparaît, mais la coloration persiste dans la région occupée primitivement 'par le liquide ; cette coloration s'estompe sur quelques millimètres dans la région où se trouvait la surface de séparation, mais la région supérieure de la chambre reste incolore ; l'iode solide déposé dans cette région ne se dissout pas, et, d'autre part, la région colorée accuse au spectroscope le spectre d'absorption de l'iode dissous dans un liquide et non celui de la vapeur d'iode. 'MM. Cailletet et Colardeau en infèrent que l'état liquide

persisterait encore « au-dessus du point critique ». M. Cailletet avait observé, en 1880, que si, à la température ordinaire, on comprime, dans le tube à pression, un mélange de cinq parties d'acide carbonique et

d'une partie d'air, on obtient d'abord une liquéfaction sous une pression moyenne ; puis si l'on comprime davantage, la surface terminale du liquide passe par toutes les apparences que l'on observe au voisinage du point critique, et, entre 130 et 150 atmosphères, toute apparence de séparation a disparu. Jamin avait proposé d'expliquer ce phénomène en disant qu'et partir du moment où la liquéfaction de l'acide carbonique est commencée, la pression individuelle de ce fluide n'augmente plus , mais celles de l'azote et de l'oxygène continuent d'augmenter, et avec elles la densité totale ; qu'a un certain moment, cette densité est égale à celle du liquide qui flotterait alors dans la masse

ET LA TEMPÉRATURE DE L'ACIDE CARBONIQUE. 439

gazeuse. De même, dans le cas d'un tube contenant de l'acide carbonique liquide et sa vapeur, à mesure que la température s'élève, la densité du liquide diminue, celle de la vapeur augmente et il arriverait un moment où le mélange serait simplement la conséquence de l'égalité des poids spécifiques.

L'explication, sous cette forme, est tout au moins incomplète, car, ainsi que l'ont rappelé MM. Duhem et Lippmann, il ne suffit pas que les densités de deux fluides soient les mêmes pour que la surface de séparation disparaisse : « En effet, enseigne M. Lippmann, deux fluides

peuvent avoir même densité sans se mélanger et sans former un tout homogène. Par exemple, Plateau a composé des mélanges d'eau et d'alcool qui ont exactement la même densité que l'huile ; une goutte d'huile reste en équilibre au milieu de ces mélanges sans s'y dissoudre. Si on agite, on obtiendra une émulsion et non un mélange

transparent. Pour qu'on obtienne un mélange transparent, il faut que la constante capillaire de la surface de contact soit nulle, c'est-à-dire que cette surface n'ait plus de propriété capillaire. » C'est ce que M. Duhem exprime en disant qu'il faut que les attractions moléculaires des deux fluides soient les mêmes. remarqué lui-même, si c'est simComme Jamin plement un mélange qui produit la diffusion d'un fluide dans l'autre, on devrait, en continuant de presser et

amenant ainsi un écart des densités en sens inverse, voir à nouveau le liquide se rassembler au sommet du tube.

Or, M. Cailletet a constaté que la vérification ne se fait point ; le contenu du tube, une fois devenu d'aspect

homogène, demeure tel sous tout accroissement de pression.

MM. Cailletet et Colardeau ont dès lors proposé de substituer à cette théorie du simple mélange celui d'une