Annales des Mines (1892, série 9, volume 2) [Image 322]

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LE GRISOU AUX MINES D'ANZIN. 1810-1892.

C'est ainsi qu'une première imprudence en amène une seconde et que le mépris des règlements conduit insensiblement et fatalement à accumuler une série de circonstances, déjà dangereuses par elles-mêmes, et dont la réunion constitue un danger terrible. L'Administration des mines recommanda vivement à la Compagnie Observations de l'Administration des mines.

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de redoubler de surveillance à l'égard des chassis d'air des tailles et des communications d'aérage en général. Elle lui conseilla en outre de rechercher le moyen d'empêcher les mineurs de se servir de poudre dans la veine. « Il faudrait pour cela, disait-elle, que le mur se fit à une heure déterminée et qu'un porion pût alors remettre à chaque ouvrier la poudre nécessaire pour cette opération ; il reviendrait ensuite s'assurer que la mine a été tirée, ou, comme cela se fait en Belgique, il allumerait lui-même les mines ». C'était le principe de l'institution des boute-feu qui était ainsi mis en avant ; mais cette sage mesure ne devait pas être encore mise èn pratique, elle ne devait s'imposer que plus tard à la suite d'une nouvelle série d'accidents (*). La Compagnie Règlement sur l'emploi de la poudre. répondit aux observations de l'Administration des mines en réglementant le tirage des mines dans les fosses grisouteuses par une série de dispositions qui formèrent le premier règlement qui ait régi cette matière. -

LE GRISOU AUX MINES D'ANZIN. 1810-1892.

639 Art. ler. Sont réputées fosses à grisou celles où un dégagement habituel de gaz hydrogène carboné exige des mesures de précaution exceptionnelles. Lorsque les directeurs auront reconnu qu'en raison de la diminution ou de la disparition du gaz, le régime exceptionnel n'est plus nécessaire pour une fosse, ils adresseront à l'admi-

nistration une proposition téndant à faire rentrer cette fosse clans-la catégorie des fosses ordinaires. Art. 2. Dans les fosses à grisou, il est expressément défendu de faire jouer la mine, à moins d'autorisation spéciale du maître potion, du porion ou du maître-mineur. Cette autorisation ne pourra être donnôe, et il ne pourra en être fait usage qu'en dehors des chantiers où se fera rabatage du charbon et après s'être assuré du bon état de l'aérage. A l'égard de l'emploi de la mine dans la veine et sur coupe, il

pourra être autorisé dans les parties de l'exploitation où le dégagement de grisou n'a pas lieu, mais seulement par le directeur lui-même. Art. 3.

H est formellement interdit aux ouvriers d'em-

ployer d'autre poudre ou d'autres fusées que celles fournies Par la compagnie. Les dépôts de cartouches et de mèches de sûreté de chaque fosse sont placés sous la surveillance des maîtres porions. Art. 4.

Les cartouches et les mèches ne seront délivrées aux ouvriers que sur l'autorisation expresse de l'un des chefs- susnommés, qui fixera la quantité présumée nécessaire pour les travaux de la journée. La journée terminée, les ouvriers devront remettre l'excédent non consommé. Il leur est expressément interdit d'en conserver sous quelque prétexte que ce soit. Art. 5. Un registre spécial indiquera les quantités reçues et les quantités rendues.. Art. 6. -- Pour le chargement de la mine, la poudre sera enfoncée, comme d'usage, à l'aide d'un bourroir en bois. Les bourroirs métalliques ne pourront être employés que pour achever le bourrage. Art. 7. Il est interdit de retourner sur la mine qui n'a pas

(*) La catastrophe de Turenne, la plus terrible qui se fût jamais produite clans le bassin houiller d'Anzin., jeta la consternation dans tous les coeurs, mais n'abattit pas les courages. Elle denna naissance à des actes de dévouement sublime qui provo-

joué avant un délai de vingt-quatre heures; en tout cas, il est

quèrent de nombreuses -récompenses. Les veuves et les orphelins furent l'objet de toute la. sollicitude de la Compagnie, et des souscriptions publiques, accueillies avec le plus charitable empressement, vinrent soulager dans la mesure du possible les malheureuses familles atteintes par ce désastre.

Ce n'était encore là qu'un acheminement vers l'institution des boute-feu, et nous verrons souvent ces sages dispositions rester impuissantes à empêcher les infrac-

défendu de la débourrer.