Annales des Mines (1890, série 8, volume 17) [Image 159]

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NOTICE NÉCROLOGIOUE SUR EDMOND FUCHS.

Nous nous sommes étendu avec quelque complaisance sur cette première grande tournée, où se dessine la vocation de Fuchs pour les longs et difficiles voyages. On nous le pardonnera plus volontiers encore, si nous disons que. la relation originale de ce tour d'Europe, capable de remplir un gros volume, a été anéantie en 1870, lors du

bombardement de Strasbourg, dans l'incendie qui détruisit la maison paternelle de notre ami. Le 19 février 1862, Fuchs, sorti le second de l'École des mines, était nommé ingénieur de 3e classe. Juste à ce moment, le poste de Strasbourg devenait vacant. Le premier de la promotion, M. Keller, Alsacien lui aussi, s'empressa de le réclamer. Fuchs vint donc prendre, auprès du secrétaire du Conseil des mines, la place que son camarade laissait libre, et d'abord sa pensée dut se reporter plus d'une fois avec regret sur cette chère Alsace, où tant de liens l'attiraient. Mais la Providence lui réservait, à bref délai, un dédommagement qui devait décider de sa carrière, en le fixant pour toujours à Paris, dans un poste d'ordre scientifique. Au mois de juillet, en effet, un arrêté ministériel le chargeait de professer, en remplacement du regretté Bour, la géométrie descriptive et la physique aux cours préparatoires de l'École des mines, et en même temps on lui confiait, à cette École, les leçons de lever des plans et de topographie souterraine. A cette même date commencent les relations de Fuchs avec l'industrie privée, qui devait si souvent en appeler au concours de ce voyageur infatigable. C'est ainsi qu'en 1862, on le voit étudier, en Angleterre et en Suède, pour

la société du Creusot, le procédé Bessemer. Puis, avril 1863, la compagnie des Salines de l'Est le charge d'un rapport sur le gisement si curieux de Stassfurt en Anhalt. Ces missions furent bientôt suivies de plusieurs autres, dont nous parlerons à leur date et dont chacune

NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR EDMOND FUCHS.

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lui donnait l'occasion de recueillir de nombreuses séries d'échantillons. D'ordinaire il déposait ces séries à l'École

des mines, où elles prenaient place dans la collection des gîtes minéraux et métallifères, dont le soin lui avait été confié par M. de Chancourtois, et qui devait prendre, par suite de la construction des nouveaux bâtiments, un assez grand développement. En même temps, il amassait des matériaux pour des mémoires scientifiques, des-

tinés à être insérés dans les Annales des Mines. Mais avant que ces mémoires vissent le jour, il allait s'accomplir dans l'existence de Fuchs un grand et décisif événement : nous voulons parler de son mariage, dont les circonstances furent trop caractéristiques pour qu'on les puisse passer sous silence. Fuchs avait eu pour camarade, à l'École polytechnique comme à l'École des mines; M. Charles Ledoux, aujourd'hui ingénieur en chef, professeur du cours d'Exploitation et conseil de la compagnie d'Anzin. L'un des frères de M. Ledoux étant tombé gravement malade à Paris, Fuchs lui prodigua les soins les plus dévoués. Au chevet du mourant, la soeur de ce dernier, Mlle Henriette

Ledoux, apprit à bien connaître l'ingénieur qui s'était acquis tant de droits à la reconnaissance de la famille. Lui, de son côté, eut assez de clairvoyance pour deviner quel fonds de trésors naturels était renfermé chez cette .jeune fille, et de quel épanouissement ces richesses étaient susceptibles, pour peu qu'elles fussent placées dans un cadre favorable. Quelques mois après, le 9 juillet 1863, Mile Ledoux devenait Mme Fuchs.

Ce que fut cette union, née d'un élan naturel que favo-

risaient la gratitude et l'estime, et de laquelle on peut dire que tout calcul humain avait été écarté, il n'est pas un ingénieur qui l'ignore. Tous ont été témoins des joies

intenses que l'époux a trouvées dans les brillantes facultés de sa compagne, facultés dont il lui était permis