Annales des Mines (1880, série 7, volume 18) [Image 109]

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ÉTUDE DES MOYENS PROPRES A PRÉVENIR

17. Action sur l'organisme. Le gaz des marais est incolore. En l'absence de mesures précises, il y a lieu de penser que son pouvoir réfringent est sensiblement différent de celui de l'air. Telle est du moins l'explication qui a été donnée de certaines apparences signalées depuis long. temps, analogues à des fils de la vierge ou des toiles d'a. raignées. Elles seraient dues aux petits filets gazeux qui

s'échappent du charbon en gagnant directement le toit sans se mélanger à l'air et qui occasionneraient ainsi une déviation dans le trajet des rayons lumineux (I). D'autres auteurs ont expliqué ces mêmes apparences par des précipitations de vapeur d'eau dues au refroidissement produit par la détente du gaz qui quitte une pression assez élevée dans la houille pour retomber à celle de l'atmosphère. L'hydrogène protocarboné est ordinairement inodore et insapide. Parfois on trouve au grisou un léger goût de pomme. Dans certains cas il prend une odeur fétide pour les causes que nous avons énumérées ci-dessus (no 10). Il produit quelquefois un léger picotement aux yeux. 11 n'est pas toxique ; mais il devient asphyxiant, si sa proportion atteint le tiers environ du volume du mélange respiré (2). Avec les conditions ordinaires de l'aérage, cette circonstance ne peut se présenter que d'une manière tout à fait exceptionnelle. Au siècle dernier, au contraire,

elle constituait un danger spécial pour le mineur. Jars rapporte, dans ses Voyages métallurgiques, que, dans les houillères de Whitehaven, il ne se passait pour ainsi dire pas de semaine sans un cas d'asphyxie. Les hommes n'y travaillaient jamais seuls et devaient périodiquement s'appeler et se répondre. Dumas : Chimie industrielle, tome I, page 468. COMBES : Traité d'exploitation des mines, tome II, page 302.

LES EXPLOSIONS DU GRISOU.

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M. Chansselle cite un exemple d'asphyxie par le grisou qu'il a observé sur lui-même. Ayant exploré le sommet d'un montage, il fut pris d'un anéantissement subit et roula jusqu'au bas, où il resta pendant cinq minutes sans connaissance. Cette défaillance ne fut, du reste, précédée ni suivie d'aucune douleur, tandis qu'un autre cas d'asphyxie par des gaz d'incendie souterrain laissèrent à l'auteur des céphalalgies violentes dues sans aucun doute à l'oxyde de carbone. Il est bon de faire remarquer que l'asphyxie par le grisou

présente une circonstance plus favorable que celle qui est due à l'acide carbonique. Avec ce dernier, l'homme qui

tombe est perdu, car il reste couché dans la partie de l'atmosphère qui présente la plus grande teneur en gaz. Au contraire, pour le cas du grisou, l'évanouissement le laisse étendu dans la région la plus favorable sous le rapport de la composition de l'air.

Il y a lieu du reste d'ajouter avec M. Paul Bert que les effets asphyxiants sont absolument les mêmes pour un air simplement désoxygéné au delà d'une certaine proportion, ce qui peut quelquefois faire illusion sur la nature de la cause. M. Félix Leblanc, dans les mines de plomb argentifère de Poullaouen, est tombé foudroyé au moment où il engageait la tête dans une cavité renfermant un air ainsi altéré, mais certainement exempt de grisou. Il n'a repris connaissance qu'au bout de quelques minutes. § IV. -- PRESSION ET DÉGAGEMENT DU GRISOU.

is. Dégagements instantanés. Bien que, dans l'opinion de la très grande majorité des praticiens, le grisou préexiste à l'état gazeux, enfermé sous une pression plus ou moins élevée dans les pores du massif de charbon ou des roches encaissantes , je ne saurais passer sous silence la