Annales des Mines (1880, série 7, volume 18) [Image 93]

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ACCIDENT DU PUITS FONTANES

M. Julien, accompagné de quelques ingénieurs, redescendit

dans le puits et constata encore que le courant d'air était toujours renversé et l'atmosphère des travaux de la couche peu respirable. Préoccupé de cette situation, M. Julien inspecta encore très minutieusement les plans et fit exécuter de nouveaux barrages. Le ventilateur fut ensuite remis en marche après un arrêt de 5 heures, et, deux heures après, le vendredi 5" août, à 5 heures du matin, une nouvelle tentative de descente fut effectuée ; mais on fut arrêté

à 46 mètres au-dessus de la galerie, le puits était jusqu'à cette hauteur rempli d'acide carbonique. Pendant les cinq heures qui suivirent, les progrès de la ventilation parurent être nuls, et M. Julien songea à établir un ventilateur soufflant ; mais, auparavant, remarquant que le renversement du courant d'air avait coïncidé avec l'établissement du plancher du niveau 246, il décida, vers 8 heures du matin, de crever ce plancher en faisant tomber du niveau 165 deux boulets en fonte ; on reprit ensuite l'épuisement et l'injection de l'eau. Le niveau de l'acide carbonique baissa alors progressivement et, vers 2 heures de l'après-midi, le puits étant absolument purgé d'acide carbonique, on put pénétrer dans la galerie du niveau 246. On constata encore que le courant d'air était renversé ; on agrandit, en démolissant la moitié du plancher, la brèche pratiquée par les boulets, qui n'avaient fait qu'entrebâiller l'une des voliges, et on fit ouvrir les robinets des divers réservoirs établis dans le puits (*). Enfin, à 7 heures /2 du soir, l'air de la galerie était excellent, et le courant, quoique faible, avait un sens normal ; le travail du sauvetage put donc être immédiatement repris. Ce travail consistait à déblayer la remontée et à transporter le charbon à la recette, d'où on le précipitait dans (*) On peut estiner de7 à Lo mètres cubes à l'heure la quantité d'eau qui alimente ces réservoirs.

DES I,OUILLÈRES DE ROCHEBELLE (GARD).

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le puits. Vers 9 heures, l'odeur cadavérique se fit sentir ; minuit, le corps de Baillac fut découvert à s o mètres du front de taille de son chantier; il était couché sur le dos, la tête en bas, les bras étendus et en avant, le milieu du corps à la hauteur de l'extrémité du galandage. Le cadavre fut dégagé avec peine, mis dans le cercueil au bas de la remontée et envoyé au jour. Déjà, depuis une heure, les ouvriers ne travaillaient que la bouche et le nez couverts par une éponge imbibée d'eau phéniquée. Les travailleurs se remirent à la besogne après quelques instants de repos, et, à i heure /2 du matin, on découvrit le cadavre de Pascal, dans son chantier. Ce chantier était

absolument intact, complètement vide et barré à l'entrée par le charbon projeté du chantier voisin. Il était, d'ailleurs, complètement rempli d'acide carbonique que l'on fit écouler avec précaution ; puis, avant l'enlèvement du corps, le

chantier fut examiné avec le plus grand soin et l'absence du grisou bien constatée. Pascal gisait à 5 mètres du front de taille ; il était à genou sur la jambe gauche, la jambe droite étendue, la figure sur le sol, le bras droit étendu en avant, le bras gauche replié sous la poitrine, la tête tournée dans le sens de la fuite. 11 avait été évidemment foudroyé en cherchant à échapper au redoutable fléau.

Tel est le récit de l'accident du puits Fontanes et du pénible sauvetage qui l'a suivi. Avant de passer à la discussion de ses causes, je résumerai ici les expériences que j'ai entreprises pour me rendre compte de l'aérage, par le ventilateur de la Grand'-Combe, des travaux de ce puits. Ce ventilateur débitait, à la vitesse de 168 tours par minute, 5,887 litres d'air par seconde. Le volume qui passait dans la galerie de la couche u était o-8,589 Le volume du courant partiel qui traversait la brèche pratiquée dans le plancher, était et la dépression de 19 millimètres.