Annales des Mines (1876, série 7, volume 10) [Image 106]

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LE CETTOIS.

EXPLOSION DE LA CHAUDIÈRE DU BATEAU A VAPEUR

Le cylindre inférieur était complet, même dans la partie recouverte par l'autre, à l'exception de deux larges ouvertures qui avaient été pratiquées à ses extrémités longitudinales pour le passage de la vapeur. L'espace compris entre les deux surfaces cylindriques servait de réservoir supplémentaire de vapeur. Le timbre était de G kil. Les parties intérieures de la chaudière n'ont pas souffert de l'explosion ; elles sont restées intactes : l'enveloppe a été seule affectée. Le cylindre inférieur et le cylindre supérieur se sont déchirés, d'abord à leur raccordement longitudinal

de gauche suivant la ligne de rivure, en pleine tôle :

les

de leur

parties ainsi séparées se sont développées, chacune côté, en rompant leurs attaches avec les faces d'avant et d'arrière et en s'entr'ou-vrant en différents sens. Le bateau, au moment de l'accident, remorquait quatre bateaux, chacun d'un tonnage de 4o à 5o tonnes, et développait une traction bien inférieure à sa puissance. Il navi-

guait depuis deux heures et demie environ, dans l'étang de Thau, quand le capitaine fit stopper pour changer l'ordre de la remorque. Cette manoeuvre, qui dura cinq minutes, une fois exécutée, l'ordre fut donné d'avancer lentement : c'est quelques secondes après que l'explosion eut lieu. D'après l'enquête faite par la commission de surveillance du port de Cette, cette explosion ne peut être attribuée ni à un défaut d'alimentation, ni à une surélévation volontaire de pression, ni à un mauvais entretien : elle serait uniquement imputable à la forme vicieuse du corps extérieur du générateur. Cette enveloppe, à forme tourmentée, avait en effet une tendance évidente à la déformation, et cette teedance n'était combattue que par la tôle, en forme de ca-

lotte, qui prolongeait le cylindre supérieur. Cette fonctionnait à l'instar d'un tirant, mais d'un tirant

tôle SUS

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ceptible de variations angulaires autour de ses points d'attache, suivant le degré de la pression.

D'un autre côté, le demi-corps cylindrique supérieur était sollicité, en raison de sa double courbure, à des flexions de sens inverse, autour de la même ligne de raccordement.

Ces actions devaient avoir pour effet de tendre à déterminer un lieu spécial de cassure et d'arrachement, et c'est bien en effet ce qui est arrivé. Une constatation particulière a d'ailleurs confirmé cette appréciation théorique à laquelle conduisait le seul examen de la chaudière. En effet, tandis que partout ailleurs les cassures étaient couvertes d'une couche ocreuse de rouille,

la tranche de la tôle, vers le milieu de la longueur du raccordement déchiré, présentait un aspect blanchâtre qui diminuait peu à peu, en tournant au rouge, à mesure qu'on approchait des extrémités. Cette couleur blanchâtre n'était autre que celle du tartre déposé pendant la marche normale de la chaudière, et se retrouvait notamment sur la tranche des ouvertures entaillées sur la calotte du cylindre inférieur pour permettre le passage de la vapeur. Cette observation indique qu'il existait, avant l'explosion, un commencement de rupture, provoqué ou au moins développé par ces douvements de flexion en sens inverses que le métal éprouvait en ces points à chaque changement sensible dans la pression. Il n'y a aucune observation à présenter en ce qui concerne la cause à laquelle la commission de surveillance impute l'accident. Peut-être cependant, si l'on remarque que l'explosion a eu lieu après un arrêt, au moment de la remise en marche, serait-on amené à supposer que d'autres actions ont pu se produire, qui ont ajouté leur effet à celui de la forme vicieuse de la chaudière ; mais elles ne seraient que d'une importance secondaire, et le fait dominant reste toujours celui que la commission a mis en relief.