Annales des Mines (1875, série 7, volume 8) [Image 142]

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EXPOSÉ DES TRAVAUX

DE M. ÉLIE DE BEAUMONT.

très-vite, plus vite que la masse ; la seconde plus longue,

n'ont eu une intensité plus grande qu'aujourd'hui, ce qui est une supposition tout à fait gratuite. Pour expliquer les phénomènes grandioses dont notre globe a été témoin, ils appellent à eux l'aide du temps. Ils caractérisent notre école révolutionnaire ; c'est ainsi qu'ils nous appellent par les mots « prodigue de violence, avare de temps ». L'école uniformitaire est, de son côté, bien prodigue de temps, car elle estime à 2 ou 5oo

dans laquelle la surface se refroidit moins vite que la masse.

Pour la terre, il en a été vraisemblablement de même. La température de la surface s'est abaissée rapidement d'abord, puis elle est devenue assez froide pour que l'eau

liquide pût y exister, et quelque temps après la vie c'est l'état du lingot auquel on peut toucher bien qu'il soit encore chaud. A partir de ce moment la température de la surface ne varie plus que d'une manière insensible, tandis que le noyau perd toujours sa chaleur ; en même temps il se contracte, tandis que la surface garde la même ampleur et se plisse pour s'appliquer sur lui. Tel est le système d'Elle de Beaumont. Si j'ai réussi à vous le faire saisir, vous devez être frappés de l'enchaînement logique des idées et de la correspondance générale qui

existe entre la marche réelle des choses et les déductions successives de l'hypothèse fondamentale et unique qu'il a empruntée aux astronomes. Tous les géologues n'ont pas adopté cette manière de voir. En même temps que sous la plume d'Élie de Beaumont se développaient les idées que je viens de vous exposer, parallèlement, pour ainsi dire, se succédaient les écrits de Lyell, chef d'une école que je ne puis appeler anglaise, puisque ses principes ont toujours été repoussés par de la Bêche, par Murchison et les autres fondateurs de la géologie

anglaise, mais uniformitaire, si vous voulez me permettre ce mot, forgé du reste par un de ses compatriotes (*). Les géologues de cette école posent en principe : qu'il est irrationnel de chercher, pour expliquer les phénomènes

anciens, des causes autres que les causes actuellement existantes, ce que tout le monde accordera sans peine ; mais

ils admettent implicitement aussi que jamais ces causes (E) Le docteur Whewell.

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d'années le temps qui s'est écoulé depuis la fin de la période tertiaire moyenne.

Il faut bien admettre cependant que cette structure si remarquable des chaînes de montagnes ne peut pas être le résultat de mouvements, si prolongés qu'ils soient, de la nature de ceux que nous voyons actuellement dans le nord de l'Europe. L'action volcanique ne produit pas non plus de chaînes de montagnes. La croûte terrestre se fend, la fente se remplit de laves qui montent à la surface, se déversent sur la terre, ou s'empilent les unes sur les autres, en même temps que les vapeurs qui s'en échappent pro-

jettent au loin des scories ; mais les couches mêmes de l'écorce sent à peine dérangées. Restent donc les tremblements de terre, qui de tous les phénomènes actuels sont ceux dont les effets présentent le plus d'analogie avec un soulèvement de montagnes, réduit à une échelle microscopique. On a vu en 1822, au Chili, une surface égale à la moitié de la France soulevée d'un seul coup de plusieurs mètres ; probablement, parmi les fentes du sol, y en a-t-il plusieurs qui ont joué à ce moment et dont les parois ont glissé l'une sur l'autre ; et l'on a des preuves que ce fait s'est produit plusieurs fois depuis que le continent américain a pris sa forme actuelle. Pour produire des accidents comme ceux dont je vous ai entretenus, il faudrait donc qu'un phénomène identique se fût produit plusieurs milliers de fois au même point.

Ces tremblements de terre sont parfois terribles dans