Annales des Mines (1874, série 7, volume 6) [Image 205]

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NOTICE NÉCROLOGIQUE

NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR M. AUDIBERT, INGÉNIEUR DES MINES (1.

Edmond Audibert est né, en 1820, à Bordeaux, d'une ancienne famille marseillaise, de vie honorable et de fortune modeste. En 1857, il entrait à l'École polytechnique avec le n° 4o. Il en sortit avec le n° 5, qui lui permit de choisir la carrière des mines. Classé le premier à sa sortie de l'École d'application, il reçut, pour son voyage d'exploration, une mission en Bohême et en Hongrie, à la suite de laquelle il fut envoyé comme ingénieur ordinaire des mines à Nantes. Il y resta quatre ans au service de l'État. En 1846, M. Paulin Talith t, qui avait créé le chemin de fer de la Gran d' Combe et d'Alais à Nîmes, s'occupait activement de le continuer jusqu'à Marseille et d'ouvrir aux produits du

bassin houiller du Gard un débouché, rapide et à bon marché, vers le grand entrepôt du littoral, en même temps que d'affranchir ce dernier des difficultés que présente la navigation du Rhône, au-dessous d'Ailes. Pour le seconder dans cette oeuvre importante, qui devait être pour le commerce marseillais le point de départ, trop souvent méconnu depuis lors, d'un développement si fructueux et si rapide, M. Tala-

bot avait besoin d'hommes à la fois jeunes et instruits, entreprenants et sensés : il attacha à son entreprise M. Audibert.

A cette époque, l'industrie des chemins de fer était chez (*) La Bevue de France (livraison du 50 novembre i.874) a publié, sur M. A udibert, directeur de la compagnie des chemins de fer de

Paris à Lyon et à la Méditerranée, un intéressant article, auquel sont empruntés textuellement les éléments de cette notice nécrologique d'un des membres les plus distingués du corps des mines.

SUR M. AUDIBERT.

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nous à l'état d'enfance. Quelques grandes lignes rayonnaient déjà, il est vrai, autour de Paris ; mais M. Talabot savait bien que les meilleures leçons de l'expérience se trouveraient là où elle était faite sur une grande échelle, et que c'était de l'autre côté de la Manche que devait se faire le plus utilement une étude pratique du nouveau système de locomotion. Il s'était, dans ses fréquents voyages, lié

d'amitié et d'intérêts avec les Stephenson, et créé des relations qui le mettaient en mesure d'assurer à M. Auilibert l'accès des meilleurs terrains d'étude, en même temps que les conseils et les exemples des ingénieurs les plus compétents.

M. Audibert partit donc pour l'Angleterre et y passa plusieurs mois à apprendre, dans tous ses détails, le métier de l'exploitation. Rentré en France, en 1847, il fut chargé de l'organiser sur la ligne de Marseille à Avignon. C'est alors qu'il se trouva aux prises avec les difficultés d'une création de toutes pièces. Il fallait une volonté et une énergie peu communes pour lutter contre l'opposition, contre les résistances sourdes ou déclarées qui surgissaient de toutes parts, sous l'empire d'intérêts froissés ou effrayés, qui n'avaient pas encore eu le temps de calculer la portée d'un change-

ment si profond dans les relations commerciales et de se plier à ses exigences. En même temps que l'éducation du public, il fallait faire celle du personnel exploitant ; c'est dans cette tâche, si lourde et si délicate, que M. Audibert

déploya tout ensemble une ardeur et une patience qui ne se rebutaient d'aucune peine, d'aucun soin, quelque infime qu'il fût, d'aucune besogne matérielle, si fatiguante

ou si répugnante qu'elle pût être : caissier, comptable, contrôleur, graisseur, donneur de billets conducteur de trains, M. Amlibert fut tout, sans cesser d'être ingénieur et directeur. C'est qu'il sentait l'absolue nécessité de substituer, chez ses agents, au laisser-aller et à la fantaisie locales, la régularité et la précision qui, nécessaires à la conduite de toute grande entreprise, sont la condition