Annales des Mines (1866, série 6, volume 9) [Image 271]

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OPÉRATIONS INSALUBRES POUR LES OUVRIERS.

les soins de propreté en vigueur dans les fabriques de céruse et d'acétate de plomb : nous n'y reviendrons pas à propos d'autres industries auxquelles des remarques analogues s'appliquent. Nous nous bornerons à retenir une particularité, -comme exemple de ce que peut pour la santé des ouvriers l'intelligente administration des patrons. Aux cristalleries de Saint-Louis et de Baccarat, on affecte à la préphration du minium des hommes de la campagne, de-

meurant à quelques kilomètres de la fabrique, qui ont ainsi un grand exercice à faire à la sortie de leur travail. On les fait alterner au bout d'une semaine pour les occuper alors en plein air. .On veille en outre à ce qu'ils aient une nourriture très-fortifiante. Ces sages mesures ont prévenu les coliques saturnines dans ces vastes établissements. Nous terminerons ici cette énumération, bien qu'il y ait un grand nombre d'autres industries dangereuses pour les ouvriers. Mais les unes n'ont pas été assainies (*), ou ne (*) Telle .est par exemple, la fabrication du chromate de potasse, qui détermine au bout de peu de jours la perforation de la cloison nasale. Chez M. Clouet, au Havre, l'accident est général : il paraît dû aux particules de chromate en suspension dans l'air et provenant soit du broyage des matières sèches, soit de l'évaporation des

liqueurs. De plus, la moindre écorchure aux mains dégénère en ulcère cancéreux, qui ne tarderait pas à s'approfondir jusqu'à l'os, si l'on ne s'empressait de traiter la plaie par le sous-acétate de plomb.

On peut citer aussi comme industrie non assainie, du moins en France, celle de la quinine, laquelle produit les singuliers effets qu'on sait, même sur des personnes étrangères à la fabrication.« Il « suffit quelquefois, nous disait M. Armet de Lisle, de stationner dans

«l'usine, pour contracter la maladie; a et, à ce propos, nous ne pouvons résister au désir de transcrire ci-après la note qu'il nous a remise et qui relate des faits curieux, que nous croyons inédits : « De trois frères .du même père et de la même mère, l'un, l'aîné « reste dix ans sans rien avoir ; le plus jeune, depuis trois ans, n'a « pas encore été atteint; le second, attrape la maladie au bout d'un « mois, quitte la fabrique et reste un an ou quinze mois sans vivre « avec ses frères. Au bout de ce temps, donnant la main à un voiturier de l'usine pour décharger une voiture de toiles (enveloppes

INFECTION DE L'ATMOSPHÈRE GÉNÉRALE.

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sont que d'une faible importance les autres sont en même temps nuisibles au voisinage et dès lors seront examinées dans la seconde partie de ce travail (*).

II. INFECTION DE l'ATMOSPHÈRE GÉNÉRALE.

La législation des établissements insalubres est fondée, en France, sur le système préventif. Ils sont soumis, on le sait, à la condition de l'autorisation préalable, ce qui entraîne habituellement pour chaque usine des prescriptions d'ordre technique auxquelles elle est tenue de se « des ballots de quinquina), il est repris de la maladie, qui le tient « huit jours au lit avec les yeux fermés. « Une .servante travaillant,présde l'usine, est forcée de quitter la « maison.

Plusieurs ouvriers prenant des vêtements ou des outils de leurs « camarades, sont malades, pour deux, trois et quelquefois huit e jours.

« un ancien ouvrier passant sur la berge, l'usine étant ouverte, « est repris de la maladie pendant deux ou trois jours. (*) C'est à dessein que nous n'avons pas compris dans notre nomenclature une industrie considérable et qui passe pour insalubre, celle du verdet ou vert de gris (acétate basique de cuivre). Il résulte en effet des renseignements qui nous ont été fournis sur les lieux, que, bien que le verdet pris à une certaine dose soit un poison redoutable, les manipulations auxquelles il donne lieu, dans la pratique industrielle, sont sans danger sérieux pour les ouvriers. L'absorption lente et quotidienne de ce corps paraît plutôt favorable à la santé, et semble agir efficacement, chez les femmes, pour

combattre la chlorose. Le seul détail insalubre, à un degré peu grave, d'ailleurs, est celui des poussières engendrées par le maniement des cuivres ayant déjà servi. Aucune mesure spéciale n'a été adoptée : les ouvriers se bornent à nouer quelquefois -un mouchoir sur leur nez et leur bouche. Cette manière de voir est partagée par des hygiénistes distingués de Montpellier, MM. Pécholier, Saint-Pierre, Dumas, etc. Les deux premiers ont publié en 1861i, une fort intéressante étude sur l'hygiène des ouvriers employés à la fabrication du verdet, et arrivent à cette conclusion : « Au point de -vue de l'hygiène publique, la « fabrication du verdet est absolument sans inconvénients. »