Journal des Mines (1798-99, volume 9) [Image 210]

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SUR LA MINÉRALOGIE

les voir assurer que les énormes rochers du haut desquels tombe cette immense cataracte , la plus effrayante et la plus admirable en même temps qu'on connais.se , sont aussi calcaires. Ce vaste fleuve de Saint-Laurent , un des plus .grands monde, et qui là occupe cent fois plus d'espace que le plus grand fleuve d'Europe , et qui tombe -d'une hauteur prodigieuse , trouve-t-il donc dans la nature de cette pierre assez de résistance pour n'avoir pu l'user depuis les milliars de siècles que vraisemblablement il y coule ? quelle merveilleuse.

pierre calcaire est-ce donc ? Nos voyageurs n'en disent rien , sinon qu'elle est dure et blanche mais ils ajoutent que l'effort du fleuve en a détaché

d'énormes blocs, ou plutôt des rochers énormes, qui sont tombés dans le vaste bassin qu'il s'est creusé ; qu'un d'eux a eu la hardiesse , au risque de périr , les reconnaître. Mais ce qu'ils disent ensuite ferait douter du tout : car ils ne font pas de difficulté de donner beaucoup de ces rochers pour être du gypse , qu'ils nomment sulfate de chaux; et on conçoit assez qu'une telle matière ne saurait résister long -temps sans se dissoudre entièrement. Sur cela je dis encore, comme l'ayant appris de Guettard lui-Même , que les premiers échantillons qui lui ont été présentés comme venant de cette cascade , ont été reconnus pour étre une espèce de grès , mais uni avec de la terre calcaire, ce qui n'exclut pas la solidité ; car l'union de la terre calcaire avec la quartzeuse forme le plus

communément une sorte de ciment d'une grande solidité. Cette union n'est pas un simple assemblage , mais une cristallisation parfaite , où Peau a pris corps elle-même. Alors on conçoit qu'une. telle pierre peut , à peu près comme le quartz

DE L'AMÉRIQUE SEPTENTRIONALE.

413 quelque grands qu'ils, résister aux efforts de l'eau ,

soient, pendant bien long -temps. Nous disons

simplement pendant bien long-temps , parce- que tôt ou tard il faut que tout s'use et périsse. L'excavation que le fleuve Saint-Laurent a faite dans les énorines rochers où il passe , annonce déjà cette destruction successive; et vraisemblablement après quelques milliers de siècles , cet énorme fleuve aura tout aplani , et coulera librement en

plaine, ou par une pente douce. D'après ce que, nous venons de rapporter, on

voit qu'en descendant le fleuve Saint-Laurent, ou en suivant son cours vers Montréal et Québec

et de là à la mer, on doit perdre peu à peu le

pays calcaire, et atteindre peu à peu le pays primitif, ou granitique. Il paraît qu'on n'aperçoit pas encore ce second pays vers Montréal , qui

est une île formée par les atterrissemens du fleuve t mais de là à Québec on le reconnaît facilement sur ses bords ; c'est d'abord du schiste, de la, pierre

calcaire primitive, ensuite du quartz , après cela le granit pur. Il paraît cependant que Montréal est encore sur le pays calçaire, puisque ses maisons sont bâties en pierre calcaire. C'est sur-tout à l'île.

Sainte - Hélène , placée un peu au - dessous de

Montréal , que le roc vif de granit se Montre

mais auprès de lui il s'en trouve une autre sorte et tout-à-fait sur le rivage , qui paraît être secondaire; car on y découvre des poudingues, c'est-à. dire, la réunion d'anciennes parties de granit avec des galets ou cailloux anciens, avec de grands blocs de quartz et de granit vifs et primitifs, qui semblent avoir été détachés de leurs lits naturels qu'on ne peut Plus reconnaître. Mais ce qu'il faut ici admirer , est que le dessus de ces roches , qui Dd