Annales des Mines (1869, série 6, volume 16) [Image 42]

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EMPLOI DES EAUX D'ÉGOUT EN AGRICULTURE.

PROCÉDÉS AGRICOLES.

Un point de la plus haute importance, sous le double rapport de la salubrité et du rendement, c'est l'assèchement du sol qui reçoit les eaux d'égout. La plupart des inconvé-

nients dont on s'est plaint au voisinage des irrigations tiennent à ce que les moyens d'écoulement sont insuffisants; les liquides forment alors des flaques marécageuses qui exhalent des odeurs insupportables. La première condition est donc que la surface du sol soit bien réglée et que l'excédant des eaux s'en écoule librement. Quant à la por-

tion qui pénètre à l'intérieur, on ne doit pas hésiter

à

recourir au drainage pour peu que la perméabilité du sol ou la disposition des couches sous-jacentes laisse à désirer.

En thèse générale, il est bon que la plus forte proportion possible d'eau passe à travers le sol comme à travers un filtre ; on est sûr ainsi que la séparation des matières en suspension se fait mieux et que les éléments clissons subissent eux-mêmes plus directement l'action de la racine des plantes. Si l'on a recours au drainage, il ne faut pas perdre de vue que les drains profonds sont les plus efficaces, parce qu'ils favorisent davantage la circulation de l'air, si nécessaire ici pour brûler la forte proportion de matières organiques charriées avec les liquides. Quand la configuration du

terrain le permet, l'eau sortant des drains peut être appliquée avantageusement à trois ou quatre arrosage successifs on la purifie ainsi plus complètement. Car c'est encore là un des points qui ont donné lieu à réclamations ; on a souvent attribué à l'inefficacité des irrigations un manque

de pureté qui tenait uniquement à ce que les liquides avaient passé trop vite sur les prairies. Reste enfin la question de l'emplacement. S'il est vrai, comme nous l'avons dit, que la nature géologique du sol crée rarement un obstacle, en revanche , il est d'autres considérations qui restreignent le choix. Ainsi l'on doit

éviter, pour diverses raisons, de se placer dans le voisinage des villes ; car bien que les irrigations convenablement

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conduites développent peu d'odeurs, il faut cependant prévoir le cas où, par suite de négligences ou d'accidents fortuits, des inconvénients viendraient à se produire. D'ail-

leurs quand on opère sur les eaux d'une grande ville et qu'on arrose par conséquent une grande surface, un tel voisinage, ne fût-ce qu'à raison de l'humidité, ne saurait être indifférent. En outre, les nappes d'eau souterraines risquent d'être souillées par les infiltrations, et les puits domestiques, si le sol est très-poreux, peuvent être mis tout à

fait hors d'usage. A un autre point de vue, celui du haut prix des terrains, on a grand intérêt à fuir les lieux peuplés : « La dépense d'achat de la terre, disent les commissaires de 1866, peut faire plus que compenser les frais d'accroissement de conduite et ceux de l'élévation mécanique des eaux même à une hauteur considérable (*). Si

tout le terrain qui avoisine la ville est bâti et qu'on ne puisse en acquérir qu'à un prix inusité, cela ne crée point « un obstacle, il faut seulement aller plus loin pour cher« cher un emplacement où le sol ait moins de valeur. Le conseil de salubrité de Croydon, ainsi qu'il ressort de la déposition du président et de l'ingénieur, est tout prêt, « s'il ne peut renouveler à des conditions raisonnables le bail de la ferme de Beddington, à pomper son eau d'égout à i5o pieds (45 mètres) de haut pour dominer le terrain dans un rayon étendu.

Quand on est obligé de relever les eaux à l'aide de pompes, il convient, ainsi que le fait le conseil métropolitain de Londres pour le service de ses égouts, d'éliminer de (*) L'élévation mécanique des eaux d'égout de Londres ne revient pas à plus de i centime par mètre cube porté à 75 mètres de haut. Or, i centime ne représente pas le dixième de la valeur commerciale des eaux d'égout. Quant aux frais de conduite, ils sont encore moins considérables, surtout quand on opère sur de grands volumes de liquides. Ainsi, à Londres, l'établissement de l'aqueduc destiné à conduire l'eau d'égout au bord de la mer ne la renchérira pas de 5 minimes par mètre cube et par myriamètre de parcours.