Annales des Mines (1869, série 6, volume 15) [Image 22]

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NOTICE SUR P. BERTHIER.

NOTICE SUR P. BERTHIER.

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humide un travail semblable que certaines circonstances, entre autres la suspension d'affaires de son éditeur, et la crainte que l'ouvrage ne fût pas à la hauteur des découvertes les plus récentes, l'ont malheureusement empêché de publier. Pour donner une idée de l'activité avec laquelle Berthier servait la. science par tous les moyens il convient encore de rappeler qu'il n'enrichissait pas seulement les Annales des mines par des mémoires originaux, mais aussi par des extraits,qui enregistraient annuellement tous les progrès de la minéralogie, de la chimie et de la docimasie. Ces extraits, commencés en 1816, ont paru jusqu'en 1848, c'est-à-

dire pendant plus de trente ans (*). Personne n'a jamais fourni à ce recueil un tel contingent. Chacun de ces extraits est souvent très-court ; mais les traits saillants y sont toujours donnés de la manière la plus substantielle et la plus concise.

Les découvertes dont il vient d'être rendu un compte succinct, montrent assez combien Berthier excellait comme homme de science, embrassant les applications nombreuses et variées de la chimie. Ce qui rehausse encore son mérite, c'est qu'il avait toujours été très-imparfaitement servi par la vue, sens qui est

cependant si utile au chimiste. Aussi, quand on le voyait à l'oeuvre, s'étonnait-on qu'il lui fût possible d'arriver à une exactitude irréprochable. D'ailleurs, il n'était pas muni des procédés rapides et puissants d'expérimentation que l'on possède aujourd'hui, pas même de tous ceux que l'on connaissait de son temps. (*) Ces extraits, tirés à part, forment sept volumes; il en existe quatre autres, qui donnent exclusivement les nzémoires et notices chimiques, niinéralogiques et métallurgiques, publiés par Berthier, jusqu'en 1859.

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Son laboratoire, de même que celui de plusieurs autres chimistes éminents, s'est toujours fait remarquer par une simplicité primitive. Il faut ajouter qu'aucun auxiliaire n'assistait le Malte dans les opérations, longues et fastidieuses, qtf entraînent certaines recherches. Il travaillait constamment seul, et

restait ainsi à l'oeuvre, chaque jour, jusqu'à une heure avancée. Son habileté, ses habitudes laborieuses et sa persévérance expliquent comment il a pu être aussi Tee:0nd. On peut encore remarquer que, pendant la plus grande partie de sa vie, Berthier vivait dans l'isolement, sans tirer parti des ressources qu'aurait pu lui offrir un commerce journalier avec d'autres savants. Toutes ces circonstances défavorables ne font que mieux

ressortir le talent, pour ainsi dire d'intuition, qu'il possédait. Quand on parcourt les publications de ce savant éminent,

on remarque, d'abord, la forme extrêmement concise et nette, sous laquelle les faits sont partout présentés. En outre, on ne tarde pas à reconnaître qu'il y efface autant que possible, sa personnalité. Il parle avec une extrême modestie, ne cherchant jamais à faire valoir ses droits de priorité, comme il aurait pu le faire souvent ; on ne voit même pas toujours, s'il est l'auteur du résultat ou s'il parle d'autrui; il écarte -toutes les formes qui pourraient donner de l'éclat au style. Dédaignant la popularité, il n'est préoccupé que d'un but. la connaissance de la vérité.

C'est surtout par l'esprit de critique avec lequel Berthier discute les résultats directs de ses expériences, et par les conclusions qu'il sait en tirer, qu'il manifeste la fermeté et la pénétration de son jugement. Il est partout sobre d'hypothèses et de conjectures, éminemment circonspect et rigoureux. Cependant, doué d'un esprit à la fois profond et étendu, il sait toujours faire ressortir les conséquences à