Annales des Mines (1860, série 5, volume 18) [Image 284]

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AFFINAGE DE LA FONTE

deux ans environ, dans une forge de Suède. Fort de l'expérience acquise, M. Bessemer exposa, le 24 mai 1859, devant l'Association des ingénieurs civils de Londres les résultats obtenus, et présenta, à l'appui de ses assertions, de nombreux échantillons de fer et d'acier affinés par sa méthode. Il fit connaître sommairement le procédé lui-même et les avantages qui devaient en résulter. Quelques doutes furent encore émis par divers membres de l'Association ; on rappela spécialement le complet insuccès des premiers essais; mais les faits annoncés par M. Bessemer furent formellement confirmés par le directeur de l'arsenal de Woolwich, le colonel E. Wilmot, qui avait été chargé officiellement de suivre les essais et d'éprouver les produits nouveaux. Ce dernier, comme M. Bessemer, avoua d'ailleurs que la méthode n'était pas applicable aux fontes sulfureuses et phosphoreuses; que les échecs subis à l'origine prove-

naient de là, mais qu'en traitant des fontes pures,

même siliceuses, la méthode Bessemer bien appliquée donnait réellement des produits excellents et à des prix relativement bas. Ce qui confirme d'ailleurs ces expé-

riences, c'est que d'autres forges, à la suite d'essais répétés, montent également les appareils destinés à pratiquer en grand la méthode nouvelle. Ainsi, en juin

dernier, je vis les usines de la compagnie de Weardale (Durham) se mettre en mesure d'affiner leurs fontes

par le procédé Bessemer. Ces fontes s'obtiennent en

traitant, aux hauts-fourneaux de Towlaw,, les fers spathiques et les mines douces manganésifères qui se rencontrent en filons dans le calcaire carbonifère de Stanhope et d' Allenhead. En France, M. Jackson, de Saint-Seurin, a affiné par la même méthode, pour acier fondu, les fontes blanches

manganésifères provenant des hématites brunes de

PAR LE PROCÉDÉ BESSEMER.

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Vicdessos. La méthode Bessemer se trouve donc déjà bien réellement dans la phase de son application industrielle et, par ce motif, je vais tâcher, soit d'après le mémoire de M. Bessemer, soit d'après les renseigner ments verbaux que je dois à l'obligeance de M. Piccard, ingénieur de M. Jackson de Saint-Seurin , de faire connaître l'état présent de la méthode nouvelle. Observons d'abord que M. Bessemer affirme dans

son mémoire qu'il peut produire indifféremment de l'acier on du fer fondu ; que c'est tout simplement une question de temps ou de quantité de vent. Toutefois il résulte des renseignements que m'a fournis M. Piccard que la production régulière du fer doux serait difficile; il ne demeurerait pas toujours à l'état fluide et formerait parfois des loups, du moins lorsqu'on n'opère pas sur des masses assez fortes. Au reste, comme l'affinage pour fer est nécessaire-

ment plus coûteux, puisque la durée de l'opération, le vent absorbé et surtout le déchet sont plus considérables, et que l'acier a d'ailleurs une ténacité à peu près double, il est bien évident que le procédé Bessemer ne

sera, dans tous les cas, généralement appliqué qu'en vue de la fabrication de l'acier fondu. Lorsque M. Bessemer eut reconnu que sa méthode ne pouvait s'appliquer aux fontes sulfureuses et phosphoreuses, il eut d'abord recours aux meilleures fontes de Suède, et c'est encore elles qu'il affine dans son appareil lorsqu'il veut obtenir de l'acier de première qualité pour la coutellerie ; il réussit également en se servant de fontes au bois, venant des Indes et de la NouvelleÉcosse (1). Il traita ensuite les fontes au coke provenant (i) Ces mêmes fontes sont puddlées pour acier à Sheffield par la maison Came! et Compagnie.