Annales des Mines (1857, série 5, volume 11) [Image 109]

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RÉSUMÉ DES ORSERVATIONS RÉCENTES

par la fusion de la glace provenant de la température du milieu ambiant. Ces deux forces, l'une de propulsion, l'autre de fusion, ne sont pas, dans la nature, dans un état d'équilibre parfait. Il y a des années où l'une des deux forces l'emporte sur l'autre; ainsi dans les années froides et humides de 1816 et 1817 on a remarqué que tous les glaciers des Alpes ont eu un avancement extraordinaire, parce que la quantité de neige tombée dans les hautes régions, c'est-à-dire l' alimentation a été surabondante, elle l'a emporté sur la fusion, il en est résulté un envahissement remarquable de la partie inférieure des glaciers. Dans les années chaudes et sèches, c'est la fuglasion qui l'emporte sur l'alimentation, le front des ciers recule. Ainsi, par les lois de la dynamique qui s'appliquent à tous les corps en mouvement, les glaciers, en vertu de leur poids, avancent constamment dans les régions inférieures, avec une vitesse résultant de la combinaison des masses ou de l'épaisseur des sections avec les pentes et la structure plastique du solide en mouvement. Arrivés au talus terminal ces forces expirent pour ainsi dire en présence d'un nouvel élément, la force dissolvante du milieu qui résout définitivement le glacier en eau. D'après cela on voit qu'un glacier n'est pas composé d'une masse homogène de glace, semblable à celle d'une rivière ou d'un lac, qui subirait sur un plan incliné un

mouvement de translation uniforme d'un point à un autre. On vient de voir que toutes les parties d'un gla-

cier sont animées d'un mouvement différentiel,

les

bords et les extrémités marchent plus lentement que le centre. Dans cette faculté qu'il possède de se déplacer proportionnellement aux masses et aux pentes, comme un cours d'eau dans un chenal, la structure intime in-

SUR LES GLACIERS.

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tervient comme élément important. Il est composé d'une infinité de petits fragments qu'on pourrait presque appeler moléculaires, ils sont mobiles les uns par rapport aux autres, comme une masse pâteuse semi-fluide, ils se moulent et se plient à tous les caprices du sol ; aussi l'expression de masse plastique adoptée par M. Forbes rend exactement cette propriété remarquable des glaciers.

progression Ce serait le cas de faire remarquer ici que dans ce De laséculaire Alpes, à ma condes glaciers. moment presque tous les glaciers des je n'en connais naissance, sont en voie de progression ; qu'un, celui de Finelen dans la vallée de Zermatt, qui paraît être stationnaire ; les autres glaciers de cette vallée, celui de Gôrner entre autres, avance rapidement, il pénètre dans des champs cultivés, il atteint des chalets dont la construction remonte à plus de trois siècles; celui de Zmutt est dans le même cas, il ravage une forêt de mélèzes d'une haute antiquite, il renverse de ces arbres par milliers. Le glacier d'Aletsch par son mouvement de progression, attaque et détruit sur ses deux rives près de son extrémité inférieure, de grandes quantités de bois de sapin et de mélèze. Le glacier du Rhône est en voie de progression, il démolit et nivelle le terrain occupé par une ancienne mo-

raine.

Les deux glaciers de l'Aar, ceux de Grindelwald et plusieurs autres, sont dans le même cas. D'après les observations que j'ai entendu faire à M. Robinet, sur le voyage du prince Napoléon, les glaciers du Groenland, ceux de la côte du Labrador, ceux du Spitzberg, sont comme ceux des Alpes en voie de progression formidable. Ainsi en moyenne l'équilibre n'existe pas, l'alimenta-

tion l'emporte sur la fusion.