Annales des Mines (1853, série 5, volume 4) [Image 48]

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EXPLOSION DU BATEAU A VAPEUR

poussé au large, et avant la mise en train des machines. L'examen des soupapes de sûreté lors du sauvetage de la chau-

dière n'a fait reconnaître aucune trace de calage ; seulement les leviers des deux soupapes postérieures avaient été pliés par la secousse à l'endroit du guide, tous deux dans le même sens, et cette secousse avait été assez violente pour arracher et projeter au loin le poids du levier de tribord, poids qui n'était pas suspendu comme il est d'usage à l'extrémité de ce levier, mais solidement attaché à celui-ci par un fort anneau en fil de fer. En raison de la disposition adoptée pour le chauffage, un manque d'alimentation n'eût probablement donné lieu qu'à un coup de feu dans les ciels des boîtes à fumée et dans les tubes des rangées supérieures, ce qui, au moins pour les tubes,

arrive très-fréquemment dans les chaudières tubulaires à flamme directe (nous ne parlons pas des ciels des foyers, qui sont toujours très-fortement armés dans ces dernières chau-

dières, de sorte qu'ils brûlent souvent sans qu'il en résulte aucune explosion), et ne produit ordinairement que des fuites sans autre accident plus grave. Dans la chaudière du Parisien

n" 5, ces parties ont d'ailleurs été retrouvées parfaitement saines ; on ne saurait donc admettre que soit avant, soit pendant le stationnement, aucune partie de la chaudière exposée à l'action du feu ait été émergée, et ait subséquemment par son contact avec l'eau donné naissance à la production instantanée d'une grande quantité de vapeur. En résumé, il paraît certain que l'explosion de la chaudière du Parisien n° 5 ne saurait être attribuée à une contravention aux prescriptions de l'ordonnance réglementaire du 23 mai 1843 ou à celle du permis de navigation du 4 août 1852 , ou à

un défaut d'alimentation, mais uniquement à un vice de construction, c'est-à-dire à l'insuffisance de certaines armatures qui, soumises à une charge permanente susceptible d'altérer leur ténacité, se sont effectivement altérées peu à peu et ont cédé, le à février, sous l'influence d'une cause secon-

daire, influence qui eût pu être négligée pour une chaudière établie dans de bonnes conditions de solidité. Il est plus que probable que ce vice de construction eût dans

tous les cas été mis en évidence par l'épreuve à la pompe de pression, exécutée à une pression triple de la pression effective

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et même seulement sous une pression double. Mais, par suite de

cette idée généralement admise il y a quelques années, que l'explosion d'une chaudière à basse pression est peu à craindre,

et qu'au cas où elle aurait lieu il n'en saurait résulter de graves conséquences, celles de ces chaudières qui présentent

de larges faces planes, c'est-à-dire, en d'autres termes, la totalité des chaudières à basse pression employées sur les bateaux, ont été dispensées de l'épreuve par l'article 28 de l'ordonnance du 93 mai '843. Le maintien de cette dispense semblerait d'autant moins fondé à l'avenir, que précisément avec

la constante 3 introduite dans le calcul des épaisseurs des parties cylindriques, les chaudières à basse pression courent moins de risques de détérioration par cette épreuve que celles à haute pression, lorsque d'ailleurs les armatures destinées à consolider les autres parties de ces chaudières ont été convenablement calculées.

En conséquence, il paraît indispensable d'appeler d'une manière toute spéciale l'attention de M. le ministre des travaux publics sur ce point, et de demander la suppression d'une dispense qui paraît condamnée par l'expérience, et qui, en plaçant

les chaudières à basse pression en dehors du droit commun, prive les commissions de surveillance du moyen de contrôle le plus efficace qu'elles aient à leur disposition pour constater l'état de service de ces chaudières. En terminant ce rapport, il convient d'ajouter que depuis l'accident du h février, la commission de surveillance de Lyon a fait vérifier les conditions des diverses chaudières à basse pression existant encore sur des bateaux à vapeur naviguant sur le Rhône et sur la Saône, et qu'après avoir reconnu qu'elles

paraissaient pouvoir supporter sans altération l'épreuve à la pompe de pression, elle les a successivement fait éprouver du consentement de leurs propriétaires.

(Dans sa séance du s avril i853, la commission de surveillance des bateaux à vapeur de Lyon a approuvé ce rapport et en a adopté les conclusions.) 2° Extrait du rapport fait à la Commission centrale des machines à vapeur, par M. Cation, secrétaire adjoint. Cet accident, qui a occasionné la mort de 6 à 7 personnes, a eu dans le pays un grand retentissement.