Annales des Mines (1843, série 4, volume 4) [Image 321]

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JURISPRU PENCE 642 lE a soutenu d'abord, quant à la compétence, que l'affaire ne devait pas être jugée par la voie contentieuse ; que les parties devaient être renvoyées devant l'administration pour obtenir l'interprétation de l'acte de conces-

sion de l'an Y.

Quant au fond, il a remarqué que les considérations scientifiques, sur lesquelles le conseil des mines s'appuyait, pouvaient avoir une grande valeur en théorie ; mais que ce n'était point là qu'il fallait chercher la solution ; qu'il s'agissait en effet de savoir quel a été réellement l'objet de la concession de l'an Y, abstraction faite de ces systèmes, de ces théories, qui, pour les savants eux-mêmes , peuvent être un sujet de discussions. Que des concessions aient eu lieu, a-t-il dit, dans des pays voisins pour des matières identiques avec le calcaire bitu-

mineux de Seyssel ; ,qu'en France même, il existe des concessions analogues ; que des privilèges aient été accordés anciennement pour l'importation de matières à pPU près semblables ; que la science ait varié dans ses acceptions à l'égard du bitume ; que son vocabulaire soit encore à déterminer aujourd'hui ; tout cela paraît avoir peu de rapports avec le débat qui est soulevé. La question est plus simple. Qu'est-ce que M. Secrétan a demandé? qu'estce qu'on lui a concédé ? Ensuite, quel était l'effet de la loi

de 1791.? quel est celui de la loi de 1810? Résulte-t-il implicitement ou explicitement de la loi

de 1791 que le calcaire bitumineux de Seyssel fasse partie de la concession de l'an Y? Le sieur .Secrétan avait découvert une mine d'asphalte: Que cette dénomination fût d'accord ou non avec le langage de la science, l'objet de cette découverte n'en était pas moins parfaitement connu et expliqué. Le nombre des couches était de sept. La mine est décrite comme recouverte d'un banc de terre argileuse et en partie pétrifiée, reposant sur un lit de sable noir et mélangé de bitume, au-dessous duquel est un autre banc

de pierre argileuse, le tout encaissé par un rocher de

pierre calcaire. Ce sont des grains sableux agglutinés par du bitume , et ce bitume , lorsqu'on fait chauffer le minerai dans l'eau en ébullition, se détache et vient nager à la surface du liquide ou s'appliquer aux parois du vase sous forme d'enduit. On peut le recueillir ainsi pour l'employer ou le livrer au commerce. C'était en effet de cette manière que le sieur Secrétan obtenait du bitume, en ti-

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rait parti. Sa correspondance avec l'ancien conseil des mines en t'ait foi. On y voit que la substance dont on demandait la concession, était. clairement et nettement définie, de même que ses produits et leur emploi. L'arrêté du 21- frimaire an 2 accorde provisoirement au sieur Secrétan la concession de la mine d'asphalte par lui découverte. Ces termes indiquent qu'on n'entend concéder que ce qui a été découvert réellement, que ce qui a fait l'objet de la demande. La concession définitive instituée en l'an Y, après l'accomplissement des formalités prescrites par la loi de 1791, s'applique toujours àla même substance, à elle seule. Quatre ans après, on fait mention d'une couche de calcaire qui n'est plus cet asphalte dont parlent les arrêtés ci-dessus rappelés. Si le bitume est agrégé à la roche c'est dans de très-faibles proportions. On ne peut l'en retirer

par les procédés fort simples qu'on vient d'indiquer.

L'extraction exigerait des 'réactions chimiques , des combinaisons très-coûteuses. Ainsi commercialement parlant, elle est impossible. Cela explique très-bien comment le sieur Secrétan , en l'an IX, ne retira point le bitume du calcaire dont il s'agit. comme il le fàisait de l'asphalte, objet de la concession.

Plus tard , les successeurs du sieur Secrétan ont ap-

pliqué ce calcaire à un autre usage. On l'enlève par blocs, on le brise , et en y mêlant une certaine quantité de bitume minéral ou de goudron provenant non pas de Seyssel , mais de Bastennes ou autres lieux, on en compose un mastic ou ciment qui sert aux dallages et à divers objets de construction. Ainsi, ce qui avait été concédé en l'anY,

c'était une matière dont on retirait du bitume, qui en contenait beaucoup, qui était, sous ce rapport, d'une exploitation facile ; peut-on, dès lors, admettre que la concession comprend une matière qui n'en produit pas, ou qui, du moins , n'en pourrait produire qu'avec des frais tels qu'on n'y doit pas songer ? D'une part, il s'agissait de couches qui plongeaient généralement dans la terre, qu'on exploitait souvent par galeries. De l'autre, il s'agit d'une roche qui existe à la surface , dans les parties élevées, qui n'a rien de commun avec la mine concédée, qui n'en est pas l'affleurement, qui en diffère par sa nature, par ses propriétés , par son gisement.