Annales des Mines (1842, série 4, volume 1) [Image 389]

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JURISPRUDENCE 776 concession de sel, c'est donc en réalité exploiter cette concession ; c'est ainsi que le conseil d'État a décidé, en 1834 ( ordonnance du 17 avril ) , que les sources ou puits d'eau salée sont, comme les mines de sel, susceptibles de concession. Suivant l'expression heureuse de M. de Gasparin (1), l'eau qui se sature de sel est un mineur que l'on attache à

la mine et qui l'exploite plus ou moins régulièrement mais en formant une excavation dans sa masse, d'où il suit, comme on l'a parfaitement expliqué, que la concession de la mine, c'est-à-dire le droit d'exploiter un certain périmètre, est exclusif de la faculté d'un second exploitant libre qui ne serait soumis ni aux charges, ni aux indemnités , ni aux redevances que la loi impose aux concessionnaires (2). » Nous n'avons point , continuait le ministre, à discu.

ter ici la question de savoir si l'on a bien ou mal fait

d'instituer la concession de 1825. Il a été question plusieurs fois de revenir sur ce qui s'est fait alors ; mais des difficultés nombreuses se sont présentées. Quelles que soient les opinions à ce sujet, la concession existe : tant qu'elle ne

sera pas rapportée , on doit en maintenir toutes les conséquences. Vainement M. Parmentier essaye-t-il de repré-

senter l'autorisation accordée à la compagnie de Saltz-

bronn , le 28 décembre 1825. comme une preuve que cette concession n'est point exclusive de l'exploitation des eaux salées. Je répondrai que le puits de Saltzbronn faisait partie d'une vente nationale ; qu'un décret du 19 avril 1806

maintint cette vente, à la charge par les propriétaires de se conformer aux dispositions de l'arrêté du 3 pluviôse an 6 sur les sources salées ; qu'après divers incidents une ordon-

nance du 13 janvier 1816 reconnut de nouveau le titre de propriété, et renvoya les requérants à se pourvoir devant le ministère de l'intérieur, à qui il appartenait de proposer l'ordonnance de permission d'exploiter, soit d'après tes formalités déjà remplies, soit en procédant à une nouvelle information ; que la demande fut instruite conformément aux articles 1 et 2 de l'arrêté de l'an vu et aux sections 4 et

5 de la loi du 21 avril 1810; que les comités réunis de (i) Rapport de la commission de la chambre des pairs, du Io juillet 1831, page 34. (2) Voir aussi sur ce sujet l'opinion de M. Gay-Lussac, ci-aprés , page 781.

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l'intérieur et des finances du conseil dÉtat jugèrent que cette loi était applicable à l'espèce , et qu'enfin l'autorisation fut accordée le 28 décembre 1825, après un mûr examen. M. Parmentier s'étonne qu'on l'ait donnée après la concession, mais une fait pas attention qu'un droit acquis existait en faveur de Saltzbronn ; que le décret de 1806 et l'ordonnance de 1816 avaient déjà reconnu ce droit. La concession de 1825, faite au domaine, ne pouvait l'anéantir, et l'on a dû le consacrer. L'équité le voulait ainsi , nonobstant les réclamations de l'ancienne compagnie des salines de l'Est, nonobstant celles que pourrait élever la nouvelle compagnie, et qu'elle a en effet présentées , mais sans suc-

cès. Du reste, en accordant l'autorisation on imposa

comme la demande l'indiquait elle-même , la limite d'une fabrication annuelle de 20,000 quintaux. Au delà du droit ainsi défini , il y aurait eu contravention , et l'on devait

garantir le domaine contre tout accroissement de cette production. C'est par cette raison que, lorsque en 1833 les propriétaires de Saltzbronn demandèrent l'autorisation de fabriquer 40,000 quintaux métriques., au lieu de 20,000, le ministre du commerce et des travaux publics rejeta cette demande. Une décision semblable intervint sur une autre demande présentée par un propriétaire da département de la Meurthe , qui désirait exploiter un puits salé existant dans son terrain. Le ministre considéra que la concession faite au domaine ne le permettait pas. » M. Parmentier fait une interprétation bien peu exacte, on vient de le voir, de l'autorisation donnée en 1825 à la

compagnie de Saltzbronn. C'est précisément parce que cette exception, cette unique exception a été faite depuis la concession du domaine, que celle-ci a conservé désormais, dans toute leur étendue, des droits qui n'avaient pu se mo-

difier qu'en présence d'un autre droit antérieur au sien. Celui-ci reconnu et consacré, toute prétention qui n'avait pas des titres pareils à faire valoir devait succomber. Le fait seul de la concurrence légitime de Saltzbronn a porté

un grand dommage à la compagnie des salines et mines de

sel de l'Est, et a même amené des modifications dans le prix du baiI qui lui avait été fait en 1825. Que serait-il arrivé si l'Etat qui venait de traiter avec elle l'eût laissée sans défense contre des agressions multipliées ? Il lui devait protection, et en cela il se défendait lui-même ; car la concession appartient au domaine. La compagnie qu'il s'est