Annales des Mines (1841, série 3, volume 20) [Image 330]

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JURISPRUDENCE 65o d'après l'article 19, une propriété tout à fait distincte de la superficie, un bien nouveau sur lequel des hypothèques peuvent être assises indépendamment de celles qui auraient été prises sur la surface et la redevance. Et si c'est le propriétaire du sol qui obtient la concession, on règle pareillement, d'après le même article 19, la redevance qui doit

lui être attribuée, attendu qu'il est dès lors considéré comme propriétaire de deux biens entièrement séparés.

Il suit de ces dispositions que lorsqu'un propriétaire vend son terrain, ou quand, par l'effet d'une saisie immobilière, ce terrain passe entre les mains de son créancier, le droit à la redevance sur le produit des mines qui existeraient dans le tréfonds est dévolu au nouveau propriétaire, de même que l'immeuble vendu ou saisi. Et cela doit avoir lieu encore bien que l'ancien possesseur eût déjà commencé à exploiter le gîte minéral et eût même reçu une permission provisoire. Car tant qu'il n'a pas obtenu la concession, la mine n'est pas sa propriété; le seul droit qui lui appartienne, c'est le droit à la redevance. Ce droit, il peut sans doute se le réserver ou le céder à un tiers ; mais s'il n'a pas fait de telles conventions, s'il n'y a pas de séparation préexistante, il le perd dès qu'il aliène son terrain ou que ce terrain devient la possession de ses créanciers ; ce sont ces derniers ou l'acheteur qui en héritent.

Les tribunaux ont jugé en ce sens dans l'espèce suivante. M. Dubouchet était propriétaire, dans la commune de St-Paul-en-Jarret, département de la Loire, d'un terrain dans lequel' existe une mine de houille. Il s'était associé en 1809 avec quelques personnes pour exploiter cette mine, et avait obtenu du préfet une permission provisoire. On se trouvait alors sous l'empire de la loi du 28 juillet 1.791, dont l'article 8 portait que les concessions on permissions d'exploiter seraient accordées par le département, sur l'avis du directoire du district, et ne seraient exécutées qu'après avoir été approuvées par le gouvernement. M. Dubouchet ne se mit point en mesure d'obtenir cette approbation qui était nécessaire pour valider sa permission. En 1812 son domaine fut saisi pour dettes, et adjugé à l'un de ses créan-

ciers, M. Perlier. Ni dans le procèsverbal de saisie, ni dans le jugement

DES MISES.

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d'adjudication, il ne fut fait mention, ni par conséquent réserve du droit de tréfonds. En 1825, un grand nombre de concessions furent instituées dans le bassin houiller de la Loire. La mine dont il s'agit fut comprise dans ces concessions et accordée à une

compagnie dont M. Perlier, dernier propriétaire du domaine de M. Dubouchet, faisait partie. M. Dubouchet prétendit avoir droit à la redevance que l'acte de concession avait réglée au profit des propriétaires du sol. Il s'appuyait sur ce qu'avant que son domaine eût

été saisi et adjugé à M. Perlier, il avait formé une association pour exploiter la mine, et reçu une permission provisoire ; qu'il avait aini acquis des droits sur le gîte minéral. Il en concluait que la propriété de la mine avait été séparée de la superficie antérieurement à la saisie, et que par conséquent celle-ci n'avait point comp:is le tréfonds et les droit qui y étaient attachés. M. Perlier soutint au contraire que c'était à lui à percevoir la redevance puisque le terrain lui appartenait. Un premier jugement décida en sa faveur. M. Dubouchet appela devant la cour royale de Lyon, qui statua comme les premiers juges, attendu en droit « que la saisie d'un immeuble, à moins d'énonciation contraire ou de séparation préexistante, s'applique au tréfonds comme à la superficie ; que vainement, clans l'espèce, on articulait l'existence de la séparation du tréfonds

» d'avec la superficie; crue cette séparation ne pouvait » résulter ni de la concession provisoire accordée par le préfet de la Loire, ni des actes d'association produits dans » la cause ; qu'en effet l'efficacité de la prétendue concession

» dépendait, d'après les termes mêmes de son obtention,

» de l'approbation du gouvernement, approbation qui n'avait été ni obtenue ni demandée.» M. Dubouchet s'est pourvu en cassation, en soutenant qu'il y avait eu violation de l'article 552 du Code civil et des dispositions des lois des 28j uillet 1791 et 21 avril 1810.

Ce pourvoi a été rejeté par un arrêt du 14 juillet 1840, ainsi conçu

(La cour, » Attendu que l'arrêt attaqué n'a point décidé d'une

» manière absolue que la propriété du sol emporte la pro» priété du dessus et du dessous, mais seulement que la » saisie d'un immeuble, à moins d'énonciation contraire