Annales des Mines (1913, série 11, volume 2, partie administrative) [Image 304]

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cela a lieu dans la plupart des mines du bassin du Gard, de reporter au 25 ou à la fin du mois le paiement du salaire delà première quinzaine, il convient de décider que la provision doit subir la même règle et n'être payée qu'à la fin de la quinzaine suivante ; Attendu que cette manière de voir est conforme : 1° au désir du législateur; 2° à l'ordre qui doit régner dans les industries et qu'on n'a pas voulu atteindre; 3°enfin à l'équité ; Qu'elle peut facilement se justifier non seulement d'une façon générale, mais plus particulièrement pour le bassin du Gard; Attendu, en effet, qu'elle est conforme au désir du législateur qui a voulu assimiler complètement le paiement de l'indemnité journalière et, par suite de la provision, à celui du demi-salaire;: Attendu qu'étant donné l'organisation actuelle du travail dans les mines du bassin du Gard, il serait difficile d'agir autrement, et de payer le demi-salaire ou provisions d'une quinzaim immédiatement à la fin de cette quinzaine; qu'il ne faut pas oublier que, dans les mines de ce bassin, le travail est générales nt fait à la tâche, qu'il faut donner aux agents surveillants le 1 s de relever ce travail, d'en faire le toisé, d'y appliquer le prix convenu avec chaque équipe d'ouvriers, de permettre aux comptahles de l'entreprise d'en calculer la valeur, d'en faire 1; répartition entre les divers ouvriers d'un même chantier, en tenant compte des différences de gain fixées entre les diverses catégories et de faire le compte de chacun en déduisant les retenues pour retraite, caisse de secours, saisies, etc. Attendu que, pour pareil travail, l'on comprend facilement qu'une quinzaine n'est point de trop lorsqu'il s'agitde calculer ainsiMe salaire de plusieurs milliers d'ouvriers, et que, d'autre part, pour calculer l'indemnité journalière, il faut connaître le salaire du dernier mois et attendre que le calcul du salaire delà quinzaine soit terminé; Attendu que, de ce qui précède, on est appelé à conclu ■ que l'indemnité journalière sera payée comme le salaire après une attente de quinze jours, attente qui sera la même pour la provision qui, aux termes de l'article 16, doit subir le même sort; Attendu qu'il est difficile d'admettre qu'on peut procéû rautrement et faire le toisé d'un chantier chaque fois qu'un accident survient ; que ce serait tout désorganiser pour arriver à un résultat négatif; car on obtiendrait ainsi d'obliger les agents surveillants et les comptables à faire deux fois et même plus le calcul des salaires d'un chantier dans une même quinz ine et

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par conséquent à doubler et à tripler leur tâche, et, par suite, à retarder l'instantoù les salaires seraient connus et où pourraient être calculées les indemnités journalières ; Attendu qu'à cette question d'ordre dont il vient d'être parlé, on ne saurait apporter une question d'humanité, en prétendant qu'on fait attendre à l'ouvrier son demi-salaire à un moment où il a le plus besoin de ses ressources; que l'idée d'humanité, au contraire, est conforme à l'esprit de la loi dont elle a été l'inspiratrice ; J Qu'en effet, il ne faut pas perdre de vue que l'ouvrier victime d'un accident peut, sans inconvénient,,attendre le paiement de son indemnité journalière, car, précisément, avec le système du paiement différé, il a, au moment où un accident peut lui arriver, des arrérages de salaire à toucher, et s'il attend quinze, vingt, vingt-cinq jours ou même plus, pour recevoir son indemnité journalière, il aura, dans l'intervalle, perçu les salaires arriérée qui lui auront permis de vivre, ainsi que les siens, pendant celte-période d'attente; Qu'il arrivera, de plus, lors de sa guérison.à reprendre le travail, après la liquidation de sa dépréciation, touchant à ce-moment des indemnités de chômage et jouissant à nouveau du crédit que trouve toujours celui qui travaille, et qu'il a franchi une période difficile de la vie sans voir ajouter à ses souffrances physiques la privation de sa famille; Attendu qu'en l'état de cesraisons qui paraissent être celles du législateur, on ne saurait admettre les prétentions de l'ouvrier Sylvain ; Attendu que les dépenses suivent le sort du principal; Par ces motifs : Le tribunal, jugeant en matière sommaire, en dernier ressort, ouï le ministère public en ses conclusions orales, après en avoir délibéré, casse et annule le commandement du 24 janvier 1913 ; dit qu'il a procédé pour une somme non due à cette dernière date; dit qu'à ce moment il n'était dû à Sylvain par la Compagnie opposante que la somme de 17 francs; Déclare, en conséquence, l'offre du 27 janvier 1913 suffisante et libératoire ; Condamne Sylvain aux dépens liquidés à... taxe réservée, faute de production des rôles. Suivent la signature et l'enregistrement.