Annales des Mines (1895, série 9, volume 4, partie administrative) [Image 154]

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JURISPRUDENCE.

recevoir une indemnité de privation de jouissance, égale au double du produit net du terrain endommagé, la faculté d'exiger des concessionnaires l'acquisition du sol, si mieux il ne préférait conserver son immeuble et réclamer, à raison de la diminution de valeur des parcelles occupées, des dommages-intérêts calculés au simple; Attendu que les termes de la loi ne permettent pas de douter que pendant tout le temps de l'exploitation, il ne pourrait y avoir matière à aucune indemnité autre que celle prévue par les articles 43 et 44, qu'autant qu'un préjudice résultant d'une cause étrangère à l'occupation même, telle, par exemple, que la suppression d'une source, l'altération des eaux d'un ruisseau parle déversement de liquides nuisibles ou corrompus, la destruction plus ou moins complète de bâtiments ou d'objets appartenant au propriétaire, serait venu à se produire; Attendu que, la prétention des consorts de Chantreau de se faire payer immédiatement, en dehors du loyer convenu, une somme de 7.440 francs est uniquement basée sur la dépréciation que leur sol aurait subie par le seul fait de l'occupation ; Attendu que, dans l'état actuel des choses, et alors qu'il était constant que l'exploitation des mines de Saint-Laurs, qui dure depuis plus de vingt ans, n'a pas pris fin, une telle demandées! prématurée ; qu'elle ne pourra être examinée qu'à la fin de la jouissance; que c'est alors seulement qu'on sera à même d'apprécier l'étendue du dommage qu'on ne saurait dès aujourd'hui déclarer certain et définitif, puisqu'il est susceptible de s'aggraver encore, comme aussi de s'amoindrir, de même qu'il pourrait disparaître entièrement si la Société des mines avait rétabli les lieux dans leur état primitif; Attendu qu'en vain on voudrait soutenir que, en cas de vente de la propriété dont la compagnie appelante occupe une partie, les consorts de Chantreau, subiraient immédiatement une perte à cause des dégradations du sol; qu'il est de toute évidence que l'acquéreur qui succéderait à tous leurs droits et serait appelé à toucher toutes les indemnités auxquels ils auraient pu prétendre n'hésiterait pas à donner du domaine le prix qu'il vaut réellement; Attendu que, les propriétaires du sol trouvent dans l'installation de la mine, dans les constructions édifiées par la Société, dans le matériel qu'elle possède des garanties plus que suffisantes pour assurer le paiement de l'indemnité éventuelle qui pourra leur appartenir un jour;

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Attendu que la théorie admise par les premiers juges conduirait à des résultats inacceptables; qu'ainsi tandis que les compagnies minières se verraient privées du droit qu'elles ont de remettre ultérieurement le sol en état, les propriétaires du terrain toucheraient pour l'occupation de ce terrain, non pas seulement le double du produit net de son revenu, comme le veut la loi, mais encore un capital productif d'intérêts pour un dommage hypothétique causé par cette même occupation; Attendu par suite,qu'il y a lieu de faire droit à l'appel principalSur l'appel incident : Attendu qu'en présence de la réformation de la disposition du jugement qui avait reconnu en principe le droit à une indemnité spéciale et qui pour en fixer le chiffre, avait, par voie de conséquence, ordonné une expertise qui n'a plus d'objet, il devient inutile d'examiner le mérite du deuxième chef des conclusions prises devant la cour par les consorts de Chantreau, et tendant à faire décider que le prix des matériaux provenant du sous-sol, qui n'ont pas été employés au remblaiement de la mine, ne doit pas venir en déduction de l'indemnité réclamée pour diminution de valeur du terrain ; Attendu quant au premier chef de l'appel incident, qu'il doit être rejeté par les motifs qui ont déterminé le tribunal, et que la cour s'approprie; Sur les dépens de première instance et d'appel ; Attendu qu'il sont à la charge des consorts de Chantreau, qui succombent sur les points essentiels de leur prétention; Pour ces motifs, La cour, parties ouïes, M. l'avocat général entendu, Et après en avoir délibéré en nombre prescrit et conformément à la loi, Statuant sur l'appel principal et sur l'appel incident, émis à rencontre du jugement qu'a rendu entre les parties, sous la date du 13 mars 1894, le tribunal civil de Niort; Sur l'appel principal : Dit qu'il a été mal jugé en ce que les premiers juges ont admis le principe de l'indemnité spéciale réclamée parles consorts de Chantreau, pour dépréciation du sol, et ont par suite ordonné une expertise pour en déterminer le chiffre; Dit qu'il a été bien appelé quant à ce; En conséquence, met à néant la disposition attaquée; Et, émandanl, réformant et faisant ce que les premiers juges auraient dû faire: