Annales des Mines (1888, série 8, volume 7, partie administrative) [Image 97]

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JURISPRUDENCE.

Le tribunal a justement rejeté les prétentions d'Argaud portant sur la classification des charbons et leur répartition par la Compagnie en diverses catégories, et il y a lieu d'adopter complètement les motifs du jugement. § 3. Sur la profondeur des puits :

Par l'article 8 du traité du 20 février 1835, les parties contractantes ont déclaré s'en rapporter aux lois, règlements et ordonnances sur les mines, pour tous les points auxquels il n'est pas dérogé formellement par le susdit traité. Les termes de cet article sont clairs et ne peuvent donner lieu à une autre interprétation que le sens naturel qu'ils offrent à l'esprit, c'est-à-dire que les parties contractantes devront se référer, pour toutes les questions non prévues dans leur traité actuel, aux lois, règlements et ordonnances sur les mines, et, dès lors, sans déroger aux règles de compétence que la nature de ces actes comporte. Il est absolument inexact de dire, ainsi que l'a fait le tribunal, que les parties contractantes se sont, par cet article 8, approprié les dispositions de l'ordonnance de 1820, et qu'en se référant à ses dispositions, elles ont fait un acte équivalent à l'incorporation même dans leur traité de son texte expliqué, modifié ou maintenu dans son intégrité. 11 est, au contraire, certain que cet article ne saurait avoir une telle portée; il ne peut être considéré que comme une formule, n'ajoutant aucune force nouvelle au traité, n'entraînant aucune dérogation au droit commun et il pourrait être supprimé sans que la condition des parties en fut modifiée, pas plus qu'elle ne peut l'être par son maintien. L'ordonnance de 1820 est un acte dont l'interprétation appartient à l'autorité administrative et dont la règle de la séparation des pouvoirs enlève la connaissance à l'autorité judiciaire. Les premiers juges l'ont bien compris, mais ils ont cru tourner cette difficulté en déclarant ne pas vouloir expliquer l'ordonnance de 1820 en elle-même et comme un acte de l'autorité publique, mais en tant que les parties ont voulu en faire leur règle. Cette proposition serait vraie et pourrait être admise au cas seulement où les parties auraient fait passer dans leur traité les articles de l'ordonnance de 1820 qu'elles entendaient s'approprier plus spécialement, ou même expliqué seulement, au point

de vue du règlement de leurs intérêts prives, le sens et la portée des dispositions générales de l'ordonnance; mais, faute par elle de l'avoir fait, c'est bien l'ordonnance elle-même qu'il s'agit d'interpréter et l'on ne saurait le faire sans violer une des règles fondamentales de notre droit public. Il est absolument inexact de prétendre que l'ordonnance de 1820 attribue une compétence générale aux tribunaux ordinaires, soit par son article 20, soit parce que ladite ordonnance n'étant qu'une application des principes posés par la loi du 21 avril 1810, n'en constituant en quelque sorte que le développement et la réglementation, elle s'en approprie les dispositions en ce qui concerne l'attribution à l'autorité judiciaire des difficultés d'interprétation qu'elle peut soulever. Au contraire, si la loi de 1810, en raison de l'époque où elle a été faite, du peu de développement que présentait à ce moment l'industrie minière, de l'absence presque absolue de concessions régulières, a cru devoir étendre dans une très large mesure la compétence des tribunaux judiciaires, il faut décider que tous les actes administratifs qui ont été édictés, après la loi précitée, ont tendu à La restreindre; notamment l'ordonnance de 1820, dans les dispositions de son article 20, a bien dit que les contestations qui pourraient s'élever entre les propriétaires et le concessionnaire à raison du paiement de la redevance en nature et en argent, seraient portées devant les tribunaux; qu'il en serait de même (article 9) dans le cas d'empiétement d'un concessionnaire voisin, en cas de contestation sur la quotité de l'extraction (article 10); mais ainsi elle a limitativement stipulé les cas où le recours à l'autorité judiciaire serait permis, et réservé tous les autres. D'ailleurs, le renvoi aux articles. 87 et suivants de la loi de 1810, mentionné en l'article 20 de ladite ordonnance, prouve bien que les tribunaux ont, dans les cas énumérés ci-dessus, le droit d'ordonner une expertise, et c'est ce qui a été fait au cas actuel, mais ne dit en aucune façon que si de l'expertise résulte la nécessité d'une interprétation de ces dispositions, l'attribution du droit d'y procéder sera dévolue à l'autorité judiciaire. En conséquence, si l'article 2 de l'ordonnance de 1820 explique de quelle manière doit être mesurée la profondeur des puits qui modifie le taux de la redevance, les parties sont en désaccord sur le point de départ du mesurage tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des puits ; et il y a lieu de les renvoyer à se pourvoir comme elles l'aviseront, auprès de l'autorité administrative pour