Annales des Mines (1887, série 8, volume 6, partie administrative) [Image 140]

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davée une exploitation autrefois constituée entre différents propriétaires pour extraire le charbon qui existait sous les propriétés Rolland Palle. Le 9 septembre 1857, elle se constitua en Société sous le nom de Compagnie de Montaud ; à raison de la difficulté d'exploiter utilement sous des parcelles placées, pour ainsi dire, en échiquier, une convention intervint, le 6 juillet 1861, entre cette Société et la Compagnie des mines de la Loire, convention par laquelle celle-ci, en échange de certaines parcelles et d'une redevance de 30.000 fr. au minimum, en concédait un certain nombre d'autres, ce qui forma un ensemble unique, un seul tenement se prolongeant jusqu'au Furens, limite extrême de lu concession des houillères de Saint-Ëtienne. A la suite d'une mise en demeure de l'administration, il M décidé entre la Compagnie des mines de la Loire et les syndics de celle de Montaud, que le directeur des travaux de la première surveillerait également ceux de la seconde, et cette convention fut approuvée le 4 juillet 1863, par arrêté du préfet de la Loire. L'exploitation de l'enclave de Montaud se continua ainsi jusqu'en 1871, époque à laquelle elle fut arrêtée par décision préfectorale ; mais Schneider et C;e devinrent successivement acquéreurs de toutes les actions, et, à partir du 22 août 1874, ils reprirent, pour leur compte personnel, l'exploitation autrefois interdite. La Compagnie des houillères de Saint-Étienne exploitait, de son côté, la huitième couche de houille, lorsqu'elle rencontra tout à coup, en 1878, sur la rive droite du Furens, c'est-à-dire dans sa propre concession à elle, des galeries souterraines paraissant être la continuation de celles de Montaud : à la suite de constatations faites contradictoirement, en 1880 et 1881, l'empiétement fut déterminé, mais le Creusot, refusant d'en accepter la responsabilité , le procès s'engagea par l'assignation du 31 janvier 1882, par laquelle les Houillères réclament au Creusot le payement de 300.000 francs de dommages-intérêts. Schneider et C;°, continuateurs de la Compagnie de Montaud. prétendent que l'action qui leur est intentée, prenant sa source dans un délit, est soumise à la prescription triennale; ils ont formé, subsidiairement, des demandes en garantie contre Voroi et Ozier, autrefois directeurs de l'ancienne Compagnie de Montaud, Million, Bodoy et Binachon autrefois ses syndics, enfinb Compagnie des mines de la Loire, pour lui demander éventuellement le remboursement des redevances par elle perçues,

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vertu de la convention de 1861, sur les charbons indûment extraits de la concession des Houillères. Les Houillères de Saint-Etienne répliquent que la prescription de trente ans est seule applicable, et elles concluent à la responsabilité, solidairement avec Schneider et C", de la Société des mines de la Loire, de Voron et d'Ozier, qui, soit par leur défaut, de surveillance, soit volontairement, auraient permis ou négligé d'empêcher les empiétements dont la réparation est demandée. Enfin, la Société civile des tréfonds, étant aux droits des consorts Jacquemond, est intervenue dans l'instance pour se faire payer par les Houillères ou par qui il appartiendra, sur des bases à déterminer par l'expertise, les redevances qui lui sont dues. En ce qui concerne L'exception opposée à l'action des Houillères, par Schneider et C": Pour résoudre la question relative à la durée de la prescription, il y a lieu de rechercher qu'elle est i'origine de l'action intentée par la Compagnie des houillères de Saint-Etienne, et, dans le cas où ce serait un délit, si la Société Schneider et Cio n'a pas renoncé à se prévaloir de la prescription de trois années. Sur la première question : En droit, il résulte de la combinaison des articles 2, 637 et 638 du code d'instruction criminelle, que l'action civile est, en matière pénale, subordonnée à l'action publique dont elle est, en quelque sorte, la dépendance et l'accessoire; nées toutes deux du même fait délictueux, eUes vivent le même temps et disparaissent au bout d'une période rigoureusement déterminée ; elles peuvent être poursuivies ensemble ou séparément devant la même juridiction ou devant des juridictions différentes (art. 3 du même code); mais leur mode d'exercice ne saurait en rien modifier leur durée. En outre, la qualification donnée aux faits par la demande ne peut pas suffire pour leur enlever leur caractère propre: le Tribunal, juge de l'action, étant le juge de l'exception, doit examiner s'ils présentent réellement une contravention à la loi pénale, afin d'apprécier en connaissance de cause la fin de non-recevoir tirée de ce que l'action civile serait éteinte. En fait, l'acte dont la Compagnie des mines de la Loire demande la réparation est l'exploitation, sans droit, dans son propre terrain, d'un espace d'environ un hectare et demi, exploilation qui remonte à plus de trois années avant l'assignation, puisque toutes les parties en cause s'accordent a la placer avant 1870, de 1862 à 1867.