Annales des Mines (1886, série 8, volume 5, partie administrative) [Image 130]

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entre les pourvois en matière criminelle et les pourvois relatifs il la matière toute spéciale de l'expropriation pour cause d'utilité publique. La même marche doit être suivie, veuillez le remarquer, soit que vous attaquiez au nom de l'État le jugement ou la décision du jury, soit que le pourvoi se trouve dirigé contre l'État; c'est toujours par votre intermédiaire et par celui de l'administration centrale que, dans tous les cas, la Cour de cassation doit être saisie du pourvoi et de toutes les pièces nécessaires pour qu'elle puisse statuer en connaissance de cause. Si c'est vous qui introduisez le pourvoi, vous avez h vous assurer, par l'examen attentif de ehaque dossier, qu'il contiennes éléments propres k justifier les moyens de cassation que vous jugerez k propos d'indiquer. Si le pourvoi est formé contre l'administration, vous devez chercher à réfuter les motifs qui seraient invoqués contre elle. Il est impossible de donner ici k l'avance une nomenclature complète des productions qu'il est utile de faire; ces productions varient avec chaque espèce; c'est aux lumières de MM. les préfets k les guider dans cette appréciation. Ainsi, par exemple, lorsque l'administration se pourvoit contre un jugemcnl qui a refusé de prononcer l'expropriation, ce jugement doit indiquer en quels points on se serait écarté des dispositions des titres 1 et 2 de la loi; il vous est facile dès lors de déterminer les pièces k produire pour prouver que la procédure incriminée n'est pas irrégulière. S'agit-il d'un jugement qui a prononcé l'expropriation? D'ordinaire, ce n'est pas l'administration qui a intérêt a se pourvoir; il peut arriver cependant que le tribunal ait mis k l'expropriation des conditions ou des restrictions que l'administration ne pourrait accepter. En ce cas, le jugement porte en soi-même la preuve de l'illégalité qui lui serait reprochée. Les pourvois contre les décisions du jury spécial soulèvent plus de complications. En effet, ils peuvent être basés sur la violation de l'une ou de plusieurs des nombreuses formalités qui doivent s'accomplir postérieurement au jugement d'expropriation, jusques et y compris l'ordonnance d'exécution rendue par le magistrat directeur du jury. En général, une copie par extrait du procès-verbal des opérations du jury, de la décision du jury et de l'ordonnance du magistrat directeur, peut suffire pour justifier la violation des formalités prescrites par les articles de la loi n°» 32, 33, 34, 3S, 36, 37, 38, 39, 40 et 41; mais souvent aussi d'autres pièces seront nécessaires. Plusieurs pourvois ont déjà été basés sur des irrégularités commises lors de la désignation des jurés (article 30) ; dans ce cas, il est nécessaire de produire l'arrêt de la cour royale, ou le jugement du tribunal du chef lieu judiciaire qui a désigné les jurés. Dans d'autres affaires, il s'agissait de la violation de la disposition de l'article 44 qui prescrit au jury de ne connaître que des affaires dont il a été saisi au moment de sa convocation : l'examen de ce moyen exige la connaissance du réquisitoire adressé k la cour en vertu de l'article 30. Si le pourvoi est basé sur la violation du § 3 de l'article 39, il faudrait souvent transmettre l'exploit de demande signifié en exécution de l'article 24. On pourrait multiplier encore l'énumérction de toutes les circonstances dans

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lesquelles il y aurait lieu à pourvoi ; mais, sans qu'il soit besoin de pousser plus loin ces citations, vous comprendrez parfaitement que très souvent le procèsverbal des opérations du jury ne serait pas une production suffisante, et que chaque espèce nécessite la recherche attentive et la réunion des pièces qui doivent l'appuyer : c'est h votre discernement il en faire le choix, et je ne puis trop appeler votre attention sur ce point important. L'article 46 de la loi porte qu'après la clôture des opérations du jury, les minutes de ses décisions et les autres pièces qui s'y rattachent sont déposées au greffe du tribunal civil de l'arrondissement. Le greffier chargé de ce soin ne saurait mettre trop de diligence k l'accomplissement du dépôt. Souvent le pourvoi ne peut être motivé que sur le texte même du procès-verbal ; les parties ont donc besoin, pour mettre à profit le délai du pourvoi, d'obtenir immédiatement copie ou extrait de la décision du jury; cependant on a déjk signalé a l'administration que ces copies ou extraits n'avaient été mis k la disposition des intéressées que peu de jours avant l'expiration du délai de quinzaine. L'attention de M. le garde des sceaux a été appelée sur ce point; je ne doute pas que, sur ses instructions, les recommandations les plus positives ne soient adressées aux greffiers, par les présidents des cours et tribunaux, pour que le bénéfice du délai fixé par la loi ne soit pas rendu illusoire à raison des lenteurs apportées à la délivrance des copies. Je n'ai pas besoin de vous rappeler, monsieur le préfet, que l'administration doit elle-même user de la plus grande célérité dans tout ce qui touche k la matière des pourvois. Peut-être la circulaire du 15 février 1842 a-t-elle indiqué un délai trop restreint pour la transmission, par vos soins, des pièces remises entre vos mains par le procureur du roi, lorsqu'il s'agit de pourvois dirigés contre l'administration. Il est possible que ce délai soit quelquefois incompatible avec la maturité de l'examen auquel vous devez vous livrer de concert avec M. l'ingénieur en chef; mais s'il peut être dépassé parfois de quelques jours, veuillez ne pas perdre de vue le temps moral qu'on doit laisser h l'administration centrale pour l'examen définitif qu'elle se réserve, et l'envoi qu'elle se charge de faire k la chambre civile de la Cour de cassation. Il importe donc de mettre ii profit tous les instants et de ne jamais oublier le caractère d'urgence et de rapidité que la loi a voulu imprimer k cette procédure spéciale. En résumé, monsieur le préfet, l'objet de la présente circulaire est d'arriver à ce résultat, que les intérêts de l'État soient toujours convenablement défendus devant la Cour de cassation ; que la Cour ne soit saisie que de pourvois réellement utiles et d'affaires complètement instruites, dans lesquelles la solution de la question de droit ne soit jamais entravée par l'insuffisance des preuves ou des éclaircissements sur les points de fait. Sauf quelques améliorations de détail qui s'obtiendront peu k peu, le mécanisme de la nouvelle législation sur l'expropriation pour cause d'utilité publique fonctionne parfaitement dans ses autres parties ; l'instruction des pourvois seule laisse beaucoup & désirer. L'administration a besoin de réclamer le concours très actif et tout personnel de MM. les préfets et| de MM. les ingénieurs, pour corriger les imperfections qui altèrent encore cette dernière phase de la procédure. Ne perdons pas de vue qu'un pourvoi n'a pas seulement, pour l'administra-