Annales des Mines (1882, série 8, volume 1, partie administrative) [Image 131]

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LOIS, DÉCRETS ET ARRÊTÉS

SUR LES MINES, ETC.

Formera-t-on des sociétés nouvelles, sous la forme de régies co-intéressées, et n'aurait-on pas dû peut-être tenter dès le premier jour quelque expérience de cette nature? Aura-t-on recours à l'exploitation directe par l'État ? N'est-il pas préférable, à l'heure actuelle, d'interposer entre le public pour lequel les voies ferrées sont établies et l'État chargé d'en surveiller le fonctionnement, des sociétés d'exploitation ? Un certain nombre de compagnies secondaires ayant été rachetées, on a constitué un réseau à la tête duquel a été placée une administration d'État. Ce réseau ne saurait prospérer, étant formé de tronçons mal reliés les uns avec les autres. N'est-il pas indispensable de coordonner ces éléments épars, d'en faire un ensemble aisément et fructueusement exploitable, soit que l'État le garde en mains comme un champ d'expériences, comme une pépinière d'ingénieurs et d'agents spéciaux, comme une sorte d'école lui permettant d'étudier les détails d'une exploitation et de fortifier ainsi son contrôle sur les compagnies, soit au contraire que le Parlement se décide à le confier ultérieurement, après le règlement de la question des chemins de fer, à l'industrie privée ? D'autre part, il est juste et nécessaire de se demander si les anciennes lignes elles-mêmes fonctionnent le mieux possible, si les compagnies ne sont point conduites à se préoccuper trop exclusivement de leurs intérêts; si, en présence de bénéfices croissants, l'État n'a pas le devoir de réaliser certaines améliorations au nom de l'intérêt public. C'est ainsi que l'opinion se préoccupe de l'encombrement auquel échappent avec peine les artères principales. C'est ainsi que les délibérations des chambres de commerce et la série des enquêtes parlementaires font ressortir le besoin de simplifier les tarifs, de les unifier dans une certaine mesure, de les abaisser — d'ailleurs avec prudence -— pour donner à nos produits industriels ou agricoles, mieux que par une surélévation des droits de douane, les moyens de lutter contre la concurrence étrangère. Il y a urgence à résoudre ces divers problèmes, car les nouvelles voies ferrées s'achèvent progressivement et l'incertitude qui plane sur l'adoption d'un régime définitif est fort préjudiciable aux compagnies elles-mêmes. Jusqu'ici, la question ne me semble pas avoir été abordée de front. On s'est efforcé d'arriver à un accord avec quelques-unes des compagnies, sans faire prévaloir des vues d'ensemble, sans

même poser avec une précision suffisante les principes généraux qui doivent régir la matière. Des conventions ont été conclues avec les compagnies du Nord et de l'Ouest, puis, à deux reprises, avec la compagnie d'Orléans. Elles ont eu la singulière fortune de recevoir des commissions parlementaires un accueil défavorable, sans même avoir été défendues à la tribune par leurs auteurs. Les trois premières ont été abandonnées ou retirées. La dernière a réuni contre elle, dans la commission de la Chambre, une unanimité caractéristique, et d'ailleurs son adoption même n'eût pas résolu le problème en ce qui concerne le reste de la France. Dans cette situation, le ministère doit-il, dès aujourd'hui, entamer des négociations nouvelles avec les compagnies? Vous penserez sans doute avec moi qu'il y a une autre attitude à prendre. Les chemins de fer ont été établis, ils doivent être exploités dans l'intérêt de tous. En se réservant le droit de ressaisir avant terme leur exploitation, quitte à la confier à d'autres sociétés, dans des conditions meilleures, l'État est resté le maître. Les cahiers des charges et les conventions qui règlent ses relations avec les compagnies ont été rédigés à une époque où nul ne pouvait prévoir l'avenir réservé aux chemins de fer. Notre développement économique, aussi bien que l'achèvement du réseau, rend nécessaires des réformes sérieuses. 11 faut envisager tout d'abord ces questions multiples et complexes dans leur ensemble, en dehors des compagnies comme si nous étions parvenus à la fin des concessions, avec cette différence que le capital d'établissement n'est pas encore amorti. Je vous propose d'en confier l'examen à une commission de trente membres. Cette commission fonctionnerait sous la présidence du ministre des travaux publics. Elle aurait pour vice-présidents les soussecrétaires d'État des travaux publics et des finances. Elle comprendrait également deux fonctionnaires du ministère des travaux publics et on lui adjoindrait comme secrétaire, avec voix délibérative, un ingénieur des ponts et chaussées. Elle s'appuierait sur les comités permanents du ministère. Elle .serait invitée à hâter ses travaux. Il ne s'agit pas ici, en effet, d'une commission d'enquête, mais d'une commission exécutive: les matériaux sont tout près; il ne reste qu'à édifier. Cette commission fixerait les divers points énumérés plus haut;

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