Annales des Mines (1880, série 7, volume 9, partie administrative) [Image 177]

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COMMISSION

D'ENQUÊTE.

autoriser le départ d'un train quand bien même les aiguilles de l'indicateur seraient verticales, c'est-à-dire à voie libre, qu'après avoir signalé le départ du train à la gare suivante. Les mesures de sécurité se trouveront donc en quelque sorte accumulées. Je ne parle pas de l'emploi d'un « Block-system » automatique basé sur le jeu d'appareils électriques actionnés par les trains eux-mêmes en marche, dont un assez grand nombre d'inventeurs ont proposé diverses solutions, la plupart très défectueuses. Aucun de ces systèmes n'a été jusqu'ici expérimenté. Le mieux étudié de beaucoup qui nous ait été présenté est, sans contredit, celui de MM. Ducousso frères ; on le trouvera décrit en détail et discuté dans la série des rapports présentés par la commission sur les inventions. Tout ingénieux qu'il soit, il ne nous a pas paru répondre aux besoins réels de l'exploitation, et nous ne l'avons trouvé susceptible d'aucune application pratique. Il serait effectivement dangereux de faire reposer la sécurité d'un train sur le jeu d'appareils automatiques aussi compliqués et à la fois aussi délicats, sujets à tous les accidents des courants électriques, et qui ne peuvent donner, en définitive, au mécanicien d'autre avertissement qu'un simple coup de sifflet automoteur de sa machine, sans laisser aucune trace visible de ce signal qu'un autre agent puisse contrôler, quand une irrégularité de fonctionnement ou d'interprétation peut occasionner une catastrophe. Si l'on veut appliquer le « Block-system » à la voie unique, ce n'est pas aux systèmes automatiques qu'il faut recourir, mais, comme je l'ai dit, aux appareils connus et déjà expérimentés. Les systèmes Lartigue ou Regnault employés dans les conditions cidessus indiquées ne pourraient laisser que bien peu de place aux causes d'accidents; il ne faut pas se dissimuler toutefois qu'ils pourraient introduire dans l'exploitation une complication coûteuse et gênante, et qu'ils ne donneraient aucun moyen de réparer une erreur, si par hasard elle était commise. Cloches électriques. — Les cloches électriques sont généralement considérées comme d'un emploi plus pratique et d'une efficacité éprouvée déjà depuis longtemps en Allemagne, en Autriche, en Italie, en Hollande, etc., où elles sont devenues d'un usage général. Elles permettent d'annoncer le départ de chaque train par le signal Je plus rapide, équivalent à la demande de voie. Elles préviennent tous les gardes des passages à niveau de l'arrivée prochaine et du sens des trains. Elles permettent de signaler sur toute la section les véhicules partis en dérive. Elles donnent enfin,

ACCIDENTS

DE

CHEMINS

DE

FER.

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avec la plus grande simplicité, cette ressource extrême du signal d'alarme ou d'arrêt de tous les trains, que tant d'inventeurs ont cherché en vain à réaliser par l'emploi des moyens les plus variés et les plus compliqués. Deux compagnies ont adopté l'emploi de ces cloches : le Nord, sur la totalité de son réseau à voie unique (soit 1.291 kilomètres) ; Paris-Lyon-Méditerranée, sur les 3o centièmes environ du sien (soit 92/1 kilomètres), et cette dernière en développe chaque jour l'application. La compagnie du Nord emploie les appareils Siemens, à courant d'induction. A chaque station est placé un inducteur qui permet de produire un courant électrique dans le fil des sonneries, par la simple manœuvre d'une manivelle, et un commutateur qui permet de diriger ce courant à volonté sur l'une ou l'autre des sections entre lesquelles la station est placée. A chaque station, et à tous les postes intermédiaires échelonnés sur la ligne, est placé un appareil récepteur dans lequel un poids, déclenché par le passage du courant, actionne un système de deux marteaux qui frappent, à chaque déclenchement, cinq coups doubles sur un gros timbre. Les trains marchant dans un sens sont annoncés par une série de cinq coups, ceux allant en sens contraire par deux séries. Le signal d'alarme ou d'arrêt général, sorte de tocsin, est donné par une série de coups prolongée. Les postes intermédiaires sont établis autant que possible à des passages à niveau ou à d'autres postes déjà gardés, et lorsque la distance de ces derniers dépasse 12 à i.5oo mètres, dans des guérites installées latéralement à la voie. Tous les agents de la voie sont ainsi initiés, comme ceux des stations et des trains, au mouvement de la marche des trains, et appelés à concourir à leur sécurité. S'ils entendent annoncer successivement l'expédition de deux trains de sens contraire, ils doivent faire le signal d'arrêt au premier train qui se présente, et employer tous les moyens prescrits pour prévenir la collision. La compagnie Paris-Lyon-Méditerranée a donné la préférence aux cloches autrichiennes (système Léopolder, de Vienne) installées sur un fil à courant électrique continu, alimenté par des piles placées au pied des appareils à cloches des gares. Les appareils des stations en correspondance, ainsi que ceux des maisons de gardes et des guérites comprises entre deux stations, sont donc placés sur le même circuit, et il suffit d'interrompre, puis de rétablir le courant, sur un point quelconque de ce circuit, pour produire le choc simultané des marteaux sur toutes les cloches.