Annales des Mines (1880, série 7, volume 9, partie administrative) [Image 142]

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JURISPRUDENCE. JURISPRUDENCE.

doit-il être évalué au double de la valeur qu'il avait avant l'exploitation, ou au double de la valeur qu'il a au moment où le propriétaire en exige l'achat? Sur ce point, l'occupation, par le concessionnaire d'une mine, d'une parcelle de terrain ouvre au propriétaire de cette parcelle deux actions; l'une en indemnité annuelle, l'autre en achat forcé, suivant les cas; mais il peut toujours user, à son choix, de l'une ou de l'autre, et, bien que les dommages aient été de ceux prévus pour donner lieu à l'achat forcé, se contenter, pendant un long temps, du revenu au double qui peut varier suivant la plus-value locative des terrains de même nature. Tant qu'il conserve la propriété de ce terrain, ce propriétaire ne peut pas, par le fait de la mine, voir sa condition rendue moins avantageuse que celle de ses voisins ; ceux-ci bénéficient de la plus-value que leur sol acquiert avec le temps, et il doit, lui aussi, en profiter; on ne saurait donc, lorsqu'il lui plaît de réclamer l'achat de son terrain, remonter à 20 ou 5o ans pour en rechercher la valeur et, si on le faisait, l'estimation au double serait souvent de beaucoup inférieure à la valeur vénale actuelle, ce qui aboutirait à un résultat absolument contraire à l'esprit de la loi de 1810. Cette loi n'a statué que pour le cas le plus fréquent où, immédiatement après la concession, le propriétaire vendait ses terrains; par ces expressions « les terrains seront toujours évalués au double de la valeur qu'ils avaient avant l'exploitation », elle a voulu dire au double de la valeur qu'ils avaient avant les dommages causés par l'exploitation, abstraction faite de ces dommages; il faut reconnaître que c'est au moment de la demande de l'achat forcé qu'ils doivent être estimés de cette manière. En fait, les experts ont estimé suivant ces bases ; ils ont pris en considération la valeur du sol, et ils ont laissé de côté la valeur que ce sol présentait à la compagnie du chemin de fer qui offrait d'une partie du domaine, 3.ooo francs les 1.000 mètres, et ils l'ont

En déclarant que les terrains seraient payés au double de leur valeur vénale, le législateur de 1810 a voulu fixer une indemnité qui est, dans la plupart des cas, largement suffisante ; mais il n'a point dit d'une manière absolue qu'aucune autre indemnité ne serait accordée ; il faut, lorsqu'un dommage exceptionnel se produit, recourir au droit commun ; cela paraît d'autant plus équitable que le concessionnaire a la faculté de prendre dans un domaine uniquement ce qui lui est nécessaire, là où cela lui est utile, de telle sorte que très souvent le prix au double de la valeur vénale est loin de comprendre la dépréciation considérable qui peut résulter de ce morcellement, de l'établissement des puits et des machines, de l'isolement du reste de la propriété des voies publiques, et de tous autres inconvénients de même nature. Il y a lieu de faire application de ces principes à l'espèce. En fait, il résulte du rapport des experts et du plan des lieux, qui s'y trouve joint, que la parcelle occupée par la compagnie de Montieux forme une enclave dans la propriété des consorts Dumarest ; le chemin d'accès du puits longe la voie ferrée, de telle sorte qu'il n'est plus possible d'embrancher de cette propriété un chemin de fer sur la voie principale ; par leur situation, les ter rains des demandeurs paraissent destinés à être vendus pour servir à des établissements industriels, et de la double cause indiquée, il suit que les terrains ont subi une véritable dépréciation. Il y a là évidemment des circonstances de fait qui créent une situation exceptionnelle, que le prix au double de la valeur du sol occupé est absolument insuffisant à réparer, et les experts ont avec raison estimé séparément ce dommage à i.5oo francs. Les consorts Dumarest ne sont pas fondés à demander que ce dommage soit porté au double, comme la valeur des terrains achetés. Par ces motifs, condamne la compagnie des mines de Montieux à payer aux consorts Dumarest la somme de Z1.320 francs, et celle de i.5oo francs pour la dépréciation du surplus du domaine.

estimé seulement à i.5oo francs; cette estimation est juste, doit être adoptée, et. l'indemnité au double due aux consorts Dumarest

CARRIÈRE. — ÉBOULEMENT.

fixée, pour i.Mo mètres occupés par la compagnie de Montieux,

à /1.320 francs. La seconde question soumise au tribunal est celle de savoir si, comme le prétend la compagnie, l'indemnité au double de la valeur vénale de la parcelle occupée est un véritable forfait, de telle sorte que le propriétaire de la surface ne puisse exiger au delà de cette indemnité, pour la dépréciation du surplus de son domaine.

PAR

RAPPORT

— RESPONSABILITÉ A

UNE

CARRIÈRE

DE

L'EXPLOITANT

VOISINE.

I. Jugement rendu, le i3 août 1877, par le tribunal de ire instance

d'Angers (affaire, SOCIÉTÉ

DE

LA

SOCIÉTÉ DE LA CARRIÈRE DE GRANDMAISON

CARRIÈRE

contre

DES GRANDS-CARREAUX). (EXTRAIT.)

Un éboulement considérable, qui s'est produit le 10 avril 1876,