Annales des Mines (1879, série 7, volume 8, partie administrative) [Image 75]

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JURISPRUDENCE. JURISPRUDENCE.

constructions qu'ils pourraient élever à l'avenir sur les terrains dont s'agit. Condamne la compagnie à payer i5.ooo francs pour la prohibition de bâtir, à charge pour Castanier de garantir la compagnie contre toute action relative à des constructions ultérieures.

MINE.

TERRAINS OCCUPÉS TEMPORAIREMENT.

PATION.

INDEMNITÉ D'OCCU-

INDEMNITÉ POUR TROUBLE OCCASIONNÉ AU PROPRIÉTAIRE

DANS LA JOUISSANCE DU SURPLUS DE SON HÉRITAGE.

Arrêt rendu, le 3 août 1877, par la cour d'appel de Nancy (affaire SEILLIÈRE contre STUMM). (EXTRAIT.)

En droit, sans se livrer aux conditions générales qui, dans l'espèce, se présentent d'elles-mêmes à l'esprit, il convient avant tout d'interroger les textes invoq ués par les frères Stumm, à l'appui de la résistance qu'ils opposent à la demande de leur adversaire le baron Seillière. Si l'on recourt à ce procédé, on arrive bientôt à se convaincre que, par les termes dont ils se servent, les articles 43 et hh de la loi de 1810 ne s'occupent que « des indemnités dues au propriétaire de la surface pour l'occupation du sol. » En ne parlant que des indemnités dues aux propriétaires de la surface pour l'occupation du sol, ils se réfèrent par cela même, « en ce qui touche les autres causes d'indemnités, aux règles du droit commun, c'est-à-dire aux dispositions de l'article i382 du code civil. » On ne saurait admettre, en effet, à moins de constater la plus invraisemblable des imprévoyances et de consacrer la plus révoltante des injustices, qu'en présence des causes infinies d'indemnité autres que l'occupation du sol, ils ont entendu laisser le propriétaire désarmé. Il est bien plus naturel de croire qu'ils n'ont eu en vue que la cause d'indemnité la plus fréquente, quodplerumque fit, et qu'ils n'ont réglé que celle-là. On ramène ainsi, par une jurisprudence tardive, mais plus prévoyante, à de sages et justes limites le privilège accordé par le législateur à l'industrie, dans la lutte qu'elle allait engager avec la propriété. En fait, après avoir posé le principe, il reste à l'appliquer et à voir si l'appelant souffre d'autres dommages que ceux relatifs à la prise de possession du terrain.

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Pour sainement résoudre cette seconde question du procès, il importe de se souvenir que le domaine du Montet, sis à quelques kilomètres de la ville de Nancy, en face du plus magnifique panorama, est et ne peut être qu'une propriété d'agrément, que le baron Seillière a acquise et embellie au prix de sacrifices qui s'élèvent aujourd'hui à la somme de plus de 65o.ooo francs. Il se proposait de l'embellir encore, quand, en 1868, les frères Stumm obtinrent, sous un domaine voisin, la concession d'une mine considérable. L'exploitation de cette mine nécessita, dans le domaine du Montet, à quelque distance, mais sous les fenêtres du château, la construction de deux hangars et surtout celle d'une estacade, composée de dix-sept chevalets en bois, haute à son milieu de 9°,7o, supportant une voie ferrée d'une longueur, comme obstacle, de 26im,2o, et qui, dans le parcours des wagonnets, laisse s'échapper, au moyen de trappes ouvertes de distance en distance, un mélange de pierre, de sable et de minerai, dont l'amoncellement continu aura bientôt fait d'une charpente légère un véritable remblai. Il suffit de jeter les yeux sur ce gigantesque travail pour se rendre compte des inconvénients de toutes sortes qu'il présente pour la propriété du baron Seillière. Outre qu'il en détache plus d'un hectare et demi et que, dans une certaine mesure, il en blesse la vue, il ne permet pas de la clore et de lui donner l'agrément d'un parc déjà dessiné. Il ne permet pas davantage d'y ménager une avenue et d'en placer l'entrée dans un endroit qui semblait indiqué. Il y attire enfin, à toute heure, de nombreux ouvriers, dont les habitudes et le langage offrent, aux promeneurs et surtout aux jeunes promeneuses, des garanties peu rassurantes de convenance et de discrétion. Il y a, dans cet ensemble de faits indéniables, la violation manifeste de ce que Regnaud de Saint-Jean-d'Angély appelait poétiquement, lors de la discussion de la loi, « l'asile des jouissances domestiques », en même temps que la source sans cesse alimentée de désagréments, d'ennuis et de gênes. Ces désagréments, ces ennuis, ces gênes constituent autant de dommages qui, pour n'être pas matériels et directs, n'en sont pas moins très appréciables et très sérieux. Les dommages dont s'agit, commencés avec l'exploitation de la mine, dureront aussi longtemps qu'elle, ce qui rend indispensable l'allocation de deux indemnités distinctes : la première, une fois payée, pour le passé ; la seconde, illimitée, proportionnelle à la